À Mbuji-Mayi, les autochtones réclament leurs terres à la MIBA

Dans la ville diamantifère, très peu de gens miseraient une pièce d’argent sur la Minière. La société ressemble à une coquille vide au point que tout le monde cherche à reprendre sur elle des droits, supposés ou réels; à commencer par les ayants-droits fonciers. 

L’affaire fait grand bruit à Mbuji-Mayi. Le tribunal de grande instance de cette ville a été saisi d’une plainte de la Minière de Bakwanga (MIBA) contre des autochtones Bakwanga. Ces derniers réclament la restitution des terres de leurs ancêtres dont l’entreprise se serait accaparée. La concession de la MIBA est étendue de terre sur plus de 27 000 km2. Elle détient des permis de recherche sur une superficie de 8 135 km2. Mais l’essentiel de l’activité minière se concentre dans son polygone de Mbuji-Mayi. À l’initiative de huit notables, les autochtones, mettent la pression pour contraindre la société à quitter le polygone. Pour parvenir à leurs fins, ils ont remis au goût du jour d’anciennes dispositions légales sur la société à charte, mais surtout une recommandation de la Conférence nationale souveraine, qui, selon eux, affirmait que le délai d’exploitation de la Minière de Bakwanga était déjà arrivé à échéance.

Constituée en société à charte pour une durée de 99 ans pendant la colonisation, la Forminière, sur les cendres de laquelle est née la MIBA a commencé l’exploitation industrielle du diamant en 1906. Un siècle après, les autochtones Bakwanga tiennent à reprendre « leurs » terres. En septembre, leurs représentants ont été détenus à la prison centrale de Mbuji-Mayi, suite à une plainte de la MIBA. La société déplorait la spoliation de ses terrains situés dans les quartiers de ses agents et la perturbation de la paix sociale. L’affaire a été portée devant le tribunal de grande instance de Mbuji-Mayi. Mais la date du début du procès n’a pas encore été fixée.

Des artisanaux font mieux

Depuis, l’acte de bravoure posée par les notables fait des émules. C’est du fait de la présence de la MIBA que le Kasaï a été déclaré zone A, toute autre activité industrielle y étant interdite depuis la colonisation. C’est seulement en 2009, suite à la loi Kambayi, du nom de l’auteur de la proposition votée par l’Assemblée nationale, que le régime de non-industrialisation a été officiellement levé. Alors président de la Fédération des creuseurs d’or et du diamant (FECODI), le gouverneur du Kasaï-Oriental, Alphonse Ngoy Kasanji avait, en son temps, sollicité du gouvernement l’ouverture d’un pan du polygone de la MIBA à l’exploitation artisanale. Sans succès.

Pourtant, selon les statistiques de la Division minière du Kasaï-Oriental, les opérateurs artisanaux rapportent plus de gemmes que la MIBA : 20 millions de carats en 2014 contre 30 000 seulement à la MIBA, selon les données du SAESCAM, le service chargé de la petite mine. Le cours du diamant se reprenant après la période des vaches maigres de 2008 et 2009, ce fut la ruée vers l’exploitation artisanale.

La gestion des terres à travers le pays pose trop de problèmes. L’État est le seul propriétaire du sol et du sous-sol. Les particuliers propriétaires des terrains n’ont que le droit de jouissance sur le fonds acquis après avoir satisfait aux conditions et obligations légales. Le droit de jouissance est prouvable par le titre de propriété ou le certificat d’enregistrement établi par le conservateur des titres immobiliers, soit pour la concession perpétuelle (exclusive aux personnes physiques congolaises de jouir indéfiniment du fonds), soit pour la concession ordinaire (réservée aux personnes morales : sociétés commerciales, associations sans but lucratif et aux personnes physiques étrangères, son terme est de 25 ans renouvelables). Là s’arrête la théorie.