Abidjan et Accra échouent dans leur tentative d’imposer un prix plancher pour le cacao

Le Conseil café-cacao de Côte d’Ivoire, le Cocoa Board du Ghana et les industriels du chocolat se sont réunis mercredi 3 juillet pour discuter des nouveaux mécanismes de fixation des prix de la tonne de fèves. L’objectif de la réunion, à Abidjan, était d’obtenir un prix minimum de 2 600 dollars la tonne de fèves afin de mieux rémunérer les producteurs.

LA RÉUNION d’Abidjan s’est terminée en queue de poisson. Néanmoins, une entente a été trouvée, consistant à l’instauration d’une marge minimale de 400 dollars pour la tonne. Koné Ibrahim Yves, le patron du Conseil café-cacao ivoirien, et Joseph Boahen Aido, numéro un du Cocoa Board ghanéen, ont expliqué que la Côte d’ivoire et le Ghana ont mis en place un nouveau mécanisme de fixation des prix pour le commerce des fèves de cacao qui contribuerait à fournir un prix rémunérateur aux producteurs. 

Le mécanisme qui a été introduit aux acteurs clés de l’industrie prend en compte un différentiel de revenu de subsistance fixe qui procurera aux producteurs un revenu décent, ont-ils assuré. Ils ont souligné, en outre, que la Côte d’ivoire et le Ghana ont, toutefois, promis d’engager des discussions avec l’industrie sur les questions de la durabilité. 

Pour rappel, le 12 juin, le Ghana et la Côte d’Ivoire avaient lancé un ultimatum, en décidant de suspendre les ventes de la récolte de la saison 2020-2021 si elle n’est pas payée à 2 600 dollars la tonne. Les deux géants du cacao font plus de 60 % de la production mondiale (4 millions de tonnes en 2018) dont environ 2 millions de tonnes sont produites par la Côte d’Ivoire et au moins de 500 000 tonnes par le Ghana. 

La Côte d’Ivoire et le Ghana ne sont donc pas parvenus à convaincre l’industrie du cacao sur l’instauration d’un système de prix plancher de 2 600 dollars la tonne. Dans le malaise ambiant, Koné Ibrahim Yves et Joseph Boahen Aido ont annoncé l’instauration d’un nouveau mécanisme de fixation des prix par les deux pays, instaurant un différentiel de 400 dollars la tonne pour garantir le prix plancher.  La mise en place d’un différentiel de 400 dollars la tonne sera difficile à appliquer avec les cours actuels du marché international, expliquent des experts. 

Le marché en perspective

Les deux pays producteurs ont donc promis d’initier de nouvelles rencontres avec les industriels. La réunion de mercredi passé a été une rencontre technique. « Nous n’avons jamais voulu de confrontations avec nos partenaires. À Accra, toutes les parties étaient pourtant tombées d’accord pour dire que le prix de 2 600 dollars la tonne du cacao était juste. Il y a même eu des voix parmi les industriels qui s’étaient élevées pour affirmer que les planteurs doivent avoir plus.

Sur les 100 milliards de dollars que représente le marché mondial du cacao, seuls 6 milliards reviennent aux agriculteurs. Une situation « déraisonnable », avait fustigé Mahamudu Bawumia, le vice-président du Ghana. La différence de prix payé aux producteurs des deux côtés de la frontière des deux voisins suscite la contrebande, source de tensions entre les deux pays. La firme de consulting indo-américaine Grand View Research annonce dans un récent rapport qu’en 2025, la valeur du marché mondial des fèves de cacao pourrait avoisiner 16,32 milliards de dollars, contre environ 10 milliards en 2018. D’après le cabinet, le développement rapide des chocolateries dans la région Asie Pacifique (Inde et Chine principalement) devrait booster la demande pour les fèves de cacao. L’Europe sera le second continent qui tirera cette dynamique d’ici 2025 avec une robuste industrie de la confiserie dans des pays comme l’Allemagne, le Royaume-Uni et la France.

Selon Grand View Research, le secteur de la pharmaceutique et du cosmétique seront les locomotives de la croissance de la consommation de fèves avec l’usage des produits de cacao en tant que lubrifiants, antioxydants et ingrédients dans la fabrication de produits de soins personnels. Le segment de la poudre de cacao enregistrera la plus forte croissance (+8 %) d’ici 2025 en raison du regain d’intérêt pour son emploi en tant qu’additifs dans la formulation des sirops de chocolat, la confection de gâteau ou de biscuits.