Bolloré qui tient à son image, investit à nouveau au Port d’Abidjan

 Le groupe français réclame 50 millions d’euros des DI à France Télévisions pour un reportage qui écorne son engagement en Afrique. Et pour montrer le contraire, il s’associe à Maersk pour la construction du 2è terminal à conteneurs en Côte-d’Ivoire.

 

Le groupe Vincent Bolloré estime qu’un reportage diffusé sur les antennes de la chaîne de  télévision française France 2 à propos de ses activités en Afrique a porté atteinte à son image. La multinationale française a demandé 50 millions d’euros à France Télévisions pour cette enquête, au cours d’une audience inhabituelle la semaine dernière devant le tribunal de commerce de Paris. Ce « portrait-enquête » sur Vincent Bolloré, diffusé en 2016 dans « Complément d’enquête » et qui traitait notamment de ses activités en Afrique, a « dénigré » le groupe pour une valeur de 25 millions d’euros, selon son avocat Didier Malka. À cela s’ajoute le préjudice moral causé, selon lui, par le reportage, notamment aux employés du groupe, chiffré lui aussi à 25 millions d’euros. L’avocat de Vincent Bolloré a dénoncé des « manquements déontologiques » de la part des journalistes, qui auraient manqué d’« impartialité ».

« Vincent Bolloré, un ami qui vous veut du bien? »

La plainte de Vincent Bolloré vise la rediffusion en 2016 de ce portrait-enquête de 72 minutes réalisé par Tristan Waleckx, Mathieu Rénier et Mikael Bozo. Ce reportage, intitulé « Vincent Bolloré, un ami qui vous veut du bien? » et couronné du prix Albert-Londres en 2017, retrace le parcours de l’industriel breton, de la reprise de la fabrique familiale de papier à cigarettes OCB en Bretagne, à la construction de son empire diversifié en passant par la reprise en main de Canal+ et sa présence en Afrique. La défense de France Télévisions a souligné de son côté que ce reportage relevait du droit de la presse et « pas du tribunal de commerce », alors qu’un autre procès sur ce même reportage, cette fois pour diffamation, doit s’ouvrir mardi 3 avril devant le Tribunal de grande instance de Nanterre.

Les avocats de France Télévisions, Mes Jean Castelain et Juliette Félix, ont demandé 100 000 euros de dommages et intérêts pour « procédure abusive ». Le groupe public regrette d’avoir été « traîné dans la boue » au cours d’une « procédure d’une parfaite mauvaise foi ». Ils ont qualifié les procès intentés par le groupe Bolloré de « procédures-baillons », visant à intimider les journalistes qui souhaiteraient enquêter sur ses activités. Le reportage évoque notamment les activités de la Socapalm, société qui produit de l’huile de palme au Cameroun et dont Vincent Bolloré est actionnaire. Des sous-traitants, pour certains présentés comme mineurs, payés à la tâche, travaillant sans vêtements de protection et logeant dans des conditions insalubres, y témoignent face caméra. « Un reportage n’a pas à être jugé devant un juge commercial », a souligné le journaliste Tristan Waleckx à l’issue de l’audience. Le tribunal de commerce doit rendre sa décision le 12 juin.

Concession attribuée à un consortium

En attendant, Bolloré et l’armateur danois Maersk prévoient d’investir 400 millions d’euros dans la construction du deuxième terminal à conteneurs au Port autonome d’Abidjan, en Côte -d’Ivoire, à partir de 2019, a déclaré, à Reuters, le directeur général adjoint de sa division de transport et de logistics. « Nous commencerons en juin ou en juillet 2019 », a déclaré Philippe Labonne, indiquant que « le projet serait financé en partenariat avec le danois Maersk ». Le nouveau terminal devrait être opérationnel, à partir de juin 2020.

La concession relative à la gestion du deuxième terminal à conteneurs du port d’Abidjan a été attribuée à un consortium composé de Bolloré Africa Logistics (BAL), d’APM Terminals (APMT), filiale du groupe danois AP Moller-Maersk, et du français Bouygues. Le Port autonome d’Abidjan sert notamment à l’exportation de fèves de cacao, dont la Côte-d’Ivoire est le premier producteur mondial. Il offre aussi un accès à la mer à des pays voisins enclavés comme le Burkina Faso ou le Mali. Les autorités portuaires mènent actuellement des travaux d’extension de ce port, qui incluent notamment l’élargissement du canal de Vridi, grâce à un financement accordé à la Côte-d’Ivoire par la Banque chinoise d’export-import (China Eximbank).

Selon les dirigeants du groupe, Bolloré  a choisi d’être présent en Afrique depuis de nombreuses années et y consacre la majeure partie de ses investissements. Sa filiale, BAL, se veut le « leader du transport et de la logistique en Afrique », où elle dispose d’un réseau sans équivalent (des centaines de filiales dans une cinquantaine de pays dont une quarantaine en Afrique. Ce maillage exceptionnel lui permet d’offrir des « solutions logistiques dédiées pour l’ensemble de ses clients ». En opérant dans 16 terminaux à conteneurs sur le continent par l’intermédiaire de partenariats public-privé portuaires gagnés à l’issue d’appels d’offres internationaux, Bolloré Africa Logistics est leader dans ce secteur. Il participe ainsi aux processus de privatisation des terminaux à conteneurs.

Il est opérateur de terminaux conteneurs d’Abidjan, en Côte-d’Ivoire, de Douala, au Cameroun, de Tema, au Ghana, de Lagos-Tincan au Nigeria, de Libreville-Owendo, au Gabon, de Pointe-Noire en République du Congo, de Cotonou au Bénin, de Freetown, en Sierra Leone, de Lomé, au Togo, de Conakry, en Guinée, et de Moroni, aux Comores.

Le groupe français a également exporté son savoir-faire hors Afrique dans des pays émergents à fort potentiel. À Port au Prince (Haïti) et à Dili (Timor Oriental). Dans les métiers d’agents Maritime, Bolloré Africa Logistics dispose de 70 agences en Afrique, 25 agences en France et dans la région Méditerranéenne, appuyées par six hubs commerciaux à Pékin, Dubai, Madrid, Athènes, New Delhi et Washington. Elles sont destinées à répondre à la demande mondiale de ses clients.

Le groupe prend aussi en charge, pour ses clients, toutes les démarches administratives et douanières, en amont et en aval du transport, et assure par camion, avion, ou train, l’acheminement des marchandises jusqu’à leur point de destination finale. BAL propose également à ses client une offre complète d’entreposage allant du stockage conventionnel sécurisé, de produits agricoles et de magasinage de marchandise, en passant par des solutions plus complexes de plateformes de distribution à valeur ajoutée.

BAL poursuit sa stratégie de logisticien intégré pour des secteurs clés comme les mines, les projets pétroliers et gaziers, l’agro-industrie, mais également les télécoms, l’industrie pharmaceutique et l’industrie des biens de consommations.

Par ailleurs, le groupe travaille, en concertation avec les États, sur la modernisation et l’exploitation des réseaux de concessions ferroviaires existantes et la construction de nouvelles extensions stratégiques. BAL opère désormais trois concessions ferroviaires en Afrique : Sitarail, Camrail et Benirail.