Chadi Bou Habib – Économiste principal à la Banque mondiale

« Il y a deux ans et demi quand j’ai commencé à travailler sur la République démocratique du Congo, je n’aurais jamais osé écrire ce que j’ai écrit dans ce rapport. Nous sommes dans une relation dynamique. C’est comme cela que le partenariat fonctionne ».

Économiste principal à la Banque mondiale à Washington aux États-Unis, il est en charge du Congo depuis 2013 et il s’y rend fréquemment. Chadi Bou Habib est l’un des rédacteurs du Rapport de suivi de la situation économique et financière du Congo. La récente publication de cette analyse qui s’adresse à un large public, continue de susciter des commentaires en sens divers. Pour en parler, la rédaction de Business et Finance est allée à la rencontre de « Monsieur Congo » à la Banque mondiale pour plus d’éclairage. Entretien.

Business et Finances : Dans quel esprit le dernier rapport de la Banque mondiale sur la situation économique et financière de la République démocratique du Congo a-t-il été rédigé ?  

Chadi Bou Habib : D’emblée, je dirai que ce a été rédigé de telle sorte que les analyses techniques soient accessibles à un large public, c’est-à-dire compréhensibles par tout le monde. Que ce rapport suscite des commentaires, nous ne pouvons que nous en réjouir parce que c’était le but recherché par l’équipe chargée de sa rédaction. En le publiant, nous voulions qu’il suscite non seulement un débat interne dans la société congolaise à travers toutes ses composantes, mais aussi entre les partenaires au développement et à la Banque mondiale. Nous avons abordé dans ce rapport des thèmes assez complexes, comme le développement, certes. Mais l’objectif était de montrer qu’il n’y a pas de recettes magiques.  Au contraire, c’est à travers un dialogue qui tient compte des spécificités de chaque pays que l’on peut faire des analyses solides. C’est ce que nous avons fait.

 

Quelle a été la réaction du gouvernement ?

Le fait que des membres du gouvernement, dont le ministre des Finances et son collègue du Plan, ainsi que des hauts fonctionnaires de l’administration aient rehaussé de leur présence la cérémonie de présentation du document est la preuve qu’il a été bien accueilli. Cela était également perceptible à travers les questions de clarification qui ont été posées. Bref, je peux dire que ce rapport a atteint son objectif. C’est-à-dire maintenir le dialogue entre le gouvernement et la Banque mondiale, entre le gouvernement et les partenaires, ainsi qu’au sein de la société congolaise.

Que répondez-vous à ceux qui vous reprochent d’avoir dit les choses de façon diplomatique, alors que l’état de la situation de l’économie du pays n’est pas reluisant ?

Disons que cette analyse est tout simplement claire. C’est indéniable que, sur le plan de la stabilité macroéconomique et sur celui de la croissance, les résultats sont éloquents. Mais le rapport insiste sur la résilience à long terme de l’économie qui demande à être renforcée. À notre avis, les progrès qui ont été réalisés doivent constituer le point de départ de l’étape suivante.

Laquelle ?

C’est celle du renforcement de la résilience de l’économie. Le secteur public devrait passer à la vitesse supérieure dans la gestion de l’économie et de la société en vue d’un développement durable.

Au vu du rapport, quelle note donneriez-vous à la République démocratique du Congo ?

Ce n’est nullement son but. Par contre, il s’agit de faire un diagnostic institutionnel sans complaisance des politiques menées par un pays. À notre niveau, nous avons constaté que la République démocratique du Congo a fait des progrès constants au cours des deux dernières années et qu’elle a marqué des points qui sont, si voulez, au-dessus de la moyenne dans la gestion du cadre macroéconomique. Encore une fois, nous attirons l’attention pour dire que ce n’est pas assez car il y a encore des vulnérabilités.

À propos des vulnérabilités, vous dites que la mobilisation des recettes nationales reste le principal défi à relever. Cette faiblesse constatée est-elle le fait de la corruption ou de la mauvaise gouvernance ?

Partons d’abord du constat qui montre qu’au cours des quatre dernières années, la République démocratique du Congo a exporté de plus en plus des matières premières de l’ordre de dix milliards de dollars par mois, voire plus. Cependant, au regard de la balance des paiements, elle est en train de rémunérer les investissements directs étrangers, actuellement à hauteur de trois milliards de dollars. Par ailleurs, les réserves en devises qui sont à peine de l’ordre de 1,5 milliard de dollars, sont en lente régression. Les recettes nationales arrivent à 13% du produit intérieur brut (PIB), soit en dessous de la moyenne des pays moins développés qui est de l’ordre de 15%. Elles sont également en dessous de la moyenne de l’Afrique subsaharienne, qui est autour de 20%. Comme on peut le constater, il y a un problème. Par ailleurs, la RDC occupe la 16e place en terme de potentiel de la rente due au secteur des ressources naturelles dans le PIB, mais elle est à la 104e position en terme de recettes totales au PIB. Ce paradoxe montre qu’il y a également un problème peut être imputable à plusieurs facteurs.

Quels sont ces facteurs ?

Je peux vous en citer trois. Premièrement, le code minier qui contient des dispositions généreuses en ce qui concerne l’amortissement accéléré. Cela était peut-être justifié par la situation du pays à l’époque où ce code a été élaboré. Mais, aujourd’hui, ce texte mérite d’être revu, surtout si l’on veut sortir de la logique de nivellement vers le bas en matière d’avantages fiscaux dans le but d’attirer les investisseurs. Par ailleurs, au regard des recommandations de la Conférence d’Addis-Abeba, les pays doivent compter plus sur leurs ressources domestiques pour financer le développement durable. Vu sous cette optique, il faudrait se demander quelles sont les ressources principales pour pouvoir les mobiliser davantage. Il y a des pays comme la Tanzanie, la Guinée et le Burkina Faso qui ont déjà pris une longueur d’avance dans cette voie, en revisitant leurs codes miniers. Dans tous les cas, quels que soient le code et les conventions miniers qu’on aura adoptés, il faudrait mettre en place une administration capable de bien les appliquer. Sinon, il n’y aura pas de meilleurs résultats. Naturellement, on ne demandera pas à l’administration de faire des miracles si elle n’a pas de moyens financiers et humains conséquents. Dans le cas de la République démocratique du Congo, on peut dire que cet équilibre est encore sous-optimal car il n’y a pas encore assez de recettes. Et puisque les moyens et les recettes sont insuffisants, l’administration ne pourrait fonctionner convenablement et serait dans l’incapacité d’appliquer les législations censées amener à plus de recettes.

Comment sortir de cette situation, selon vous ?

Il faut donner plus de moyens à l’administration pour avoir plus de recettes. Il faudra également mettre en place des institutions fortes et indépendantes afin de mieux gérer le secteur des ressources naturelles et d’atteindre les objectifs à long terme pour un développement durable du pays.

Pensez-vous que cela soit facile à réaliser ?

Évidemment, beaucoup de points d’interrogation subsistent. Concrètement, il y a beaucoup de travail à faire, notamment au niveau de la gouvernance de ce secteur.

Dans votre rapport, vous soulignez que la politique de stabilisation budgétaire a atteint ses limites. Quelles sont ces limites ?

Les faits montrent que la stabilisation budgétaire par la compression des dépenses a atteint ses limites. Tenez : avec 13% du PIB des dépenses et 13% du PIB des recettes, la marge de manœuvre pour dégager un espace budgétaire avec une meilleure gestion des dépenses est assez réduite. Mais nous disons qu’il y a moyen de faire la stabilisation budgétaire en mobilisant davantage les recettes. Autrement dit, en augmentant les recettes, on augmenterait en même temps les dépenses tout en gardant un budget équilibré. Par exemple, un budget autour de 18% des dépenses et 18% des recettes constituerait un changement important, surtout si le supplément des recettes est affecté aux infrastructures et aux secteurs sociaux de base. La stabilisation budgétaire à court terme ne peut pas aller de pair avec les objectifs du développement durable. Voilà le message que nous voulons faire .passer. S’il n’y a pas de moyens, comment voulez-vous que l’État mette en place des politiques de développement soutenable sur le long terme ? Le manque de moyens est potentiellement déconnecté du potentiel, mais comment mobiliser le potentiel ?

Quand vous rencontrez les officiels congolais, avez-vous l’impression qu’ils vous écoutent et prennent en considération ce que vous leur dites ?

Lorsque nous rencontrons les autorités du pays, c’est avant tout pour les écouter car nous avons plus à apprendre d’elles qu’elles de nous. Je vous rappelle que nos analyses et nos conseils techniques doivent rester contextuels. Voilà pourquoi nous avons plus à apprendre du contexte, à écouter avant de faire ces analyses. Il y a deux ans et demi quand j’ai commencé à travailler sur la RDC, je n’aurai jamais osé écrire ce que j’ai écrit dans ce rapport, pour la simple raison que je ne connaissais pas ce pays. Je ne me le serais pas permis. C’est pour dire que nous sommes dans une relation dynamique : nous écoutons, nous recueillons les réactions et nous les adaptons. Bref, nous réfléchissons ensemble et c’est comme cela que le partenariat fonctionne.

Dans l’opinion publique, d’aucuns se demandent bien quel est finalement l’impact de vos analyses sur la gestion de l’économie nationale.

Notre rôle est d’observer ce qui se passe sur le terrain. Vous conviendrez avec moi que s’il n’y avait pas la stabilisation macroéconomique, on serait encore à parler de la dépréciation de la monnaie, de l’inflation  galopante… Nous ne négligeons pas ce qui a été fait, mais nous disons qu’il ne faut pas dormir sur ses lauriers.

Quels sont les autres secteurs, en dehors de l’agriculture et des services, qui peuvent tirer vers le haut l’économie nationale dans l’optique de sa diversification que vous préconisez ?

Nous avons abordé la question de la diversification sous l’angle de la résilience à long terme parce que la concentration géographique ou la concentration des marchés par client et la concentration par produit augmentent la vulnérabilité de l’économie. Dans notre rapport, nous avons d’abord analysé les vulnérabilités que pourrait susciter la faible mobilisation des recettes qui ne laisse pas assez de marge d’action budgétaire. Par conséquent, la stabilisation budgétaire par la compression des dépenses a atteint ses limites. Cette vulnérabilité influe sur les réserves en devises. En effet, moins de recettes dans le secteur des ressources naturelles équivaut à moins de devises pour l’État, donc moins de réserves. C’est pourquoi nous avons dit que la stabilisation budgétaire ne doit plus se faire en comptant seulement sur les dépenses, mais en augmentant les recettes. La stabilisation permet d’augmenter les dépenses, surtout pour le développement, tout en maintenant l’équilibre budgétaire. Cependant, à côté de la politique budgétaire, il y a la politique monétaire qui subit actuellement la pression d’une forte dollarisation. Certes, elle fut une réponse du système à la période d’hyperinflation et de la dépréciation monétaire, mais dans le cadre de la stabilisation macroéconomique, la dollarisation est en train de réduire la marge de manœuvre de la politique monétaire. Moins de dollarisation signifie plus de marge de manœuvre, c’est-à-dire un outil supplémentaire de politique monétaire pour assurer la stabilité macroéconomique et la résilience de manière à éliminer les vulnérabilités et de ne plus compter que sur le budget. Sur le plus long terme et sur le plan structurel, l’une des sources de vulnérabilités, c’est la concentration géographique et la concentration par produit. D’où il faut diversifier l’activité économique.

Mais comment diversifier ? 

J’entends souvent que le potentiel agricole de la République démocratique du Congo énorme, qu’il faut favoriser ce secteur en le diversifiant. La Banque mondiale a des projets en République démocratique du Congo concernant l’agriculture, notamment des projets de création de pôles de croissance. Mais il faut avouer que ces initiatives ont aussi des limites. Par exemple, on ne peut pas parler de développement marchand du secteur agricole, si le marché intérieur n’est pas connecté. Prenons le cas de l’infrastructure routière qui est insuffisante. Même s’il existe des projets en cours d’exécution, il reste beaucoup à faire. On estime à quatre mille kilomètres le total des routes asphaltées en RDC, un pays qui a la taille de l’Europe de l’Ouest. C’est vraiment insignifiant ! Les capitales provinciales ne sont pas reliées entre elles, ni même reliées à Kinshasa, la capitale du pays. À 30 km d’une capitale provinciale, on trouve des communes rurales complètement enclavées. Comment alors parler de développement d’une agriculture marchande au-delà de l’agriculture autarcique, si le marché intérieur n’est pas connecté ? Comment parler d’une agriculture marchande si la possibilité de stockage des produits est limitée du fait du manque de transport pour leur évacuation ? Par ailleurs, on ne peut pas parler de stockage des produits périssables sans penser à l’électricité.  Dans notre rapport, nous démontrons que la concentration comporte des risques à long terme, tout comme la diversification qui demeure un processus de long terme, car il faut des infrastructures sans lesquelles il est difficile de diversifier.

La diversification suppose, forcément, des investissements…

Il y a des préalables à la diversification, notamment un minimum d’infrastructures et un minimum de qualifications. Je vous donne un exemple concret : j’ai fait imprimer ce rapport à Kinshasa où je travaille avec deux imprimeurs. Les techniciens supérieurs dans les deux imprimeries sont des Belges, des Français ou des Indiens. C’est un cas qui montre à suffisance qu’il y a non seulement un problème de diversification sectorielle ou géographique, mais aussi nécessité de diversifier à l’intérieur même des secteurs, notamment en allongeant la chaîne de valeur. Là aussi, le problème d’infrastructures nous rattrape. Sur les mines, par exemple, le Congo devrait déjà exporter des produits semi-finis, mais faute d’infrastructures, d’énergie et de qualifications, il en est encore à exporter des matières premières brutes. Nous  disons qu’il y a une autre forme de diversification, celle des acteurs. C’est une approche innovante que nous avons présentée.

En quoi cette approche est-elle innovante pour la République démocratique du Congo ?

La plupart des recherches attestent que le Congo est un pays exceptionnel sur le plan géologique. Le potentiel minier et les caractéristiques des filons offrent un degré d’accessibilité supérieur à la moyenne dans beaucoup de cas. C’est un grand avantage pour l’exploitation minière artisanale ou celle utilisant un matériel léger parce qu’elle permet d’employer une main-d’œuvre locale avec un minimum de qualification. Il y a déjà un savoir-faire dans le pays et cette activité emploie une main-d’œuvre nombreuse alors que les entreprises industrielles misent sur le capital physique parce qu’il s’agit d’investissement lourd en équipement et n’emploient que peu de gens. On estime déjà à 4% la tranche des 15-64 ans qui travaillent dans le secteur minier, avec une très grande majorité dans l’artisanat et la petite mine. Les revenus générés par cette activité sont utilisés sur place. Si l’exploitation minière artisanale est bien formalisée, l’État et les provinces pourront aussi en tirer des recettes fiscales. Nous avons également observé que lorsque le prix d’un minerai chute, l’exploitant artisanal retourne à l’agriculture ou, le plus souvent, se déplace vers un autre minerai. Il a cette flexibilité que l’industriel n’a pas, et qui, par définition, a fait un investissement lourd difficile à déplacer. La multiplicité des petits et moyens acteurs pourrait constituer, quelque part, le fonds d’action microéconomique et une résilience macroéconomique. Le choc des prix ne sera pas géré par un seul gros acteur touché, mais par une multitude d’acteurs ayant chacun sa capacité d’adaptation et plus de flexibilité pour passer d’un minerai à un autre. Le potentiel existe dans ce pays pour parler de diversification des acteurs. L’exploitation minière artisanale est une activité qui existe déjà, mais qui demande à être accompagnée, formalisée et encadrée pour minimiser ses externalités négatives et maximiser ses résultats positifs. Dans le rapport de suivi précédent, nous avions abordé la question des externalités. Il y a beaucoup de points qui montrent la nécessité de formaliser et d’encadrer ce secteur. Si la petite mine se développe à côte d’une grande mine, cela ne peut qu’être bénéfique pour le pays.

Quand vous dites dans votre rapport qu’il faut une politique monétaire efficace, sous-entendez-vous que la Banque centrale du Congo n’est pas indépendante ?

Les textes prévoient l’indépendance de la Banque centrale, mais dans les faits, qu’est-ce qui se passe ? Si la Banque centrale n’a pas un capital suffisant, il faudra penser à sa recapitalisation pour qu’elle ait les moyens de son indépendance. La mise en place d’une politique monétaire requiert des outils comme le certificat de dépôt, les bons de la Banque centrale… Ces instruments de politique monétaire ont un coût que la Banque centrale ne peut supporter seule parce qu’elle est sous-capitalisée.

Dans ce cas, comment renouer avec une politique monétaire efficace ?

Il faudrait d’abord augmenter le capital de la Banque centrale du Congo, puis développer petit à petit un marché de titres, qui serait l’espace où elle pourrait les utiliser afin de gérer le marché monétaire et mettre en place sa politique monétaire.

Quel est l’état actuel de la coopération entre la Banque mondiale et le Congo ?

La coopération est au beau fixe comme le témoigne le portefeuille des projets que nous avons : environ 1,5 milliard de dollars. Vues sous l’angle de mon travail, je vous dirai que les relations sont très bonnes parce que nous avons un dialogue permanent.

Votre optimisme signifie-t-il que ce que fait la Banque mondiale au Congo a des effets sur le quotidien des Congolais ?

On ne peut pas travailler dans le développement en étant pessimiste. J’ai foi en l’avenir parce que travailler dans ce domaine, c’est avoir de la patience. C’est un travail de longue haleine. Et pour cela il faut avoir de l’espoir. Nous ne demandons pas au gouvernement d’appliquer ce qui ressort de nos analyses. Nous nous situons dans une approche dynamique de dialogue. Nous sommes à l’écoute et nous apprenons aussi beaucoup. La logique des recettes ne marche pas parce que ce qui est valable pour le Congo ne l’est pas forcément pour un autre pays. L’exploitation minière artisanale est bien pertinente pour le Congo, mais elle ne l’est pas pour d’autres pays où les filons ne sont accessibles qu’à travers l’investissement lourd ou industriel. C’est dire que cette approche est très contextuelle ; elle n’est même pas prise en compte au sein de la Banque mondiale. L’idée la plus répandue dans le monde est que l’exploitation minière implique un investissement lourd, synonyme de peu d’emplois.

Si un investisseur étranger lit votre rapport, pensez-vous qu’il soit motivé pour venir au Congo ?

On m’a souvent posé cette question. Mais on pourrait la poser autrement : qu’est-ce qui empêche le Congolais d’investir dans son pays, préférant placer son argent ailleurs ?

Que le gouverneur de la Banque centrale du Congo lance un appel public aux investisseurs nationaux de tout gabarit, n’y a-t-il pas un problème ?

Quand nous faisons la promotion des petites et moyennes entreprises dans le secteur minier, nous sommes en train d’ouvrir un champ d’investissements et d’activités pour les Congolais ayant la volonté et un capital qui n’est pas extraordinaire. La formalisation de l’exploitation minière artisanale pourrait servir de modèle pour le développement des petites et moyennes entreprises dans les autres secteurs. Nous considérons le secteur minier comme un levier, que ce soit au niveau des recettes pour l’État, afin de lui permettre de réaliser des projets sociaux et d’infrastructures qui vont mettre le Congo sur la voie de la diversification économique et du développement sur le long terme. Ou que ce soit au niveau de la petite et moyenne exploitation qui va générer des revenus pour les Congolais, pour les communes et les collectivités locales. Elle va permettre l’accumulation du capital et la stimulation de l’activité économique sur le plan local. Bref, il y aura des retombées pour les gens qui sont sur place.

Quelle est la philosophie qui sous-tend la publication du Rapport de suivi de l’économie congolaise ?

Le rapport de suivi est une série. Chaque édition est bâtie sur la précédente. Je suis conscient qu’il y a beaucoup de défis à relever. Ce qui a été réalisé au cours de ces quatre dernières années nous permet de regarder vers l’avant. Nous bâtissons sur les acquis.

Que pensez-vous du climat des affaires au Congo ?

On ne peut pas regarder le climat des affaires comme une sorte de bulle indépendante. On l’a vu dans certains pays où on essayait d’avoir une excellente bulle pour les milieux d’affaires. Dans un pays comme le Congo avec ses défis sociaux, cela ne peut pas marcher. N’oubliez pas que nous sommes dans un pays où l’espérance de vie est de 50 ans, où la mortalité infantile est l’une des plus élevées au monde. On ne peut pas mettre tout cela de côté en se disant : créons une bulle pour les affaires. Les défis auxquels est confronté le monde des affaires ne sont pas différents de ceux auxquels font face les Congolais dans leur vécu quotidien. Par exemple, le manque d’électricité n’affecte pas seulement les entreprises, mais il a un impact réel sur les ménages. On peut citer également l’eau, les infrastructures routières, les qualifications, les tracasseries administratives, la corruption… Traiter globalement ces problèmes pour la société, c’est apporter également une réponse aux défis du monde des affaires. C’est comme cela que je vois les choses dans l’optique d’un développement durable.