Choc frontal entre SOCOF et la SCPT sur le projet CAB 5

Un projet de révision de la loi de 2002 sur les télécoms a été déposé à l’Assemblée nationale. Il vise à démonopoliser le secteur public, pour faire de SOCOF second opérateur public. Dans la pratique, les choses ne seront pas si simples comme on le pense. 

 

La guerre des réseaux à fibre optique va éclater à moyen terme en RDC et dans les pays limitrophes. Alors que la Société congolaise des postes et télécommunications (SCPT) projette d’étendre ses tentacules à Brazzaville, la tout nouvelle Société congolaise de fibre optique (SOCOF) nourrit aussi la même ambition. Créée comme une agence gouvernementale d’exécution du projet Central African Backbone (Projet CAB5), la SOCOF entreprend, à court terme, les travaux de construction du réseau à fibre optique de Kinshasa à Muanda dans le Kongo-Central, où se trouve la station d’atterrage du câble sous-marin WACS, en empruntant la voie du chemin de fer Kinshasa-Matadi, puis en suivant la route de Matadi à Muanda. Soit un tracé ferroviaire de 386 km et un tracé routier de 234 km.

Mais quid de la fibre posée du temps du ministre des PT&NTIC, Tryphon Kin-kiey Mulumba ? « C’est du n’importe quoi », avait lâché un député MP. Début avril, le DG ai de la SCPT, Patrick Umba, a reconnu que la capacité de transmission de la fibre n’était que de 10 gigabits. Et qu’il s’employait à la porter à 100 gigabits en vue de l’interconnexion avec Brazzaville fin avril.   Mais avec quels moyens ?

La Banque mondiale préfère SOCOF

En tout cas, l’interconnexion avec Brazzaville fait partie du projet CAB5 confié à la SOCOF. Elle est appuyée par un financement déjà bouclé de la Banque mondiale de 59,8 millions de DTS, soit 92 millions de dollars. Le plan global du réseau CAB5 repose, en pratique, sur trois pôles. Le pôle ouest couvre l’axe 1, Kinshasa-Muanda en redondance à la SCPT jusqu’à Muanda avec une interconnexion avec le Congo-Brazzaville et l’Angola. Le pôle est porte sur l’axe 4, faisant une liaison entre Kalemie-Bukavu et Béni en suivant les  nationales n°2 et n°5 pour aboutir à une interconnexion avec le Rwanda, le Burundi et l’Ouganda sur quelque 990 km. Le pôle sud s’étend sur l’axe 6 qui part de la liaison devant être établie entre Lubumbashi, Bukama et Kalemie, d’abord le long du chemin de fer jusqu’à Bukama, ensuite en longeant la nationale n°33 pour réaliser une interconnexion avec la Zambie et l’Angola sur 1 026 km.

Jusqu’à la mise en place de la SOCOF fin 2016, le COPIREP a servi d’agence d’exécution au projet CAB5. Pendant cette période, l’Association internationale de développement (IDA), filiale du Groupe de la Banque mondiale, a financé l’exécution du projet CAB5. L’accord de don a été conclu en juillet 2014 avec le gouvernement. En septembre 2016, Hubert Mamba Mabudi, investi directeur général par le conseil d’administration de la SOCOF, a pris les commandes du projet CAB5. Qui est, en pratique, la cinquième phase du projet Central African Backbone (CAB) en vue de l’interconnexion sous-régionale des 11 pays d’Afrique centrale. Le projet CAB a été progressivement mis en œuvre: CAB1 en 2009 (Cameroun, République Centrafricaine, Tchad), CAB2 en 2011 (Sao Tomé et Principe), CAB3 en 2011 (République du Congo), CAB4 en 2012 (Gabon) et CAB5 en 2014 (République démocratique du Congo).

Fluidité de l’Internet

Le projet CAB5 entre dans le cadre d’appui au déploiement des liens manquants dans le réseau national de la fibre optique afin de connecter les pôles économiques les plus peuplés de Kinshasa (Ouest), Goma (Est) et Lubumbashi (Sud). En reliant les trois pôles économiques, ce réseau fournira aux opérateurs de télécommunications l’opportunité d’offrir des services à travers le pays. Le projet permettra également l’interconnexion avec les pays frontaliers que sont l’Angola, la Zambie, la Tanzanie, le Burundi, le Rwanda, l’Ouganda, la Centrafrique, le Congo-Brazzaville et le Soudan du Sud. Le projet apporte  plusieurs avantages, notamment une meilleure fluidité dans les communications, la transmission des messages par téléphone, l’internet, la radio et la télévision. Il ouvre également de bonnes perspectives fiscales et économiques, indique-t-on au COPIREP. « L’objectif du développement du projet CAB5 est d’aider à accroître la portée géographique ainsi que l’usage des infrastructures régionales haut débit et pour réduire le prix des services et améliorer l’accès aux technologies de l’information et de la communication. Ce Projet a pour rôle de permettre à un public plus large d’accéder à la fibre optique », commente un expert du COPIREP.

Le projet CAB 5 vient en appui au plan global du Backbone national de la RDC. Il s’étale sur une durée de 5 ans, soit jusqu’en 2019. Dans le financement de ce projet, il est également prévu que les opérateurs privés fournissent un investissement au coût du réseau pour couvrir l’équipement actif. Le projet sera mis en œuvre à travers un partenariat public-privé suivant le principe d’« open access ». Il se décline en 3 composantes : l’appui au ministère des Postes, Télécommunications, Nouvelles Technologies de l’information et de la communication (MPTNTIC) pour une émergence numérique (13,2 millions de dollars), l’appui au ministère du Portefeuille pour la construction, la gestion et la commercialisation de l’infrastructure CAB5 par le PPP (71,6 millions de dollars) et l’appui à l’Autorité de régulation des postes et télécommunications (ARPTC) pour améliorer l’efficacité réglementaire (7,3 millions de dollars). La première composante consiste à renforcer les capacités du ministère, en particulier dans la gestion du nom de domaine .cd, à la gestion des e-Déchets (le processus de recyclage de l’équipement électronique), l’intranet du gouvernement ainsi que la réhabilitation de la liaison Kinshasa-Muanda de la SCPT.

Cyber-sécurité 

La seconde composante qui porte sur la construction, la gestion et la commercialisation de l’infrastructure CAB5 par le PPP vise la construction du réseau de fibre optique CAB5, l’installation des 3 Datacenter, l’installation des points d’échange régionaux (Kinshasa, Lubumbashi et Goma) ainsi que le coût d’exploitation de la SPN pendant les deux premières années. Enfin, la composante inhérente à l’ARPTC concerne le renforcement des capacités et l’acquisition des matériels pour la gestion des fréquences transfrontalières et celui des capacités et acquisition des équipements du Réseau et de la Cyber-sécurité, l’assistance à la mise en œuvre du cadre de régulation du marché des gros ainsi que l’acquisition du nouveau système d’information de l’ARPTC.

En mars 2017, la SOCOF a clos la réception des candidatures des cabinets ou des bureaux d’études capables d’assurer la surveillance technique des travaux de construction du réseau à fibre optique entre Kinshasa et Muanda. Le 12 juin prochain, la SOCOF devra se décider sur les entreprises partenaires qui