Coupe drastique dans le budget de 8 % à 2,6 % en 2018

Développer des filières et créer des chaînes de valeurs, des parcs agro-industriels et des emplois dans le milieu rural et périurbain à l’horizon 2018-2020, tel est l’objectif gouvernemental.

Ambitions démesurées? Des experts du secteur qui se sont exercés à l’analyse critique du budget 2018 organisée fin décembre 2017 par la mouvance de la société civile, sont d’avis que le gouvernement n’a ni les moyens financiers ni techniques ou encore technologiques de ses ambitions en un temps record. Le projet de loi de finances 2018 prévoit un budget de l’ordre de 263 023 404 998 francs pour l’agriculture  contre 845 515 036 037 en 2017. Il se dégage ainsiune réduction de 69 % en 2018.

La part de l’agriculture dans le budget général est donc passée de 8,36 % en 2017 à 2,6 % en 2018. Pourtant le protocole de Maputo (2003) qui demande aux États signataires d’allouer au moins 10 % du budget national au secteur de l’agriculture. Pour un secteur considéré comme prioritaire, suivant la Programmation budgétaire des actions du gouvernement (PBAG) 2018-2020, le taux d’exécution des dépenses liées au secteur de l’agriculture en 2017 a été très faible, soit 4 % et 0 % pour l’élevage et pèche.

Investissements agricoles

Les prévisions des investissements, soit 93 millions de dollars pour 2018, ne représentent que 9 % de la tranche 2018 des besoins du Programme national d’investissement agricole qui est de l’ordre de 1 040 millions  de dollars. Par ailleurs, la grande part du budget 2018 de l’agriculture est essentiellement financée sur base des ressources extérieures (61,9 %) tandis que la participation de l’État est de 39,1 %, soit 8 170 700 727 francs. Pourtant, lors des conférences budgétaires, les besoins réels exprimés par le ministère de l’Agriculture étaient de 26 478 100 466 francs.

En tout état de cause, la politique agricole du gouvernement repose sur la nécessité d’atteindre la sécurité alimentaire et nutritionnelle, et l’expansion du marché agro-alimentaire afin d’endiguer l’exode rural. Les stratégies du gouvernement pour parvenir à ses fins se fondent notamment sur l’investissement dans la recherche, la vulgarisation et l’enseignement agricole, la mise en place des mesures d’accompagnement pour la mise en œuvre du Plan national d’investissement agricole (PNIA) ainsi que la poursuite des projets de réhabilitation et de modernisation des routes de desserte agricole.

Cependant, la loi de finances n’a aligné que 1 914 000 000 francs dans le domaine d’achat de semences et rien par rapport à la préservation de la diversité génétique des semences et autres. Le taux d’affectation des crédits aux provinces et aux entités territoriales décentralisées (ETD) et aux investissements est si faible qu’il ne traduit pas le caractère prétendu pro pauvre du budget 2018.

Et au lieu de 98 100 000 dollars attendus, le PNIA ne peut espérer que 11 566 943 dollar, soit 11,7 % de l’enveloppe escomptée, font comprendre les experts. Le réajustement opéré par la commission ECOFIN de l’Assemblée nationale s’est finalement avéré un simple coup de houe dans le vent.

Pourtant des crédits supplémentaires de l’ordre de 1 268 392 850 francs ont été affectés au secteur de l’après-réajustement interne des crédits. Ce qui fait que les crédits accordés sont passés de 4 861 987 816 francs à 6 630 380 666, soit un accroissement de 26 % à la rubrique « Interventions économiques, sociales, culturelles et scientifiques dans le secteur l’agriculture ». Ce crédit accordé fait passer le budget du secteur de l’agriculture de 263 023 404 998 francs à 264 291 797 848. Malgré cet accroissement, indiquent des experts de la société civile, le niveau du budget du secteur de l’agriculture, pêche et élevage reste inchangé par rapport au budget général qui a connu également une augmentation de 10 313 285 661 200 francs à 10 353 133 693 749.

Le projet de loi de finances n’appuie les jeunes qu’à concurrence de 0,24 % sur le total du budget du secteur. Dans l’ensemble, aucun crédit n’est prévu pour l’encadrement des femmes, des peuples autochtones et des vulnérables. Le gouvernement compte poursuivre la politique d’extension des parcs agro-industriels à travers d’autres provinces sous forme de partenariat public-privé (PPP), dont les études de faisabilité sont déjà réalisées. Celui de Bukanga-Lonzo, il sied de le rappeler, a coûté plus de 80 millions de dollars mais il s‘est avéré un éléphant blanc.

Pour la société civile, l’expérience de parc-agro industriel n’a pas convaincu, ainsi l’appui et l’organisation de la population vivant en milieu rural et dont près de 60 % est paysanne permet de faire de la RDC un pays à revenu intermédiaire. Le budget 2018 n’a pas, hélas, prévu des crédits pour le désenclavement des zones à forte production, font comprendre les experts de la société civile. Il ne permet pas ainsi de réaliser l’objectif du gouvernement qui est celui d’atteindre la sécurité alimentaire et nutritionnelle, et de promouvoir l’expansion du marché agro-alimentaire afin d’endiguer l’exode rural.