Dans un contexte complexe, les investisseurs doivent faire preuve de sélectivité aiguë

Les marchés étaient dans le zig, les voilà dans le zag. Les investisseurs ont semblé, la semaine dernière, privilégier de nouveau les signes positifs d’une reprise de l’économie, plutôt que les incertitudes sur l’accélération de l’épidémie. La vérité n’est donc pas dans l’excès, quel que soit le scénario.

SI les marchés avaient surréagi dans la phase de baisse, ils ont connu sans doute, la semaine dernière, une poussée d’euphorie exagérée dans le mouvement de reprise, allant jusqu’à battre de nouveaux records pour le Nasdaq100. Sur les places financières mondiales, le balancier fonctionne à merveille. Selon des analystes, ces excès de jugements créent des trajectoires volatiles et très brusques et la vérité se trouve certainement au milieu. Les indices ont donc tenté de trouver un équilibre entre les espoirs de reprise en V ou de manière moins affirmée, en racine carrée, et les craintes sanitaires persistantes. Dans cet environnement complexe, les investisseurs doivent donc faire preuve d’une sélectivité aiguë afin de se positionner sur les valeurs gagnantes, quel que soit le scénario.

Rebond historique

Malgré un retour des craintes sanitaires aux États-Unis et en Chine, la semaine du 15 au 21 juin aura été bénéfique pour les places financières, celles-ci ayant profité des nouvelles mesures de soutien annoncées par la Fed pour reprendre de la hauteur. La nouvelle accélération des cours du pétrole constitue un autre facteur de soutien.

Tous les indices ont récupéré une partie des pertes de la semaine du 8 au 14 juin. En Asie, le Shanghai Composite a regagné 1.6 %, le Hang Seng 1.3 % et le Nikkei 0.8 %. Aux États-Unis, le Dow Jones a enregistré une performance hebdomadaire de 2.5 %, le S&P500 a grimpé de 3.1 % et le Nasdaq100 a performé de 4.5 %, évoluant sur ses plus hauts historiques. Les Bourses européennes ont fini en hausse vendredi 19 juin, la confiance dans la reprise économique et une nouvelle encourageante sur le commerce sino-américain ravivant l’appétit pour les actifs risqués malgré les craintes sur l’évolution de l’épidémie de coronavirus. Sur la semaine, le CAC parisien a affiché un gain de 2,9 % et le Stoxx 600 de 3,2 %.

Au moment de la clôture européenne, les trois indices de Wall Street étaient également en hausse avec un Nasdaq Composite au-dessus des 10 000 points, proche de son plus haut historique. Au lendemain d’une séance marquée par la prudence, les investisseurs ont privilégié de nouveau les signes positifs d’une reprise de l’économie, avec notamment le rebond historique de 12 % des ventes au détail britanniques, plutôt que les incertitudes sur l’accélération de l’épidémie, notamment aux États-Unis et en Chine.

Marché obligataire

Une information Bloomberg prêtant à Pékin l’intention d’accélérer ses achats de produits agricoles américains pour se conformer à l’accord commercial avec Washington a également soutenu l’appétit retrouvé pour le risque. Mais les relations entre les deux premières puissances économiques mondiales restent difficiles à interpréter, Donald Trump, le président des États-Unis, ayant annoncé jeudi 18 juin qu’il n’excluait pas de rompre les liens avec la Chine.

Parmi les plus importantes hausses sectorielles, les compartiments défensifs de l’alimentation et des boissons, de la pharmacie et des services aux collectivités ont gagné entre 1,2 % et 1,4 %. 

Face à une nouvelle série de chiffres anémiques du marché du travail américain, de nombreux investisseurs se sont dirigés jeudi 18 juin vers le refuge des titres d’État. Le baromètre du marché obligataire a vu le rendement du Bund repartir à la baisse à -0.41 %, juste derrière la référence suisse qui conserve sa base de rémunération à -0.47 %. De son côté, le même parcours se dessine pour l’OAT française, qui a quitté symboliquement le territoire positif à -0.07 %. 

La baisse des rendements se vérifie sur l’ensemble des nations. La surprise provient une fois de plus de la Grèce qui a vu son taux à 10 ans baisser à 1.26 %, sous le taux italien à 1.37 %. Les écarts de taux sont traditionnellement très corrélés avec les notations des pays, sauf dans le cas de l’Italie qui semble être sur des niveaux qui correspondent à une notation de BB- alors que sa note officielle est de BBB. Outre-Atlantique, le Tbond s’est traité sur les 0.71 %. Si l’économie américaine devait se redresser davantage d’ici le quatrième trimestre, la campagne électorale présidentielle pourrait provoquer des incertitudes sur le marché obligataire avec un risque de se rapprocher des 1 %.

Marché des changes. La faiblesse de la livre sterling s’est affichée de manière notoire face à toutes ses contreparties la semaine dernière. Cette dégradation fait suite à la nouvelle intervention de la Banque d’Angleterre (injections de liquidités). La parité USD/GBP s’est traitée sur une base de 1.24 USD (-300 points de base depuis deux semaines). L’EUR/GBP s’est positionnée également dans un schéma haussier et a déclenché une nouvelle accélération graphique au-delà des 0.90 GBP. 

L’euro a perdu 0,12 % à 1,1189 dollar à l’issue d’un Conseil européen sans résultat concret. Après avoir brièvement profité de la hausse plus forte qu’attendu des ventes au détail britanniques, la livre sterling est repartie à la baisse en raison de la hausse historique de l’emprunt public et de l’envolée de la dette du Royaume-Uni à 1 950 milliards de livres en mai dernier, soit plus de 100 % du produit intérieur brut (PIB) du pays pour la première fois depuis 1963. La livre a cédé 0,47 %, contre le dollar et est tombée en séance à un creux d’environ trois mois contre l’euro. Le dollar est en hausse face à un panier de devises de référence (+0,17 %), à un pic de deux semaines.

Valeurs refuges

Les valeurs refuges délaissées depuis les espoirs de reprise en V, avec la réouverture des économies, redeviennent dominantes dans les positions longues des cambistes, avec les risques d’une deuxième vague sanitaire en Chine. Le yen a maintenu son hégémonie face au billet vert à 107 JPY et le franc suisse s’est échangé sur une zone de prix plus revisitée depuis le creux de la crise à 0.945 CHF (-150 pbs). 

La BNS a renouvelé son engagement en faveur d’une politique monétaire ultra-expansive, affirmant que ses mesures non conventionnelles aideront la Suisse à faire face à sa récession la plus grave depuis des décennies. L’euro peine à confirmer son démarrage haussier face au dollar et est revenu sur la zone des 1.1210 USD au contact de sa moyenne haussière à 20 jours. La parution de bonnes statistiques américaines a érodé la monnaie unique. Du coté des monnaies émergentes, le peso argentin connaît des heures difficiles, la devise de Buenos Aires s’est affaibli graduellement contre le billet. Le gouvernement a fait défaut le mois dernier sur la dette extérieure du pays. Peu de statistiques étaient au programme en Europe, mais elles ont globalement dépassé les attentes, à l’image de l’indice Zew allemand ressorti à 63.4, contre 51 le mois dernier. En zone euro, l’indice CPI est ressorti comme attendu à +0.1 % et la balance courante à 14.4B. Aux États-Unis, les ventes au détail ont bondi de 17.7 %, la production industrielle progresse de seulement 1.4 % (consensus 3 %) mais elle affichait une chute de 12.5 % en mai. Les autres bonnes surprises concernant les indicateurs avancés qui repassent pour la première fois dans le vert en 3 mois (+2.8 %) et l’indice Phillyfed qui a progressé à 27.5 (consensus -23).