Députés et sénateurs anticipent, redoutant l’incertitude du lendemain

La rentrée parlementaire est pour ce 15 mars 2018, sauf imprévu. Mais nul n’est dupe, leurs honorables n’ont le cœur à l’ouvrage que pour leurs propres comptes.

 

Il se compterait du bout des doigts, s’il y en a encore, ces députés et sénateurs qui  voudraient attendre la fin de la mandature pour percevoir leurs indemnités de sortie. Alors que des voix s’élèvent au sein de l’élite et surtout dans la classe politique pour décrier cette pratique qui consiste à payer par anticipation les indemnités de sortie, l’Assemblée nationale et le Sénat n’en ont cure. Mieux vaut prévenir que guérir, fait comprendre, off the record, cet élu de Kinshasa. « On ne sait pas de quoi sera fait demain ».

Michel Somwe VS Pierre Kangudia 

Il y a peu, le propre directeur de cabinet du Premier Ministre, Bruno Tshibala Nzhenzhe, Michel Somwe, professeur d’économie, a donné une méthode qu’il a estimée de plus rationnelle pour la paie des indemnités de sortie. En clair, nul ne peut être servi plus d’une fois quelle qu’en soit la motivation et nul peut  percevoir ses indemnités de sortie alors qu’il preste encore.  Faux, a objecté le ministre du Budget,  Pierre Kangudia.  Pourtant certains experts ont déconseillé à l’Etat de décaisser  d’importantes masses d’argent pour anticiper  une opération qui ne concourt pas à la solidification des finances publiques même à moyen terme. Voilà qui revient à débattre sur le sexe des anges. En tout cas, le Sénat avait sollicité plus de 113 milliards de FC pour la paie des émoluments des sénateurs ainsi que l’indemnité de sortie du personnel des cabinets du Sénat au cours de l’exercice 2018. Mais les crédits accordés dans le budget sont de l’ordre de 27.8 milliards de FC. En 2016, la Chambre haute dirigée par Léon Kengo avait déjà obtenu une enveloppe de 19 milliards de FC pour entre autres la prise en compte des indemnités de sortie du personnel d’appoint du Sénat. En 2017, le Sénat a obtenu du Trésor public près de 5 milliards de FC pour la même opération au premier trimestre, puis plus de 27 milliards de FC pour le reste de l’année.

Quant à l’Assemblée nationale, la prise en compte des indemnités des sorties des députés  dans le budget des rémunérations l’avait à 55 milliards de FC en 2016, puis à plus de 100 milliards de FC en 2017.

Émoluments

À propos, il sied, en effet, de rappeler que dans l’exposé général du projet de loi de finances de l’exercice 2017, le gouvernement dit avoir porté l’enveloppe des rémunérations à 2 160,4 milliards de FC – soit 9,0 % d’accroissement par rapport aux prévisions de 2016 situées à 1 981,6milliards de FC- pour  « la  prise en charge des actions suivantes:  la poursuite de la politique de rationalisation des rémunérations des agents et fonctionnaires du régime général ainsi que (…) l’impact des indemnités de sortie des députés et sénateurs ainsi que des membres du gouvernement et de leurs cabinets ».

Commentaire d’un économiste, et si les indemnités de sortie étaient gelées et cet argent servir à relancer  peut-être une industrie, la sidérurgie de Maluku par exemple. L’opération de paie des indemnités de sortie devra encore se poursuivre  avec une vitesse de croisière dès la prochaine rentrée à la chambre basse du Parlement. Hors mandat,  des députés  s’accrochent cependant  à leurs sièges, se fondant sur les prescrits constitutionnels selon lesquels ils ne quitteraient la Chambre basse qu’à la suite de son renouvellement au terme des élections législatives.

Selon les projections de la Commission électorale nationale  indépendante (CENI), le renouvellement de la Chambre basse viendrait, sauf imprévu, en février 2019. Dans l’entre-temps, les députés toucheront régulièrement leurs émoluments, quelque 11 milliards de FC par mois, selon Jeune Afrique. Alors qu’ils auront déjà empoché leurs indemnités de sortie. Et que d’anecdotes, à  ce sujet, apprend-on dans les couloirs de la Chambre basse ! Suppléant, fils de son père qui n’a plus voulu retourner à l’hémicycle, après avoir été ministre, ce jeune député a été estomaqué, quasi groggy, d’apprendre que «papa» avait tout vidé, émoluments et indemnités de sortie, le contraignant à rapiner les subsides de son assistant.