Face à la défaillance de l’État, Promundo et LPI expérimentent une approche qui porte déjà des fruits

Aborder le phénomène « Kuluna » ou de violence urbaine à partir de ses racines, c’est possible… C’est l’approche que les deux associations veulent bien vulgariser en RDC.

 

PROMUNDO-US et Living Peace Institute (LPI) ont récemment publié les résultats de leur enquête sur le phénomène « Kuluna » ou de délinquance urbaine dans la ville de Kinshasa. Selon cette étude « le Kuluna est un phénomène social lié à l’identité masculine », c’est-à-dire « les jeunes hommes utilisent leur masculinité d’une manière dominante/l’obsession du pouvoir en tant qu’homme selon les attentes et constructions sociales, l’environnement kinois amplifient ce phénomène et les programmes et politiques existants ne soutiennent pas l’arrêt de l’adhésion des jeunes vers les groupes des gangs ». 

L’enquête révèle également que « le phénomène Kuluna a atteint une ampleur inquiétante, au point où il a été une priorité sécuritaire à Kinshasa au niveau du gouvernement en 2012 et des gros moyens ont été déployés pour essayer de le combattre ». 

Les formations dans les Clubs

On notera que l’ambassade de Suède a financé un projet développé par Promundo et LPI dans le cadre de la prévention et comme réponse à ce phénomène. Ce projet est exécuté sur le terrain dans les centres de jeunes et dans les écoles avec l’appui de REEJER, CONEPT et AED en phase pilote dans trois communes : Kintambo, Makala et Bumbu. 

Prévenir et réagir contre la violence urbaine perpétrée par les gangs de rue, tel est le but principal du projet « Club des jeunes contre la violence à Kinshasa ». Pour une durée de quatre ans, le projet vise à « lutter contre la violence dans les rues de Kinshasa en empêchant les jeunes âgés de 10 à 19 ans de se joindre aux gangs et aider ceux qui y sont déjà à quitter ». 

Trois communes (Kintambo, Bumbu et Makala) constituent la cible du projet financé par l’ambassade de Suède en République démocratique du Congo, avec l’appui de Promundo-Us et ses partenaires, le Réseau des éducateurs des enfants et jeunes de la rue en RDC (REEJER), Aide à l’enfance défavorisée (AED), la Coalition nationale pour l’éducation pour tous en RDC (CONEPT/RDC), puis Living peace Institute (LPI).

L’exécutif provincial souhaite que le projet rayonne et s’étende à toute la ville afin d’« éradiquer complètement ce fléau ». Convaincu que cette initiative va « inciter les jeunes filles et garçons à devenir des acteurs de changement » et « servir des mesures de prévention et combattre les violences de toutes formes ». Pour l’ambassade de Suède en RDC, le projet va « encourager le développement positif de la jeunesse en créant des compétences vitales pour cette catégorie de la population ». Le projet est conçu pour aider « les jeunes à devenir des agents de changement » et va « contribuer à réduire la violence » et aussi à « promouvoir la masculinité positive ». Jacques Tshibalanga, coordonnateur de la CONEPT/RDC, met l’accent sur les actions à mener pour mettre fin aux phénomènes Enfants de la rue et Kuluna. 

Il est temps d’agir

« Agissons maintenant, a-t-il lancé. Si ce fléau qui étouffe l’épanouissement des jeunes n’est pas pris en charge, l’impact se fera sentir dans la communauté ». 

D’après les jeunes, le projet aide à briser le cycle de la violence par l’acquisition des valeurs comme l’assurance, le respect… Il permet aussi d’acquérir d’autres compétences afin de lutter contre les normes négatives de la masculinité, notamment la criminalité et les violences faites aux filles. 

Les activités du projet sous forme des « Club des jeunes » ont commencé le 8 juillet 2017. Les jeunes y font des « échanges critiques sur les questions de violences, genre et estime de soi selon une approche transformatrice du genre » de Promundo et LPI. Après deux cycles, 959 jeunes ont suivi les formations dans les clubs. Samedi 25 août, 1 404 jeunes venant de 72 clubs sont sortis de la formation et vont désormais célébrer « leur changement et leur victoire sur le phénomène Kuluna ». 

Selon cette étude, « sans armes et avec les efforts au niveau individuel, familial et politique, des succès énormes sont en train d’être enregistrés ». Un jeune de 15 ans ayant participé à la phase 1 de la formation témoigne : « J’ai été surnommé Mabe zéro, ou le mal commence par moi, c’est moi qui fus initiateur des tous les mouvements des bagarres, si je dis blessons, on blesse… Une fois j’ai été arrêté et mis au cachot pour ces actes. J’ai beaucoup souffert et mes parents ont beaucoup dépensé pour obtenir ma libération… Depuis que j’ai intégré le Club des jeunes contre la violence, à travers la session « gestion des émotions », j’ai appris comment se maîtriser et gérer mes émotions, je me sens très bien… Je suis devenu un nouvel enfant dans le quartier et un modèle pour les autres jeunes qui restent encore dans les groupes des gangs à Kinshasa… » Dieudonné Kambale, le coordonnateur du projet, souligne que grâce à ce projet, une nouvelle génération de jeunes va voir le jour. Des jeunes qui ont confiance en eux, développent de bons rêves et ne cèdent pas aux attentes de la culture et des coutumes appelant à la violence. « Ces jeunes transformés au bout de 14 séances, seront des hommes responsables et acteurs de paix », fait-il remarquer. 

L’enquête a montré que l’environnement kinois et les programmes et politiques existants ne sont pas à même de contribuer à mettre fin à l’existence des gangs de Kuluna. Le projet « Club des jeunes contre la violence » (CJCV) 

est un projet pilote à caractère préventif. Les animateurs du projet invitent tout le monde à se mobiliser car la lutte contre la violence urbaine, c’est notre rôle à tous.