La BAD appelle à investir dans la nutrition en Afrique

Sur le continent africain, au moins 58,7 millions d’enfants âgés de moins de cinq ans présentaient un retard de croissance en 2017. Selon des observateurs, ce nombre doit avoir augmenté. Que faire ?

LA SITUATION est « très alarmante ». Et donc il faut prendre des mesures maintenant, a déclaré Babatunde Omilola, le chef de Division Santé publique, sécurité et nutrition de la Banque africaine de développement (BAD), à l’ouverture lundi 24 juin à Abidjan d’un atelier de sensibilisation en nutrition pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre. L’état de la nutrition en Afrique se caractérise par le retard de croissance, l’émaciation, la prévalence de l’anémie, la surcharge pondérale et l’allaitement exclusif au sein.

Selon un rapport mondial paru en 2018 sur la nutrition dans le monde, au total 58,7 millions d’enfants de moins de cinq ans en Afrique subsaharienne souffrent d’un retard de croissance, 13,9 millions sont atteints d’émaciation et 8 % des adultes de plus de 20 ans sont en surpoids tandis que 20 millions de bébés naissent chaque année avec un faible poids à la naissance. En Afrique de l’Ouest et du Centre, les taux de retard de croissance sont respectivement de 29,9 % et de 32,1 %.

Le coût de la malnutrition

Pour la BAD, les causes profondes de la malnutrition tiennent à l’insécurité alimentaire, aux mauvaises infrastructures en matière d’eau et d’assainissement, à la faible couverture sanitaire, aux conflits, à la pauvreté et aux inégalités liées au genre. La malnutrition retarde le progrès vers l’atteinte des objectifs du développement en Afrique, estime l’expert de la BAD qui relève que les économies africaines perdent près de 25 milliards de dollars par an du fait de la malnutrition qui coûte entre 1,9 % et 16,5 % du PIB des pays africains. Babatunde Omilola a présenté les arguments économiques en faveur d’un investissement plus accru dans la nutrition et insisté sur le rôle de la BAD dans le cadre de son plan d’action pour la nutrition lancé en 2018 et visant à réduire de 40 % le nombre d’enfants de moins de cinq ans souffrant d’un retard de croissance en 2025. Dans le cadre de son plan d’action pour la nutrition, la BAD décide d’accroître les investissements « rationnels » sur le plan nutritionnel dans les secteurs de la santé, de l’agriculture, de l’eau, de l’assainissement et de l’hygiène et de la protection sociale.

L’institution financière panafricaine est à l’origine de la mise en place de l’initiative des Leaders africains pour la nutrition (ALN, sigle en anglais), une plateforme adoptée en janvier 2018 par l’Union africaine (UA) pour catalyser et soutenir un leadership et un engagement politique de haut niveau pour mettre fin à la malnutrition en Afrique. Pour y arriver, la BAD recommande, entre autres, une augmentation des allocations budgétaires en matière de nutrition, le respect des lois sur l’enrichissement obligatoire des aliments afin de lutter contre l’anémie et d’autres maladies, le renforcement de l’autonomisation des femmes et des adolescentes, la collecte en temps opportun de données de qualité.

Résilience alimentaire

La mise en place de ce programme vise, selon l’institution, à renforcer la résilience et la sécurité alimentaire et nutritionnelle dans les différentes régions d’Afrique. L’objectif principal étant de réduire de 40 % le retard de croissance des enfants africains de moins de 5 ans, d’ici à 2025. Intervenant à cette occasion, Morgane Daget, la conseillère en politique au sein du secrétariat du Mouvement Scaling up Nutrition (SUN), a, pour sa part, déclaré que la collaboration multisectorielle est le « moyen le plus efficace et le plus durable pour mettre fin à la malnutrition ». Car « cela permet la mise en œuvre d’une gamme de services plus large, tout en offrant la possibilité de bénéficier d’un engagement politique et financier de haut niveau pour la malnutrition ».

D’après elle, se fondant sur les estimations, 30 % des enfants de moins de 5 ans souffrent de la malnutrition. Et aujourd’hui une personne sur trois souffre du problème de malnutrition qui n’est pas uniquement causé par le manque d’une alimentation équilibrée, mais également par des facteurs liés à la santé, l’eau et l’assainissement et l’hygiène, et l’éducation. La mise en œuvre de ce projet a démarré en 2015 dans cinq pays : le Burkina Faso, la Gambie, le Sénégal, le Mali, la Mauritanie et le Nigeria.