La BAD engage 8 millions de dollars dans un projet sur les lacs Albert et Edouard

Ce n’est pas du tout facile de se livrer à la pêche par ce temps du côté congolais des lacs Albert et Edouard. Des bandits qui se réclament d’obédience Maï-Maï, occupent pratiquement tous les ports de pêche de la région, dont Vitshumbi. Ils se paient même la liberté de prélever des taxes jusqu’à 150 dollars par pirogue. Des sources sécuritaires, il nous revient que la force navale dans ce secteur qui a connu un changement à sa direction, s’apprêterait à rétablir l’autorité de l’État dans les zones lacustres.

La Banque africaine de développement a décidé d’appuyer la RDC et l’Ouganda dans la gestion intégrée de la pêcherie en ressources en eaux lacustres. À court terme, il s’agit d’entreprendre le balisage, la sécurisation de deux lacs avec leur zone de frayère ainsi que leur délimitation.

Contrat norvégien 

Toutefois, selon la Banque africaine de développement (BAD), il va falloir au préalable déterminer, singulièrement pour le lac Albert, les types de poissons qui seront concernés par le projet. Cette étude devrait prendre fin entre juin et juillet 2017. Une somme de 700 000 dollars sera consacrée à l’étude des poissons en vue de prévenir toute extinction d’une espèce ou d’une autre parmi les ressources halieutiques du lac Albert qui fut aussi appelé « Mobutu ».

La RDC s’est dotée d’un ministère de la Pêche à part entière. Mais pour des experts, ce portefeuille répond plutôt à des intérêts purement politiques plutôt qu’à une réelle volonté de se doter d’une politique ambitieuse dans le domaine de la pêche. Cependant, du temps où il était ministre de l’Économie, Jean-Marie Bulambo Kilosho, l’actuel ministre de la Pêche et de l’Élevage, avait mûri un projet en partenariat avec des investisseurs norvégiens grâce auquel une dizaine d’unités de bateaux de pêche devaient opérer sur le fleuve Congo. Le montage financier de ce projet était évalué à 32 millions de dollars, selon Bulambo. Va-t-il le réactiver ? Wait and see.

Les Chinois de Bosa 

En dehors des zones lacustres de l’Est, partant du Grand Katanga à l’ex-Province Orientale où s’opère une intense activité de pêche, il n’existe pratiquement plus de grande entreprise de pêche en RDC. Sur la côte atlantique, c’est une entreprise chinoise de droit congolais, Bosa, qui a repris le terrain abandonné par les Pêcheries maritimes du Zaïre (PEMARZA). Les chalutiers de Bosa, fabriqués avec du bois de Mayombe, sont bien souvent arraisonnés par la marine angolaise. Bosa déplore le mutisme du gouvernement congolais par rapport à ce problème récurrent. Les dirigeants déclarent que « leur entreprise paye régulièrement ces taxes mais elle n’est pas protégée par les autorités congolaises face à la marine angolaise qui dicte sa loi sur les eaux congolaises ». L’Angola a toujours affirmé que ces navires sont araisonnés au motif qu’ils péchent dans les eaux territoriales angolaises. Une accusation rejetée par Bosa, qui affirme détenir toutes les coordonnées techniques prouvant le contraire.

L’unique entreprise de pêche industrielle sur la côte muandaise envisagerait même d’aller opérer ailleurs. Une décision que redoute la société civile locale. Elle demande au gouvernement congolais de s’impliquer pour « sauver » cette société. La société civile de Muanda déclare que c’est la seule entreprise qui approvisionne le Kongo-Central et Kinshasa en poissons. Or ces deux provinces constituent le principal marché d’écoulement des surgelés, dont les chinchards ou « Mpiodi ». Les Libanais, dont Congo Futur, détiennent pratiquement le monopole du marché d’importation des surgelés. Ils ont tenu la dragée haute aux Damseaux au point de les pousser à fermer leur entreprise Orgaman. À Muanda, l’on ne sait pas s’expliquer comment et pourquoi l’ex-PEMARZA devenue Société congolaise de pêche (SOCOPE) a cessé toute activité. Et le silence de Kinshasa face à la confiscation des navires de Bosa, abandonnés, depuis, au large de la ville angolaise de Soyo, a fini par convaincre plus d’un Muandais que des importateurs de surgelés exercent un lobbying sur Kinshasa.

En tout état de cause, il sied de mettre en exergue les velléités de plus en plus outrées de l’Angola à phagocyter le plateau continental de la RDC. L’Angola a, ce n’est un secret pour personne, rejeté la carte du plateau continental de la RDC présentée par le gouvernement congolais à l’ONU en 2012. Depuis, plus rien. Si ce n’est que l’Angola est restée maîtresse du territoire maritime congolais, plus de 400 km partant de la côte à la haute-mer. La RDC n’a à peine que 37 km de côte sur l’Atlantique.

Depuis des lustres, l’Angola se comporte en conquérante dans les eaux territoriales de la RDC. Personne ne s’en émeut… à Kinshasa. Déjà, à l’époque où Chevron – qui a cédé ses actifs à Muanda International Oil Company (MIOC) – opérait en offshore dans le littoral congolais, un navire angolais avait sectionné ses pipelines. La catastrophe aurait été irrémédiable si un tanker n’avait pas vidé ces pipelines quelques heures plutôt. Mais les incursions de la flotte angolaise, notamment des gros chalutiers de fabrication soviétique, ont repris de plus belle. Les navires angolais se paient même la liberté de zigzaguer entre les bouées d’exportation du brut, les plates-formes de forage et le terminal de stockage des produits pétroliers. Cependant, pas de protestations ni de réactions officielles du côté congolais.