La Banque mondiale gèle le financement de l’usine de captage d’eau à Kinsuka

Une délégation de cette institution financière internationale est annoncée courant mars à Kinshasa. La question du financement des projets de la Regideso sera sans doute abordée entre cette mission et les officiels du pays.

LA BANQUE mondiale traîne à financer le projet de construction de l’ouvrage, et le directeur général de la Regideso Sa se tourne vers le gouvernement pour sa réalisation. Fin février, il faisait 8 mois depuis que la Banque mondiale s’est engagée à financer les travaux de construction de l’usine de captage d’eau à Kinsuka-Pêcheurs dans la banlieue ouest de Kinshasa. « Il y a déjà huit mois que la Banque mondiale traîne à donner son avis de non objection pour la construction de cette usine, et pourtant les besoins  exprimés par les populations concernées sont toujours croissants », a déploré Clément Mubiayi, le directeur général de la Regideso. 

Les Ouestafs de la Banque mondiale

En outre, dans sa correspondance à Ingele Ifoto, le ministre de l’Énergie et des Ressources hydrauliques, le DG de la Regideso SA souligne que le financement du Projet eau en milieu urbain (PEMU) bat également de l’aile. Pourtant, le projet, lancé en 2008, doit formellement prendre fin le 30 juin prochain. À la Regideso, il se rapporte que l’attentisme de la Banque mondiale aurait longtemps été dicté par le chef de ce projet à Washington, un sujet sénégalais naturalisé américain. Le même qui a imposé à l’entreprise le groupement Eranove/SDE pour sa gestion commerciale. 

L’État qui est toujours actionnaire unique de l’entreprise commerciale, avait conclu avec la Regideso deux contrats de performance et de service. De nouveaux gestionnaires, des expatriés, ont été placés aux postes-clés de la société. Mais il nous revient que pour le contrat de service, le salaire annuel des 4 cadres sénégalais placés à la Regideso s’élèverait à quelque 10 millions de dollars, alors que pour les opérations de suivi et évaluation, supervision de travaux et audits, les experts d’Eranove/SDE empocheraient quelque 14 000 000 de dollars l’an. Mais la mouvance syndicale aurait déniché des faisceaux de lourdes présomptions de détournement des fonds à travers de prétendues opérations de suivi. Il s’agit notamment de ce « marché léonin » de ratissage des abonnés d’un montant de 800 000 dollars passé sans respect des procédures de passation de marchés à la firme sénégalaise Manobi. 

Il semble que ce marché a été attribué non sans l’aval de la direction générale de la Regideso.  Mais de l’avis de la mouvance syndicale, les experts ouest-africains d’Eranove/SDE n’ont guère apporté les recettes escomptées. Bien au contraire, un rapport interne souligne que la société a brillé par l’amenuisement des ressources financières, le faible taux de rendement réseau et la précarité de la couverture en produits chimiques. 

Cependant, la nouvelle vision de la Regideso consiste à accompagner le processus de décentralisation, renforcer l’implication de provinces dans le développement des infrastructures d’addiction d’eau potable, le partenariat et la confiance des bailleurs de fonds pour augmenter la mobilisation de ressources nécessaires aux investissements. Le PEMU vise l’amélioration la desserte en eau dans les villes de Kinshasa, Matadi, Lubumbashi et Kindu. 

Toutefois, la Banque mondiale a déjà officiellement demandé, par le biais de son représentant résident, à l’État d’honorer ses obligations financières vis-à-vis de la Regideso. Au 31 décembre 2017, l’État devait à la Regideso quelque 103 milliards de nos francs, soit près de 100 millions de dollars cumulés depuis plusieurs années. Il s’agit ici des factures certifiées, approuvées et validées, précise-t-on à la Regideso. Il va sans dire que l’État et ses institutions publiques seraient aux premières loges des insolvables que la société pourrait traduire en justice. Il sied de rappeler qu’à une certaine période, les factures de consommation d’eau des institutions publiques étaient prises en charge par la Banque africaine de développement (BAD), dans l’espoir que l’État en profiterait pour redresser ses finances et honorer par la suite ses factures. 

Finances au rouge

Aujourd’hui encore, c’est grâce à d’autres partenaires, dont la Belgique et le PNUD, que la Régie de distribution d’eau acquiert des intrants pour tourner ses usines. La situation financière de l’entreprise a atteint le seuil critique à tel point que le conseil d’administration présidé par le MSR/MP Yoko Yakembe a sollicité et obtenu du gouvernement, il y a une année, de revoir à la hausse son tarif moyen de 0.75 dollars à 0.89 dollars le m3, dans l’espoir de ramener la Regideso à un certain équilibre financier. 

En pratique, le m3 d’eau en RDC coûterait désormais autant qu’au Sénégal ou au Burkina-Faso, des États aux ressources en eau plutôt limitées du fait de l’influence du climat sahélien. Selon des sources, le taux d’accès à l’eau est d’environ 35 % dans la capitale, 18 % à Matadi et 22 % à Lubumbashi. La capacité nominale de production d’eau sur toute l’étendue de la RDC est en moyenne de 35 millions de m3/mois. Côté distribution, la Regideso a un réseau primaire, secondaire et tertiaire confondus de 9 998 km, pour quelque 3 567 km de branchements.