La carte postale du Nord-Kivu

En octobre 2013, à la faveur d’un meeting entre les autorités provinciales et les investisseurs du secteur minier à l’Hôtel Kempiski Fleuve Congo à Kinshasa, le gouverneur du Nord-Kivu, Julien Paluku Kahongya, a fait une brillante présentation sur les enjeux et les perspectives de l’exploitation minière dans sa province. Le Nord-Kivu, c’est six territoires et trois villes (Goma, Butembo et Beni). C’est un territoire sur 59 631km², avec une population de plus de 6 millions d’habitants (environ 100 hab/km²).  Au Nord-Kivu, la croissance démographique est remarquable, avec un taux de croissance de 3,5 % par an. Sa faune diversifiée est une opportunité pour le tourisme. L’économie du Nord-Kivu est essentiellement agricole grâce au sol riche et volcanique (café, thé, pyrèthre, pomme de terre, légumes, etc.), l’élevage de gros et petit bétails est développé. Le Nord-Kivu a un immense potentiel minier, pétrolier et gazier. Les principaux minerais selon l’importance en quantité produite sont la cassitérite, le coltan, le wolframite, le pyrochlore, l’or et les pierres précieuses, le pétrole et le gaz méthane.

L’exploitation minière artisanale est prédominante. Le gouvernement provincial s’emploie à regrouper les exploitants artisanaux dans des coopératives en vue de la création d’une classe moyenne dans ce secteur. L’exploitation industrielle, quant à elle, est envisagée par quelques sociétés, notamment Mwangachuchu Hizi International (MHI) à Rubaya/Masisi pour le coltan, SAKIMA à Masisi et Walikale pour l’or, SOMIKIVU à Lueshe dans le Rutshuru pour le pyrochlore.

En ce qui concerne la recherche, Mining Process Company (qui détient 4 permis de recherche) est active à Bisie/Walikale pour la cassitérite, LONCOR (qui détient environ 33 permis de recherche) opère à Bingo (territoire de Beni pour le pyrochlore) et à Manguredjipa à Lubero pour l’or. La Générale des mines et de l’agriculture au Congo (GEMINACO) est présente à Omate pour l’or.

Autres substances minières : le tourbe combustible solide, les calcaires travertins et les roches à chaux (pour la cimenterie) à Masisi (Sake/Mushekera, 2 350 000 t, Murambi), Rutshuru (Katale), Lubero (Kasuo, Luofu), Beni (Kanyihunga).

Les pierres de couleur telles que l’amethyste, la tourmaline sont présentes à Beni, Lubero et Masisi, etc., tandis que les pierres précieuses telles que le diamant à Lubero (Musienene, Kimbulu) et à Walikale (Angoa) et la monazite (minerai à terres rares du groupe cérium) que l’on retrouve à Bingo associée au zirconium et à Kabengelewa/Obaye associé à l’europium et aux éléments du groupe de l’yttrium.

Le gaz méthane du lac Kivu peut alimenter les turbines à gaz pour la production de l’électricité. D’autres dérivées peuvent être produites du méthane. Par exemple, l’urée qui sert de fertilisant. Le pétrole du lac Édouard et du graben de Semuliki (rift albertin) est en voie d’exploration par des sociétés pétrolières SOCO et autres.

Perspectives économiques

Quoique moins importants comparativement à celles d’autres provinces comme le Katanga, le Kasaï et la Province Orientale, les ressources naturelles du Nord-Kivu peuvent jouer un rôle de premier plan dans l’économie de la province à côté des produits agro-pastoraux(café, thé, quinquina, pyrèthre, cacao, coton, palmier à huile, papaïne, riz, arachides, blé, maïs, légumes, lait, fromage, viande de boeuf…).

Le gouverneur Paluku et son administration fournissent des efforts pour un environnement favorable aux affaires et aux infrastructures. Suite à la loi Dodd Franck, les recettes propres de la province ont baissé d’environ 30 %. Mais l’exécutif provincial souhaite la mesure soit soutenue sur le plan politique et sécuritaire du fait de l’activisme des groupes armés ainsi que de leur présence dans le circuit informel minier. Sur le plan sécuritaire, les autorités font tout pour assurer une bonne cohabitation entre titulaires des droits miniers et les exploitants artisanaux; assainir le fichier cadastral minier en vue d’ouvrir de nouvelles zones d’exploitation artisanale pour prévenir d’éventuels conflits.  Sur le plan de l’amélioration du climat des affaires, l’administration provinciale a consenti des allègements fiscaux, construit des centres de négoce pour la traçabilité des minerais, démantelé plusieurs réseaux mafieux et arrêté des criminels miniers, mené le plaidoyer pour la qualification des sites miniers en vue de leur validation, créé un fonds de développement de la province afin de permettre le traçage de la piste Logu-Bisie. Par ailleurs, l’exécutif provincial fait de l’électrification une priorité majeure, notamment pour l’exploitation industrielle locale. Bref, un seul mot d’ordre : SRECAPE (sécurité-route-énergie-capitaux-emploi, la sécurité restant la priorité des priorités).

Partenariat public-privé

Plusieurs projets sont en cours d’élaboration ou d’exécution. C’est notamment le cas des Projet de qualification et requalification des sites miniers de Masisi et Projet de qualification des sites miniers de Walikale (MONUSCO/JMAC, USAID, BGR, PACT/ITRI); du Projet de mutation des comptoirs en entités de catégorie A (CMM, HUAYING et AMRMUGOTE); du Projet d’amélioration des conditions de vie dans les zones minières d’exploitation artisanale (phase Rubaya) grâce à un financement japonais, exécuté par le PNUD, la FAO et l’UNICEF. Il y a aussi le Projet de la Fonderie d’étain de l’AFRICANS MELTING GROUP(ASG) à Sake dont la mise en service n’attend que l’amélioration de la situation sécuritaire ainsi que la qualification des sites stannifères; ainsi que le Projet de création d’une zone industrielle à Sake (27 km à l’Ouest de la ville de Goma)…