La FEC dans le rôle du plaignant

Le principal patronat dans le pays a pesé de tout son poids aux assises sur la réforme de la fiscalité en RDC. Dans le rôle du « plaignant », son président a parlé sans ambages, à l’ouverture, et a laissé la place aux autres membres de faire le reste du travail.

C’est légitime que la Fédération des entreprises du Congo (FEC) ait été dans les premières loges au forum national sur la réforme de la fiscalité en République démocratique du Congo, qui vient de se tenir à Kinshasa (11-14 septembre). En effet, il y a longtemps que la FEC réclamait cette réforme, jusqu’au 5 avril quand le chef de l’État, Joseph Kabila Kabange, a décidé finalement de donner un coup de pied à la termitière. Dans son discours à l’ouverture du forum sur la réforme du système fiscal en RDC autour du thème « quel système fiscal pour la croissance et le développement en RDC ? », Albert Yuma Mulimbi y est allé de franc jeu. Une fois encore, le président de la FEC est resté constant, surtout droit dans ses bottes, en égrenant les « exigences » de son institution.

Devant les 450 participants au forum organisé par le ministère des Finances, le président de la FEC n’a pas usé de langue de bois. Comme à son habitude. Il a fustigé les « politiques fiscales aventureuses sans impact social ». Albert Yuma a appelé les autorités du pays à un véritable sursaut afin de saisir l’opportunité offert par le forum pour repenser de fond en comble la fiscalité en RDC autour d’un projet économique commun et des perspectives du développement du pays. D’après lui, le développement économique de la RDC doit résolument être fondée sur « son développement industriel local » et « cesser d’attendre son salut des cours mondiaux des matières premières ». Le développement économique passe en priorité par l’investissement agricole et industriel.

Dans la conjoncture actuelle, difficile pour le pays, que faire pour qu’enfin on trouve la voie d’un développement économique équilibré ? Pour le président de la FEC, il faut commencer par lever les contraintes récurrentes d’un environnement des affaires et des investissements peu attractif. À ce jour, le pays est un importateur net de biens de consommation courante, alors qu’il dispose de grandes potentialités pour devenir une nation industrielle et peut-être un jour, une grande nation industrielle. Les principales activités industrielles du pays sont limitées à un nombre réduit de filières de biens de consommation, notamment la production du sucre, des boissons, de la transformation des matières plastiques, des produits cosmétiques, de la panification… Les filières des biens d’équipements sont sous-exploiteés et tournent principalement autour de la production du ciment et de la construction métallique.

Faire sauter les verrous

La lourde fiscalité et la parafiscalité qu’elle supporte constituent les principales contraintes qui empêchent l’industrie locale d’amorcer son redécollage. Elles atteignent 52 % du chiffre d’affaires, soit le double de ce qui est payé dans certains pays voisins. L’augmentation du taux de droit d’accises sur plusieurs produits, justifiée par la seule maximisation des recettes a poussé des opérateurs économiques à procéder à des changements structurels ou envisager la fermeture de leur unité de production. Par exemple, dans les industries brassicoles, qui ont connue une baisse de plus de 20 %, la Bralima a fermé ses usines de Mbandaka (2015) et Boma (2016).

La FEC en appelle à l’émergence d’un État fort doté d’une administration fiscale compétente, sur lequel le secteur privé devrait s’appuyer dans le cadre d’un partenariat durable, sincère et constructif. Selon Albert Yuma, le climat des affaires ne peut s’améliorer que lorsqu’un débat fécond est entretenu durablement entre l’État et les acteurs privés, ce qui constitue la première condition. Et ce débat fécond devra être suivi d’effets concrets. Les relations commerciales qui se font dans le cadre du commerce frontalier ou dans le cadre des zones de libre-échange pour l’instant ne sont pas accompagnées de mesures efficaces de sauvegarde de l’activité économique intérieure.

À la FEC, on est persuadé que développer les capacités de production interne des biens et services permettra de tirer le meilleur parti des cycles de croissance et de résister aux situations de crise. D’après Albert Yuma, les entreprises prennent suffisamment déjà un risque politique pour ne pas revendiquer un maximum de stabilité de la part de l’État, en termes d’environnement politique, juridique, judiciaire, fiscal et monétaire. Pour cela, l’État doit créer et mettre en place un cadre des règles, qui soient comprises et utilisables par toutes les entreprises, petites, moyennes ou grandes.

Concrètement, les entrepreneurs souhaitent un allègement des charges (fiscales, parafiscales et autres) afin de leur permettre d’investir dans la production, un accès facile aux financements nécessaires à leur développement, des facilités à l’import-export pour rendre plus rapides les activités de production et de commerce, le soutien de l’État aux PME et créateurs d’entreprises dans la définition et la mise en œuvre des projets et activités… Pour le secteur privé, le gouvernement devra être à l’écoute des entrepreneurs car ce sont eux qui créent les produits, les services et les emplois. Stimuler la production nationale, c’est un défi commun, notamment dans les secteurs agroalimentaire et minier, dans le domaine des services aux entreprises et à la population… C’est ainsi que l’on peut créer de la valeur ajoutée, source de création d’emplois nombreux et durables. C’est donc tout cela qui a été exposé par quelques membres de la FEC dans les discussions et débats en ateliers. Ci-après, leurs communications.