La Gécamines veut voir clair dans ses partenariats avec les compagnies privées pour la plupart étrangères

Point n’est besoin de dire que le rapport du cabinet d’audit recruté par la Générale des carrières et des mines pour situer les causes des contreperformances de ces dernières années dans la plupart des partenariats avec des entreprises privées est très attendu.

 

Les premières conclusions font état des problèmes de gestion, de minoration des revenus. Pourtant, les cours mondiaux du cuivre et du cobalt envoient des signaux de reprise encourageants. Les objectifs et les prévisions annoncés dans le cadre de la stratégie initiée par le gouvernement au début de la décennie 2000, ne sont pas atteints. En concluant des joint-ventures avec des compagnies étrangères, le goal pour le gouvernement et  la Générale des carrières et des mines (GECAMINES) était notamment de « générer les revenus nécessaires à la reconstruction au Katanga d’un grand appareil de production nationale ». De l’avis général dans le Katanga, la plupart des partenariats public-privé, sinon tous, ne sont pas concluants. Ils n’ont pas ou guère rapporté des dividendes pour l’État.

Certaines joint-ventures ont totalisé dix années de production, dont cinq ans pendant la période de super-cycle des matières premières entre 2010 et 2014. Les résultats enregistrés sont en-deçà des projections des études de faisabilité présentées par les partenaires lors de la demande de baux miniers pour le lancement des projets. C’est pourquoi, la GECAMINES a décidé de se donner les moyens de suivi, de contrôle, et de nouvelles clefs de répartition du partage de la production, afin de permettre à l’État de bénéficier effectivement des « justes fruits de l’exploitation de son sous-sol ». Pour ce faire, la GECAMINES a recruté un auditeur de renommée internationale pour plonger dans les comptes de ses partenaires. Question d’y voir clair. Quand on connaît la gnaque du président du conseil d’administration de la GECAMINES, Albert Yuma Mulimbi, il y a lieu de s’attendre à des décisions spectaculaires. On se souviendra pour longtemps encore de sa ténacité dans l’affaire de cession de Tenke Fungurume Mining (TFM). L’américain Freeport Mc Moran a fini par verser 33 millions de dollars à la GECAMINES. Sinon Yuma allait porter cette affaire devant la justice internationale.  Freeport McMoran a cédé ses parts (56 %) dans le projet cuivre Tenke Fungurume à China Molybdenum. Il avait, en effet, révélé cet arrangement à l’amiable ainsi que le montant versé dans son bilan du dernier trimestre 2016. Selon des sources proches du dossier, les autres entreprises engagées dans cette affaire, dont le nouveau partenaire majoritaire de la GECAMINES dans TFM, China Molybdenum ainsi que Lundin et BHR Partners, devraient, elles aussi, mettre la main à la poche pour en quelque sorte dédommager la GECAMINES.

Gérer comme dans le privé

Albert Yuma, qui est en même temps le président de la Fédération des entreprises du Congo (FEC), s’est opiniâtrement opposé à la cession des parts de Freeport Mc Moran à la société China Molybdenum, pour le simple fait qu’il n’a pas été consulté au préalable sur la cession de la mine de cuivre de Tenke Fungurume, dont la GECAMINES détient 20 % d’actions. La firme chinoise Molybdenum a, en effet, racheté pour 2, 65 milliards de dollars les 56 des 80 % des parts de Freeport Mc Moran. Le  gouvernement par le biais du ministre de l’Économie de l’époque, Modeste Bahati Lukwebo, a estimé que la transaction passée entre Américains et Chinois sur TFM ne posait pas problème, surtout que les intérêts de la Générale des carrières et des mines étaient garantis. Albert Yuma avait déjà fait comprendre à l’ancien 1ER Ministre, Augustin Matata Ponyo, qu’il gérait la GECAMINES comme une entreprise privée.

On se souvient encore de cette autre affaire, il y a quelques années, l’affaire CMSK, avec le puissant homme d’affaires Forrest dont la famille est installée dans le Katanga depuis 1922. CMSK, c’est la Compagnie minière du Sud-Katanga. La GECAMINES avait, en effet, récupéré, dans le cadre d’une opération de fusion-absorption les parts sociales de l’Entreprise Générale Malta Forrest (EGMF) dans le joint-venture CMSK au prix de 58 millions de dollars. Non sans anicroches. EGMF avait initialement vendu ses actions à une tierce entreprise. La GECAMINES SA a cédé par la suite à Congo Dongfang International Mining Sarl le permis repris à Forrest pour un montant de 52 millions de dollars. Ce permis englobe les gisements de Luiswishi et Lukuni ainsi que les remblais s’y trouvant, soit 354 619 tonnes de cuivre et 62 903 tonnes de cobalt.

La GECAMINES a soutenu avoir réalisé, dans cette opération de vente une plus-value, d’autant plus qu’elle conserve, outre le concentrateur et le siège, les autres titres miniers, à savoir les permis d’exploration 2603, 532, 7571 ainsi que les permis de recherches 1054, 1066, 2358 et 2808 qui faisaient partie du patrimoine de CMSK. Albert Yuma avait également déplumé le fonds vautour Hemisphere GF qui avait fait bloquer les comptes de la GECAMINES à l’étranger dans l’espoir de se faire payer une dette de la Société nationale d’électricité (SNEL) de près de 1,8 million de dollars. Le conseil de la GECAMINES a fait comprendre la cour arbitrale de Washington que l’entreprise minière congolaise et la Société nationale d’électricité étaient deux entreprises distinctes.