La microfinance pèse peu dans les transactions financières

Bien que ne représentant que 5 % du total bilantaire, elle est, selon les experts, un des secteurs importants sur lequel peut s’appuyer l’économie nationale en matière d’inclusion financière. 

Le nombre des comptes ouverts par les institutions de microfinance (IMF) et des coopératives d’épargne et de crédit (COOPEC) est d’environ 1,5 million. Cela représente 5 % de l’ensemble des comptes du système financier congolais. La caractéristique principale des IMF et des COOPEC est qu’elles sont parfois accessibles à des endroits très reculés, dépourvus d’infrastructures de base.

En plus, dans le secteur de la microfinance, la pratique et la loi opèrent une démarcation entre les institutions mutualistes (COOPEC) et les institutions non mutualistes (IMF).

Le secteur de la microfinance est un secteur encore fragile. Elle n’a pas encore atteint l’autosuffisance opérationnelle du fait des problèmes structurels (gouvernance, insuffisance des fonds propres…). Comme les banques commerciales, les activités de la microfinance sont concentrées dans les deux Kivu et à Kinshasa. Avant 2013, les COOPEC étaient plus dynamiques que les IMF. Mais actuellement on assiste à un renversement de la tendance. Cela s’expliquerait par le fait que la plupart des IMF sont à capitaux étrangers.

Les coopératives d’épargne et de crédit sont sous le coup de la loi n°002/2002 du 2 février 2002. La loi COOPEC organise les COOPEC en réseaux pyramidaux, à trois niveaux : COOPEC-COOCEC et Fédération. Les COOPEC à la base réalisent les services à la clientèle). Jusque-là, la BCC a agréé trois COOCEC, et il n’existe pas encore de fédération. La BCC a renforcé les normes prudentielles, avec notamment un ratio de solvabilité/capitalisation et la mise en place de mécanismes de solidarité financière au sein des réseaux. Suite à l’insuffisance des normes spécifiques, la Banque centrale applique aux COOPEC des instructions des établissements de crédit.

Les IMF, quant à elles, font l’objet de la loi n°11/020 du 15 septembre 2011 ou la loi IMF, promulguée le 25 février 2013. La loi distingue les entreprises de microcrédit des sociétés de microfinance. Ces sont les seules habilitées à collecter l’épargne du public. La BCC renforce les conditions d’agrément et d’exercice, avec notamment pour les sociétés de microfinance, un capital minimum passé de 100 000 à 350 000 dollars en 2013, et projeté à 700 000

Dollars en 2017. La loi autorise les IMF à fournir certains services financiers annexes, tels que le transfert d’argent, la mise à disposition et la gestion de moyens de paiement, la distribution (mais pas l’émission) de monnaie électronique.

Toutes les IMF sont aussi assujetties à certaines normes de transparence financière et de protection des clients mais seules les sociétés de microfinance sont placées sous la supervision prudentielle de la BCC.

Réponse à une réalité historique

L’activité fut d’abord exercée à la fois par des sociétés de type coopératif, des ONG et des institutions financières bancaires. Entre 1970 et 1990, les COOPEC ont émergé dans le pays et se sont implantées dans des endroits reculés et dépourvus de banques. Mais suite aux pillages de 1991 et 1993, la plupart des COOPEC sont tombées en faillite, perdant ainsi près de 80 % de leurs membres et 66 % des fonds placés dans les banques de dépôts. C’est ainsi qu’on va assister à la renaissance des COOPEC et à la naissance des IMF, surtout au Kivu. Les IMF constituent un groupe assez hétérogène dont la forme juridique, le groupe cible, les produits offerts (souvent le crédit et parfois l’épargne) et les méthodologies utilisées peuvent être très variables d’une institution à l’autre.

Il en existe deux associations professionnelles, l’Association professionnelle des

COOPEC (APROCEC) et l’Association nationale des institutions de microfinance (ANIMF), créées respectivement en septembre et octobre 2012.

L’APROCEC bénéficie d’un appui technique et financier du Programme d’appui au secteur de la microfinance (PASMIF) et semble déjà bien fonctionner alors que l’ANIMF ne bénéficie d’aucun appui financier.

Certaines banques, notamment TMB, Advans Banque, Equity ProCredit Bank

et Rawbank offrent, de plus en plus, des produits similaires à ceux proposés par les IMF.

Les produits offerts par les IMF

Les deux produits classiques habituellement offerts par toutes les IMF et COOPEC-MEC en RDC sont l’épargne et le crédit, avec un faible taux de transformation de cette épargne en crédit. Les épargnants étant des personnes à faibles revenus, ils retirent fréquemment leur épargne pour faire face à leurs multiples besoins. La principale activité financée par le crédit accordé par ces institutions demeure le commerce (69 %), avec des délais moyens de remboursement compris entre quatre et six mois. Plus de 70 % des IMF se spécialisent dans le crédit de groupe, avec pour toile de fond le recours à la caution solidaire légalement reconnue (article 44 de la loi 11/20 du 15 septembre 2011) et la possibilité de transférer le risque du prêteur vers l’emprunteur (groupe d’emprunteurs) lorsque le capital social existe réellement entre les membres du groupe et que la pression sociale opère efficacement.

La plupart des COOPEC qui, au départ, n’accordaient que du crédit individuel, ajoutent le crédit de groupe à leur méthodologie, non seulement pour mieux servir les personnes n’ayant pas de garanties matérielles, mais surtout pour améliorer la qualité de leur portefeuille de crédit. Le crédit à la consommation se chiffre à 11 % de l’offre, mais il est généralement garanti par la domiciliation des salaires. Avec la bancarisation de la paie des fonctionnaires et des employés du secteur privé, les IMF et les COOPEC-MEC sont en train de perdre la clientèle qui demande souvent ce type de crédit au profit des banques commerciales de détail.

La part du crédit habitat est de 8 % et concerne surtout l’amélioration de l’habitat des clients concernés plutôt que l’investissement dans l’immobilier. Il ne s’agit donc pas de crédit hypothécaire. Pour sa part, le crédit agricole ne représente que 3 % du portefeuille des crédits à cause de la brièveté des échéances des ressources prêtables dont disposent actuellement les institutions. Les délais requis par le financement agricole sont généralement plus longs. Cela s’explique aussi par la forte concentration des institutions en milieux urbains et d’importants risques covariants caractéristiques des opérations agricoles.

Les produits de transfert d’argent, bien qu’autorisés par la loi au titre d’activités connexes ne sont actuellement offerts que par un réseau d’institutions mutualistes à travers une société filiale, Société de transfert du Congo (STC).

Les IMF et les COOPEC n’utilisent pas encore le mobile banking, mais une IMF internationale a mis en place le POS (point of sale) ou le TPE (terminal des paiements électroniques).

Le secteur de la microfinance en RDC peut être subdivisé en trois zones d’activités ou d’institutions : la zone A est caractérisée par une concentration d’institutions et d’opérations de microfinance. La zone B est marquée par la sous-capitalisation et connaît des réels problèmes de gouvernance. La zone C ne compte officiellement aucune institution agréée, mais elle se trouve géographiquement à proximité de la zone A. Les trois pôles de concentration des COOPEC et des IMF en RDC sont les provinces de Kinshasa, du Nord-Kivu et du Sud-Kivu. Ces trois provinces rassemblent 76 % des COOPEC installées dans le pays et 80 % des IMF. Kinshasa rassemble 21 % des COOPEC et 58 % des IMF.