La République démocratique du Congo auscultée par la Fondation Mo Ibrahim

Le pays peut se féliciter d’avoir enregistré des résultats positifs dans dix des quatorze sous-catégories de l’Indice Ibrahim de la gouvernance en Afrique. Pourtant, il n’occupe qu’un rang modeste au classement général. 

Le Premier ministre Augustin Matata Ponyo.
Le Premier ministre Augustin Matata Ponyo.

Un constat saute aux yeux : depuis 2008, la République démocratique du Congo n’a jamais été parmi les pays les mieux placés au classement établi par l’Indice Ibrahim de la gouvernance en Afrique. Après avoir été 47e en 2008, 2009 et 2013, le pays est retombé à la 48e place sur 54 pays. Il est, donc, sixième sur les huit pays d’Afrique centrale. Cette 48e place a de quoi étonner d’autant plus que, comme le signale l’IIAG, depuis des années, la  République démocratique du Congo a quand même fourni des efforts pour l’amélioration de la gouvernance. Ce qui lui a permis de rejoindre, entre 2011 et 2014, le groupe de 33 pays ayant travaillé dans le même sens.

Selon l’IIGA, depuis 2011, il y a eu une régression en matière de sécurité et d’État de droit, de participation et de droits de l’homme, pendant que des progrès étaient réalisés dans le secteur de l’économie durable et dans celui du développement humain.

Avec un score de 28,3 sur 100 pour la sécurité et l’État de droit, la République démocratique du Congo occupe la quarante-neuvième place en Afrique. Dans la sous-catégorie sécurité de la personne, elle a obtenu un de ses plus faibles scores : 14, 4 sur 100. En l’espace de quatre ans, elle a alterné le meilleur et le pire en ce qui concerne la sécurité et l’État de droit. Or, c’est dans cette sous-catégorie qu’elle a connu son meilleur score. Dans la catégorie sécurité de la personne, les choses ne se sont pas améliorées. L’aggravation de la situation est due, d’après l’IIAG, aux problèmes liés à la sécurité nationale (-20,4) , c’est-à-dire l’implication du gouvernement congolais dans les conflits armés, les déplacés internes, les conflits armés internes. Ces indicateurs sont parmi les quatre qui démontrent la détérioration de la situation et le mauvais classement au niveau continental.

Pour les auteurs de l’indice Ibrahim, c’est dans la catégorie participation et droits de l’homme que la détérioration de la situation se fait le plus sentir. Avec une note de 32,4, la République démocratique du Congo occupe la 47e place sur 54 en Afrique. En décortiquant l’ensemble des sous-catégories, la participation a une note de 19,9 ; le genre 43,3 et les droits de l’homme  33,9. Il en découle une  baisse des performances depuis 2011. Résultat, cette catégorie est en recul : -4,7. C’est la plus grande baisse enregistrée par la République démocratique du Congo.

En fin de compte, tous les indicateurs sont en panne : participation (-11,1) ; élections libres et transparentes (-33,3) ; pouvoir effectif pour gouverner (-22,2). Si la présence des femmes en politique et l’égalité du genre sont toujours problématiques, l’IIAG constate néanmoins des améliorations en ce qui concerne les violences contre les femmes (+8,1) ; l’équilibre du genre dans l’éducation (+ 6,7).

Le pays est mal coté pour ce qui a trait aux opportunités de l’économie durable, aux infrastructures, mais bien classé en matière de secteur rural. Dans la même veine,  l’IIAG constate que  la République démocratique du Congo est parmi les onze pays du continent à avoir obtenu des résultats encourageants dans le secteur de l’économie durable. Il en va de même pour la gestion publique (+5, 8) ; le climat des affaires (+7,4) ; le secteur rural (+7,5).

Des améliorations notables viennent de la gestion publique, de l’administration publique (+14,6)  dans lesquelles, à en croire l’IIAG, la République démocratique du Congo est la meilleure du continent. Il faut ajouter à cela la capacité statistique (+17,9) ; la gestion budgétaire (+12, 5) et la mobilisation des ressources (+10,3). À l’intérieur du climat des affaires, la mesure sur un environnement compétitif est l’unique conducteur du changement positif. Les auteurs de l’indice Mo Ibrahim affirment que la République démocratique du Congo est le seul pays riche en ressources naturelles à  montrer une amélioration dans l’environnement des affaires depuis 2013. Dans le secteur rural, les indicateurs recherche agricole et extension des services  (14,0) ; l’engagement avec les populations rurales à faibles revenus (+13,3) ; la terre et l’eau pour les populations rurales à faibles revenus (+12,5) contribuent à la plupart des acquis au niveau de la sous-catégorie. La partie restante de cette catégorie, les infrastructures, doit aussi s’améliorer, mais dans une moindre mesure (+1,1) conduite par la connectivité digitale (+5,0) et l’accès à l’eau (+0,7).

C’est dans le développement humain, l’autre catégorie où la République démocratique du Congo montre une amélioration depuis 2011,  qu’est réalisé le score par catégorie le plus élevé du pays. Dans cette catégorie, la meilleure performance par sous-catégorie est la santé, tandis que la performance la plus faible concerne le bien-être

Au service de la bonne gouvernance

Outre son créateur, Mo Ibrahim, la Fondation Mo Ibrahim est composée, au niveau de ses directeurs, de personnalités venues d’horizons divers. Parmi elles, on peut citer Donald Kaberuka, ancien président de la Banque africaine de développement (BAD) ; Pascal Lamy, ancien directeur général de l’Organisation internationale du commerce (OMC) ; Graça Machel, ancienne ministre de l’Éducation  nationale du Mozambique ; Sir Ketumile Masire, ancien président du Botswana ; Mary Robinson, envoyée spéciale pour le changement climatique de l’Organisation des Nations unies, ancienne présidente de l’Irlande; Salim Ahmed Salim, ancien secrétaire général de l’Organisation de l’unité africaine, ancien Premier ministre tanzanien. La Fondation  Mo Ibrahim a pour vocation de réaliser des données sur la qualité de la gouvernance en Afrique gratuitement disponibles et accessibles à tous les citoyens du continent et aux parties prenantes intéressées. L’édition 2015 de l’Indice Ibrahim de la gouvernance en Afrique a été rédigée grâce aux données provenant de 33 institutions indépendantes aussi bien africaines qu’internationales.