L’abus de plats industriels expose dangereusement au cancer

Selon une étude dont fait écho AFP, ceux qui abusent des plats industriels augmentent leur risque d’être atteints d’un cancer. L’enquête a été réalisée auprès de 105 000 personnes en France, et formule des hypothèses sur l’origine du danger.

 

L’étude en question a été financée par l’Institut national (français) de la santé et de la recherche médicale (INSERM), avec le concours d’autres institutions publiques françaises. En publiant cette étude, jeudi 15 février, cet institut précise tout de même que « le lien de cause à effet reste à démontrer ». Mais la corrélation est établie. Une brioche industrielle, une pizza surgelée, une salade composée… De 2009 à 2017, les participants à l’étude NutriNet-Santé ont périodiquement rempli des questionnaires en ligne sur ce qu’ils mangeaient. Les chercheurs, qui publient leur étude dans la revue BMJ (British Medical Journal), se sont intéressés à ce qu’ils appellent les « aliments ultra-transformés ».

D’après eux, ceux-ci « contiennent souvent des quantités plus élevées en lipides, lipides saturés, sucres et sels ajoutés, ainsi qu’une plus faible densité en fibres et vitamines ». Ils citent pains, sucreries, desserts, céréales, boissons sucrées, viandes transformées (boulettes, nuggets, jambon avec additifs, etc.), pâtes et soupes instantanées, plats surgelés ou en barquette, etc.

Le seuil à ne pas franchir

À quel point ces produits qui peuplent nos supermarchés et garde-mangers sont-ils dangereux? « Une augmentation de 10 % de la proportion d’aliments ultra-transformés dans le régime alimentaire s’est révélée être associée à une augmentation de plus de 10 % des risques de développer un cancer (…) et un cancer du sein en particulier », résume l’INSERM. Pour le cancer, ce risque est accru de 6 à 18 %, et pour le cancer du sein spécifiquement, de 2 à 22 %. Les « graisses et sauces ultra-transformées et les produits et boissons sucrées » étaient en cause globalement, et pour le cancer du sein, les chercheurs accusaient « les produits sucrés ultra-transformés ».

Il nous faut donc plus de temps en cuisine. « L’avantage de cette étude, qui a des limites, et qui ne prétend pas à l’exhaustivité, c’est de donner des chiffres », a commenté le médecin nutritionniste Laurent Chevallier (CHU de Montpellier). Lui qui publiera, fin février, le livre « L’indulgence dans l’assiette » (Fayard) refuse de jeter l’anathème sur toute l’alimentation industrielle.

Son livre conseille « les produits les moins pires », y compris parmi les frites, les mayonnaises ou les conserves de cassoulet. « Aujourd’hui, on ne doit pas être dans le déni, et faire croire que tout le monde va faire mijoter son pot-au-feu. On passe moins de temps en cuisine, et il faut des conseils qui correspondent aux modes de vie des parents qui travaillent, ou des adolescents qui se posent des questions », a-t-il expliqué à l’AFP.

Les causes du cancer

Reste une énigme: ce qui provoque ces cancers. Les scientifiques ont fait état de 2 228 cas, dont 108 mortels et 739 du sein, sur la période et la population étudiées. Les « hypothèses » des chercheurs les portent vers « la qualité nutritionnelle généralement plus faible » de ces produits, trop gras, trop caloriques et/ou trop salés, et « la vaste gamme d’additifs » qu’ils contiennent. Par ailleurs, « la transformation des aliments et en particulier leur cuisson produisent des contaminants nouvellement formés », et leur emballage plastique peut contenir du bisphénol A, un perturbateur endocrinien, s’inquiètent-ils. Dans un éditorial, le BMJ a souligné que l’étude ne proposait qu’une première observation, qui « mérite une exploration attentive et plus poussée ».

La revue cite d’autres facteurs qui peuvent entrer en jeu, car « par exemple, le tabagisme et une activité physique faible étaient bien plus répandus chez les participants qui consommaient une plus grande proportion d’aliments ultra-transformés ».

Ce terme même reste « peu utilisé par les scientifiques de la nutrition », a relevé un professeur en diététique du King’s College de Londres, Tom Sanders. Cité par Science Media Centre, il estime que « cette classification semble arbitraire et fondée sur le postulat que les aliments traités industriellement ont une composition nutritionnelle et chimique différente de ceux produits à la maison ou par des artisans. Ce n’est pas le cas ».