Lauréat 2019, Serge Mbay tire les leçons du forum d’Abuja

DR SERGE Mbay Kabway est un battant. Il dit « avoir remué ciel et terre » pour participer à la 5è édition du Forum entrepreneurial annuel que la Fondation Tony Elumelu (TEF) a organisée du 25 au 27 juillet à Abuja au Nigeria. « Je n’ai pas malheureusement été pris en charge comme les 55 autres entrepreneurs »,  souligne Serge Mbay. En effet, ces derniers, pour la plupart venus de provinces, ont sollicité et obtenu l’assistance ou l’appui de la présidence de la République pour la prise en charge intégrale de leur séjour, à savoir billet d’avion, frais d’hôtel et autres. « L’essentiel, après tout, demeure la représentation affirmée de la République démocratique du Congo à cette 5è édition du Forum entrepreneurial de la Fondation Tony Elumelu », nous dit-il.

L’avenir, c’est aujourd’hui

Quand on lui demande quels enseignements il a retenus de l’édition 2019 du forum entrepreneurial Tony Elumelu, Serge Mbay répond vite que les leçons à tirer sont nombreuses. D’abord, l’avenir de l’Afrique, c’est aujourd’hui : « J’ai rencontré des jeunes entrepreneurs ressortissants de 54 pays d’Afrique, d’un dynamisme féroce qui me pousse à croire que le processus de redressement de l’Afrique est déjà déclenché. » Serge Mbay dit faire allusion à des jeunes qui croient à d’autres possibles en Afrique, déterminés au point qu’il ne voit pas ce qui pourrait les arrêter. 

D’après lui, « leurs innovations fascinantes s’érigent en un tsunami emportant au passage les montagnes de pauvreté, les décennies de retard technologique, les sombres nuages d’ignorance, les barrières et clivages divers… » Bref, des fervents adeptes de l’interconnexion technologique et du libre-échange africains. Cela prouve à suffisance, souligne-t-il, la rigueur et la qualité de la sélection menée par la Fondation Tony Elumelu. D’ailleurs, rappelle Serge Mbay, Akinwumi Adesina, le président de la Banque africaine de développement (BAD), est conscient de cette réalité, quand il a déclaré : « Cessons de renvoyer dans le futur l’avenir de notre jeunesse !… Nous devons opérer un shift qui consiste à passer du renforcement des capacités des jeunes entrepreneurs africains au financement des investissements de ces derniers. »

Ce qui fait encore dire Serge Mbay que la RDC, notre pays, doit bien intérioriser le principe du libre-échange commercial qu’elle a ratifié et en être très conséquent. « Autrement dit, nous devons nous préparer sérieusement quant aux conditions, aux facilités du Doing Business, d’abord pour les investisseurs nationaux, avant de penser ensuite aux étrangers qui sont les bienvenus, en ce qui concerne la normalisation, la métrologie et la certification, l’accès au financement, la protection légale  des entrepreneurs locaux, le renforcement des capacités face à l’inéluctable question de la compétitivité, la sécurité des biens et des personnes », insiste-t-il. 

Sinon ? « Sinon l’imminente ouverture des frontières commerciales ne fera qu’élargir le fossé des inégalités et renforcer le vieux démon de la frustration », pense-t-il. Convaincu qu’il est que « le futur que nous souhaitons est un futur que nous devons bâtir », comme pour paraphraser Tony O. Elumelu, le fondateur de la doctrine de l’africapitalisme. « En des termes simples, la destinée de l’Afrique se trouve entre les mains de ses fils et ses filles. Le Forum entrepreneurial de la TEF auquel j’ai participé défend le principe que le secteur privé africain a un rôle à jouer dans la transformation de l’économie de notre continent », renchérit-il. 

Le rôle du secteur privé

Et d’ajouter : « Les Africains ne pourront profiter de leurs ressources naturelles et de leur capital humain que grâce à des investissements à long terme dans des secteurs stratégiques. C’est en résumé le concept de l’africanisme qui prône une approche plus audacieuse du secteur privé africain dans la protection et la promotion de ses propres intérêts. »

Selon Serge Mbay, la prospérité économique et la notoriété d’un individu doivent constituer des créneaux efficaces pour atteindre une plus large audience et l’impacter positivement : « C’est impressionnant que les dizaines de personnalités de marque et célébrités, les milliers de brillants entrepreneurs réunis pendant trois jours soient des invités de Tony O. Elumelu au travers de sa fondation, plutôt que de l’État nigérian. Tony m’a paru plus heureux de mener une multitude de personnes à la réalisation de leurs rêves que grâce à son immense fortune. »

Un projet participatif

Qu’est-ce qui fait que le projet de Serge Mbay ait particulièrement retenu l’attention de la Fondation Tony Elumelu ? Il faut dire tout d’abord que le Programme d’entrepreneuriat TEF est l’un des plus ambitieux au monde et est le plus large réseau d’affaires en Afrique. Il a été institué il y a 5 ans par la TEF qui a investi 100 millions de dollars sur une période de 10 ans, dans le but de sélectionner, former, mentorer et apporter un capital de départ ou de renfort non remboursable de 5 000 dollars à 10 000 entreprises africaines. 

« Les critères de choix restent très sélectifs, entre autres la capacité de réalisation et d’expansion du projet, l’ouverture du marché au produit ou service, les expériences entrepreneuriales, la potentialité liée au leadership, la compréhension financière et la capacité de croissance du produit ou service », rappelle-t-il. En effet, chaque année, la TEF ouvre les candidatures de sélection de 1 000 entrepreneurs africains, pour participer au programme d’entrepreneuriat TEF qu’elle organise. Cette année, près de 200 000 candidatures ont été réceptionnées, et de la RDC, 102 jeunes entrepreneurs ont été retenus ou sélectionnés.

Alors, explique Serge Mbay, le projet Bilanga Ya Betu (BYB) est une invitation aux élites, aux professionnels et aux citadins congolais à la prise de leurs responsabilités, s’agissant du déploiement de l’immense potentiel agricole de la RDC. « C’est un projet participatif qui a un impact réel tant sur les communautés urbaines que rurales, qui prend en compte sans distinction les hommes, les femmes et les jeunes. Sans tout attendre des pouvoirs publics, c’est une initiative d’auto-prise en charge et d’autofinancement destinée à générer de multiples opportunités pour tous, la recherche de l’intérêt collectif étant une de ses particularités. C’est par ailleurs un modèle économique reproductible sur l’ensemble du territoire national, pourquoi pas dans d’autres pays africains », déclare-t-il.