Le contexte international est très délicat pour le pétrole

À New York, les cours de l’or noir ont clôturé en ordre dispersé jeudi 14 mars, tiraillés entre les inquiétudes liées aux économies chinoise et britannique, et un rapport américain sur les stocks favorable la veille.

LE BARIL de Brent de la mer du Nord pour livraison en mai a fini à 67,23 dollars jeudi 14 mars à Londres, en baisse de 32 cents par rapport à la clôture de mercredi. À New York, le baril de WTI (West Texas Intermediate) pour le contrat d’avril a gagné 35 cents à 58,61 dollars. « Le cours du Brent est souvent plus réactif à l’actualité internationale tandis que le WTI réagit aux données économiques des États-Unis », a observé John Kilduff d’Again Capital. « Nous observons le retour des inquiétudes économiques en Chine et de la situation actuelle sur le Brexit comme motifs d’inquiétude qui se transmettent au cours du Brent », a ajouté ce spécialiste. Le cours du pétrole recule car ces situations font craindre une croissance moins soutenue et donc une demande moins élevée en brut à l’avenir.

S’agissant de la Chine, la production industrielle s’est tassée sur les deux premiers mois de 2019. Concernant le Brexit, l’avenir s’annonce flou pour le Royaume-Uni malgré l’approbation la semaine dernière par les députés d’une motion prévoyant un report de la sortie de l’Union européenne (UE). Le cours du Brent peinait également à reprendre le chemin de la hausse alors que selon l’agence Bloomberg, la rencontre entre Donald Trump, le président américain et Xi Jinping, son homologue chinois, a été repoussée au mois d’avril au plus tôt.

« Le marché espérait, peut-être un peu naïvement, qu’une forme d’accord serait trouvée à court terme » concernant la guerre commerciale, a expliqué Chris Beauchamp, analyste pour IG.

Le pétrole coté à New York a de son côté été soutenu par un rapport publié la veille par l’Agence américaine d’information sur l’énergie (EIA) sur les stocks américains. Les réserves américaines de brut ont reculé de 3,9 millions de barils la semaine dernière, selon ce rapport. « La chute des exportations vénézuéliennes a eu un effet direct sur les stocks américains », a estimé Tamas Varga, analyste de PVM. Le Venezuela, comme l’Iran, subit des sanctions des États-Unis qui empêchent une partie de la production de ces pays de rejoindre le marché mondial.

Le rapport mensuel de l’OPEP

Dans son rapport mensuel publié jeudi 14 mars, l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) a baissé sa prévision de demande mondiale pour ses bruts cette année, tout en préparant le terrain à une prolongation de son accord d’encadrement de la production, qui soutient les cours depuis le début de l’année. L’ouverture hésitante de Wall Street et des statistiques décevantes en Chine ont aussi pesé sur la tendance après la forte hausse de la veille en réaction à l’annonce d’une baisse surprise des stocks aux États-Unis.

« Après la belle séance de mercredi, le marché voulait probablement plus de certitudes pour atteindre le palier suivant et il ne les a pas », commente Phil Flynn, analyste chez Price Futures Group à Chicago. « Le marché boursier ne les apporte pas et ce n’est pas non plus le cas du rapport de l’OPEP, qui a du bon et du moins bon ». Les cours du pétrole divergeaient donc en cours d’échanges européens, proches de leur plus haut en quatre mois alors que les investisseurs s’inquiètent des perturbations de la production dans plusieurs pays, notamment en Iran et au Venezuela.

« La chute des exportations vénézuéliennes a eu un effet direct sur les stocks américains », a estimé Tamas Varga, analyste de PVM. Au même moment, les autres membres de l’OPEP continuent de limiter volontairement leurs extractions. La production totale de l’OPEP a encore reculé de 221 000 barils par jour à 30,549 millions de barils par jour (mbj) en février, selon des sources secondaires (indirectes) citées par l’organisation dans son rapport mensuel. Plus de la moitié de cette baisse est attribuable au Venezuela, où la production a chuté de 142 000 barils par jour par rapport à janvier.

La pression américaine

Des cours élevés sont bons pour les exportateurs mais pas pour Donald Trump, le président américain, qui a clairement indiqué qu’il voulait que les prix de l’essence restent bas. La pression de la Maison Blanche avait joué sur la décision de l’OPEP, mi-2018, d’assouplir son accord de baisse de production, ce qui avait participé à la dégringolade des cours au deuxième semestre et à un nouveau durcissement des objectifs de production en décembre.

Dans l’ensemble, les perspectives pour le pétrole sont encourageantes (…) en raison de la baisse du nombre de puits en activité en Amérique du Nord et des espoirs que la Chine augmente sa demande pour approvisionner ses projets d’infrastructures. Toute baisse du dollar rend en outre le baril, libellé en billet vert, plus attractif pour les investisseurs munis d’autres devises, ce qui augmente la demande et pousse les cours vers le haut. Si on ajoute à cette situation les efforts importants effectués par l’OPEP (pour réduire son offre) et la chute continue de la production au Venezuela, certains courtiers commencent à devenir un peu nerveux et à se demander si l’offre peut continuer à répondre à la demande. D’autres analystes s’inquiètent de voir les exportations iraniennes, elles aussi sous le coup de sanctions de Washington, diminuer de nouveau. Mike Pompeo, le secrétaire d’État américain, a réaffirmé que les États-Unis voulaient réduire les exportations iraniennes à zéro aussi vite que possible, précisant que son équipe travaillait à faciliter les exportations de pétrole à partir des États-Unis, a rapporté l’agence Bloomberg. « L’administration américaine ne s’embarrasse pas de débats sur la qualité du pétrole et semble penser que le monde peut facilement remplacer le brut lourd du Venezuela et de l’Iran avec les pétroles légers des États-Unis », a cependant souligné Olivier Jakob, analyste chez Petromatrix.