Le FONER recourt à la DGI pour rentrer dans ses droits

Près de 30 millions de dollars échappent encore au Fonds d’entretien routien. C’est ce que lui doivent des usagers de la route. Pour les recouvrer, la coopération du fisc est plus que nécessaire.  

 

Le directeur général de la Direction générale des impôts (DGI), José Sele Yalaghuli, et son homologue du Fonds d’entretien routier (FONER), Fulgence Bamaros Lobota, ont signé le 23 avril un accord de collaboration à travers lequel l’Hôtel des impôts s’engage à percevoir la redevance routière auprès des transporteurs pour le compte du Fonds national d’entretien routier. Ce n’est pas une première parce que le FONER a déjà conclu ce genre d’accord avec le Service des entreprises pétrolières (SEP), la Société congolaise des industries de raffinerie (SOCIR) ou encore avec la Direction générale des douanes et accises (DGDA). 

Fonds spéciaux 

Les assignations du FONER pour l’exercice 2018 se chiffrent à quelque 264 322 050 741 francs, soit 145 760 478 dollars au taux budgétaire de 1 913.4 francs le dollar. Le FONER fait partie de huit fonds spéciaux qui émargent au budget de l’État, aux côtés de la Régie des voies aériennes (RVA) avec le Go Pass, du Fonds de promotion de l’éducation (FPEN), du Fonds de promotion culturelle (FPC), du Fonds de promotion de l’industrie (FPI), du Fonds de contrepartie, du Fonds forestier national (FFN) et de l’Office de promotion des petites et moyennes entreprises (OPEC) et dont la principale caractéristique est la non-atteinte de leurs prévisions budgétaires. 

En 2017, le FONER aurait dû rapporter au moins 170 milliards de francs (169 950 935 145) au Trésor public. Selon des chiffres disponibles au ministère du Budget, les recettes réalisées par le FONER, en dépit des accords de perception des taxes et redevances convenues avec SEP, SOCIR, DGDA, etc., n’ont guère dépassé les 70 % des assignations. Toutefois, l’on a noté une amélioration des réalisations de plus de 50 milliards de francs par rapport à l’exercice 2016, soit quelque 168 535 737 415 francs collectés, d’après le ministère du Budget. 

Pour autant, l’établissement public va de mal en pis. Déjà du temps où il était ministre en charge notamment des Infrastructures et des Travaux publics, Fridolin Kasweshi, avait dû subir, plus d’une fois, l’effet des questions orales avec débat sur la collecte et la gestion des recettes du FONER sans que le DG du FONER ne fît interpellé par l’une ou l’autre chambre du Parlement. 

Présomption de malversations  

Les recettes du FONER en 2016 étaient de 100 839 896 353 francs sur des prévisions de 113 860 573 845 francs. Début 2018, à la faveur d’une question orale avec débat lui posée par le député UDPS Serge Mayamba, le ministre des Infrastructures, des Travaux publics et de la Reconstruction (ITPR), Thomas Luhaka Losondjela, avait relevé une déplorable « disparité » entre les statistiques de la SOCIR et celles de la DGDA chargées de collecter les ressources pour le compte du FONER au point d’entrée des produits pétroliers, notamment à Kinlau à Muanda, dans la province du Kongo-Central. 

Hélas, aucune enquête n’a suivi, par conséquent, point de sanction. Mi-2017 déjà, une mission du Sénat sur l’état des routes en République démocratique du Congo avait conclu son rapport à la tenue d’un audit financier et comptable du FONER. Mais le président de la Chambre des sages, Léon Kengo wa Dondo, s’y était fermement opposé au motif qu’il n’est pas que le Sénat qui doit mener des audits en RDC. Des sources bien renseignées rapportent qu’un proche du président du Sénat serait dans le staff dirigeant du FONER.

Produits pétroliers 

Lors de l’examen de la loi de finances publiques 2018, la commission économico-financière et de contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale avait dressé un état des lieux peu flatteur du FONER, à tel point qu’il ne pourrait guère remplir ses missions régaliennes… à moins que l’État ne s’implique dans la maximisation des recettes de cet établissement public. Qui passe pourtant dans l’opinion comme une structure d’enrichissement facile et incapable d’assurer ses missions régaliennes. La redevance sur les produits pétroliers terrestres rapporte, on le sait, plus de 95 % des ressources financières au FONER. 

Mais voilà que l’État a unilatéralement allongé le délai de paiement de 8 à 180 jours à COBIL SA, l’une des grandes entreprises pétrolières du pays. Cependant le FONER tire également ses ressources des droits de péage, sur les charges à l’essieu ainsi que des pénalités diverses comme les allocations budgétaires, les dons, les legs et les contributions des bailleurs de fonds. Mais quand le gouvernement s’en mêle, le FONER ne trouve pas son compte. La créance du FONER sur l’État avoisine les 30 millions de dollars. Le gouvernement n’a même pas prévu l’amorce d’un paiement même à long terme dans son Cadre budgétaire à moyen terme 2018-2020. 

Bien au contraire, l’établissement public ne bénéficie même pas du soutien du gouvernement pour recouvrer l’argent que ses redevables versent à la Caisse d’épargne du Congo (CADECO). Aux dernières estimations, la CADECO garde par devers elle quelque 4 millions de dollars du FONER. Le DG du FONER, Fulgence Bamaros Lobota, n’a guère reçu l’appui de l’État pour récupérer environ 10 millions de dollars qui ont été bloqués dans deux banques en liquidation à savoir la Banque congolaise (BC), soit 6 000 000 dollars, et plus de 3 500 000 dollars à la BIAC. Créé en 2008, le FONER collecte des fonds pour financer les travaux d’entretien des infrastructures, exécutés par les structures pérennes, à savoir l’Office des routes (OR), l’Office des voiries et drainage (OVD) et la Direction générale des voies de desserte agricole.