Le gouvernement relance le projet de l’usine de la province de la Tshopo

Elle ne s’appellera plus Cimenterie de la Province-Orientale, découpage territorial oblige, ni Cimenterie de la Maïko, mais bien CIMASAT. L’exécutif a mis la main à la poche pour sa réalisation. 

 

Les travaux de construction de la CIMASAT vont bientôt démarrer, selon des sources gouvernementales. Cette usine sera implantée dans la nouvelle province de la Tshopo, issue du démembrement de l’ancienne Province-Orientale. L’information est confirmée par le ministre de l’Industrie, Marcel Ilunga Leu. Il ajoute même que la CIMASAT, qui est la fusion de l’ancienne Cimenterie de Maïko et la firme Satarem, sera financée dans le cadre d’un nouveau projet. Sans fournir davantage d’explications. Le ministre de l’Industrie répondait le 13 juin devant l’Assemblée nationale à la question orale avec débat du député Alphonse Awenze Makiaba  sur la situation actuelle de la Cimenterie de Maïko. Ilunga Leu a dit avoir fait sauter les obstacles qui entravaient la mise en œuvre de cette cimenterie.

Désormais la cimenterie a une existence juridique, son comité d’opérationnalisation redynamisé et les demandes des titres miniers effectuées. Déjà une invitation en bonne et due a été lancée à  la firme Satarem, et la convention de financement a été signée entre le gouvernement, le Fonds de promotion industrielle (FPI) et l’Office des routes.

Une promesse du chef de l’État 

Mais quid du matériel importé, voilà plus de 10 ans, pour l’ancien projet de la Cimenterie de la Province-Orientale ? Ilunga Leu a fait comprendre que ce matériel existe et qu’un point focal de coordination est en place dans la nouvelle province de la Tshopo. Une partie du matériel est entreposée à Kinshasa. Ce matériel, a-t-il poursuivi, va être affecté à un autre projet de même nature dans une autre partie du pays à déterminer. Le ministre de l’Industrie n’a pas cependant indiqué la capacité de production de la CIMASAT. Dans le projet initial dont le président Joseph Kabila Kabange a posé la première pierre de la construction lors d’une cérémonie haute en couleurs, la capacité installée de la cimenterie devrait être de 150 000 tonnes de ciment gris l’an.

Toutefois, pour Ilunga Leu, son projet ne relève pas d’une démarche politicienne mais, bien au contraire, il s’agit d’un projet concret visant à créer des emplois directs et indirects, à réduire le coût du sac de ciment gris sur le marché de Kisangani et de ses alentours, et à booster la « Révolution de la modernité » dans l’Est du pays. « Il est une réponse à la promesse du chef de l’État, Joseph Kabila Kabange, à la population de l’ancienne Province-Orientale et s’avère un ordre à exécuter… », a-t-il renchéri.

Et CINAT dans tout ça ? 

Rien à signaler, hélas, quant à la reprise de la Cimenterie nationale de Kimpese (CINAT), dans le Kongo-Central. Pourtant, le ministre de l’Industrie qui a été reconduit dans l’équipe gouvernementale actuelle, avait du temps du cabinet Badibanga, ficelé un rapport complet sur la situation de la CINAT. Le directeur général  de la Cimenterie de Lukala (CILU), Ola Ora, a, par contre, annoncé, début avril, l’arrêt de la production du ciment gris. Cette décision, à en croire le DG de CILU, est prise à cause d’une concurrence déloyale dont elle fait face depuis décembre 2015. La CILU tourne à ce jour à moins de 50 % de sa capacité installée. L’arrêt du four s’est naturellement accompagné d’une période de congé technique pour 92 agents sur les 350 employés permanents.

Cette disposition, a-t-il fait remarquer, reste en vigueur  jusqu’à la normalisation de la situation sur le marché, a fait comprendre le DG de la CILU. Ola Ola a indiqué que même la sous-traitance est aussi affectée par cette déconfiture. La balle se trouve dans le camp des autorités du pays, a-t-il laissé entendre, pour  prendre des décisions qui s’imposent en vue de sauver la CILU.

En février, le gouvernement a donné des assurances aux responsables de trois nouvelles unités de production de ciment gris du territoire de Songololo, Nyumba ya Kiba, PPC Barnet et CIMKO, quant aux mesures d’accompagnement pour écouler leur production sur le marché local envahi par des importations turques, chinoises… Ces entreprises sollicitent en effet la suspension des importations du ciment pour une durée de six mois, le renforcement des mesures de lutte contre la fraude, les allègements fiscaux ainsi qu’un accompagnement consécutif en termes de logistique, afin de permettre une bonne distribution de leur production. Leny Ilondo, administrateur de PPC Barnet, a indiqué que le secteur de la cimenterie locale est victime des fraudes continues qui ruinent tous les efforts du gouvernement dans cet investissement consenti pour produire un ciment de meilleure qualité et à un prix extrêmement compétitif.

Le gouvernement avait pourtant, en 2015, conditionné l’importation du ciment gris en RDC par la détention d’un contrat-programme signé entre l’opérateur économique intéressé par l’activité et le ministère de l’Économie nationale. Le ministre chargé de l’Économie, à l’époque, Modeste Bahati Lukwebo, avait expliqué, en son temps, que cette mesure avait été prise pour lutter contre la fraude sur les importations du ciment gris. À l’en croire, cette fraude préjudiciait le climat des affaires et l’essor économique du pays. Par ailleurs, selon les chiffres officiels, le besoin en ciment gris en RDC est estimé à environ 3 millions de tonnes par an alors que la production locale annuelle ne dépasse pas 500 000 tonnes. Pour combler ce grand écart, plusieurs partenariats public-privé ont été signés. Après les élections de 2006, le gouvernement avait décidé d’exonérer les importations de ciment gris pour soutenir le programme de construction des infrastructures connu sous l’appellation « 5 chantiers ». Mais certaines de ces entreprises bénéficiaires de ces partenariats ont profité de ces exonérations pour importer du ciment destiné à la commercialisation.

Industries structurantes

Pour le gouvernement, le développement des industries de transformation, en particulier dans les secteurs de l’agro-industrie et de la transformation des produits primaires, et des industries structurantes ou industrialisantes, constitue le socle du progrès social et économique de la RDC. La stratégie de développement du secteur industriel est principalement axée sur la création des Zones économiques spéciales (ZES), dans lesquelles seront installées, en fonction des spécificités propres à chaque région (disponibilité des matières premières, qualification de la main-d’œuvre…), des industries de transformation et/ou des industries structurantes. L’avantage de créer ces ZES se justifie par trois facteurs : la nécessité de rééquilibrer le développement du pays, l’attrait facile des capitaux et des technologies avancées du fait des avantages y associés (mini climat propice aux affaires), et l’intégration de l’économie congolaise dans la dynamique régionale et internationale des échanges.

Le programme gouvernemental propose de créer 5 ZES : la Zone Ouest, autour de l’axe Kinshasa-Inga-Matadi-Banana, pour le développement des activités stratégiques concentrées sur l’hydroélectricité, le pétrole, la bauxite et les industries manufacturières autour des ports maritimes de Matadi, Boma et Banana. La Zone Centre, autour de l’axe Ilebo-Tshikapa-Kananga-Mbuji-Mayi, pour le développement de la logistique de transport et des industries agro alimentaires. La Zone Sud, autour de l’axe Kolwezi-Likasi-Lubumbashi-Sakania, pour le développement de industries lourdes et manufacturières axées sur le cuivre, le cobalt et autres. La Zone Est, autour de l’axe Uvira-Bukavu-Goma-Beni-Bunia, pour le développement des industries manufacturières et agro-alimentaires. La Zone Nord-Ouest, autour de l’axe Kisangani-Bumba-Mbandaka, pour le développement des industries du bois et de l’agriculture.

Le programme gouvernemental propose aussi de développer et/ou de renforcer les industries structurantes existantes et à créer. Un accent particulier est mis sur les industries structurantes qui soutiennent en amont le processus de reconstruction. Il s’agit particulièrement de l’industrie de ciment, en vue d’accroître l’offre de ciment pour la reconstruction et le développement des infrastructures ; l’industrie du bois, pour accroître la valeur ajoutée du bois actuellement exportés et contribués à satisfaire la demande locale ; l’industrie du cuivre, en vue de produire les câbles électriques et le matériel de construction ; l’industrie de l’acier, dans le but de promouvoir la production de l’acier et des matériaux mécaniques ; l’industrie de sable siliceux, en vue de produire des verres plats, panneaux solaires, des composants et appareils électroniques,  l’industrie de construction des routes et des ouvrages afin de promouvoir la production des matériaux de construction et la construction des routes, ponts, chaussés, barrages et autres ; l’industrie de construction ferroviaire, dans le but de promouvoir la construction des voies et véhicules ferroviaires. Enfin, il convient d’assurer la distribution des produits de base, notamment le carburant et le ciment gris à l’intérieur du pays.