Le nouveau code minier a été voté mais on s’attend à la réaction des miniers

La révision du code minier a été soumise au Parlement depuis plusieurs années. La nouvelle loi adoptée à l’Assemblée prévoit l’augmentation des impôts et des redevances dus à l’État par les compagnies minières. Seulement voilà, elle n’est pas du goût des groupes miniers présents en RDC, dont certaines menacent de se désengager.

 

L’Assemblée nationale a finalement voté la nouvelle loi modifiant et complétant la loi n° 007/2002 du 11 juillet 2002 ou le code minier. Après des divergences entre les deux Chambres dans l’adoption de la nouvelle loi, une commission paritaire s’est penchée sur le texte avant que l’Assemblée nationale n’en adopte la mouture définitive. La loi votée attend d’être promulguée par le chef de l’État, Joseph Kabila Kabange, pour entrer en vigueur. Le débat parlementaire sur la révision du code minier a été relancé lors de la session parlementaire ordinaire de mars 2017. Adopté par le gouvernement, le projet de loi a été transmis au Parlement en mars 2015.

La révision du code minier a été motivée comme une « impérieuse nécessité », pour que la République démocratique du Congo se hisse au diapason du taux de croissance du produit intérieur brut (PIB) en Afrique subsaharienne (22 % contre moins de 13 % actuellement, soit l’un des taux les plus bas de la région). Dans son message à la nation, le 5 avril 2017, le président de la République a donné une instruction ferme à l’Assemblée nationale et au Sénat, après quatre années de tergiversations sur le dossier. Lui qui veut doter le pays des lois sur les marchés publics, les partenariats public-privé (PPP), la sous-traitance, la fiscalité, les mines … Bref, doter le pays d’un arsenal de textes législatifs et juridiques en vue de l’émergence économique, surtout des classes moyennes.

À propos du code minier, il y a deux ans, le Parlement a cédé aux pressions de la Fédération des entreprises du Congo (FEC), qui prophétisait une « apocalypse financière », en cas de révision. Pour Joseph Kabila, le code minier devait être amendé pendant la session parlementaire d’avril 2017, notamment dans ses volets relatifs aux régimes fiscal et de change…

Pourquoi réformer le code minier ?

En 2015, le président de l’Assemblée nationale, Aubin Minaku Ndjalandjoku, avait annoncé que la question allait être débattue au cours de la session d’avril de cette année-là. Mais le débat n’avait jamais eu lieu, tant les divergences et les intérêts en jeu étaient diamétralement opposés. Selon des observateurs, le projet de réforme déposé au Parlement n’était pas du goût de la société civile et des miniers. Dans la situation actuelle, les recettes minières de la RDC sont minorées, du fait du régime fiscal minier de faveur accordé aux compagnies minières. Le vrai débat, c’était de trouver un juste milieu pour accroître les recettes fiscales provenant du secteur minier et sans décourager les investisseurs. Selon une étude de la Banque mondiale, le choc des matières premières a mis à nu les faiblesses dans la gestion du secteur minier en RDC et mis en évidence la nécessité de réformer le code qui le régit. C’est donc à la demande du gouvernement, via les ministres des Mines, Martin Kabwelulu, et des Finances, Henri Yav Mulang, que la Banque mondiale a préparé une note examinant à la fois le code minier de 2002 et les propositions de révision et au regard des aspects suivants : l’organisation du secteur, le régime fiscal, la gouvernance et le « contenu local ».

La note se basait sur des comparaisons, sur l’expérience d’autres pays et sur des analyses spécifiques à la RDC. Elle souligne également l’importance d’engager le débat parlementaire sur les propositions de révision du code. Enfin, elle fournit des commentaires et des options qui pourraient éclairer sur certaines améliorations desdites propositions, au cas où cela s’avérait nécessaire lors du débat parlementaire.

Les révisions précisent la définition des coopératives minières, simplifient la carte artisanale, réorganisent le permis de petite mine et clarifient la définition de zones artisanales. Ces mesures bénéficieraient d’un meilleur alignement sur les bonnes pratiques observées en Afrique. De plus, le cadre juridique aurait dû s’appuyer sur un modèle économique conciliant le souci de rentabilité des investisseurs avec l’objectif d’une gestion des ressources naturelles favorable au développement. Aussi, il faudrait développer l’information géologique et consolider les fonctions des institutions en charge de sa production.

Les révisions rendraient la fiscalité minière plus progressive, conformément aux recommandations internationales. Les propositions d’augmentation des redevances et impôts s’inscrivent parmi les niveaux constatés en Afrique subsaharienne. L’alignement de l’amortissement aux règles du code général des impôts n’est pas inhabituel, de même pour la réduction de la durée de la garantie de stabilité fiscale. La création d’un impôt spécifique sur la rente de ressources naturelles est en principe bonne, mais sa formulation n’est pas claire.

Question de gouvernance 

Les révisions fixent des critères aux sous-traitants pour l’obtention d’une exemption fiscale. Aussi, les révisions mentionnent l’Agence nationale pour l’environnement comme agence de contrôle et précisent davantage les attributions du ministre des Mines. La transparence des contrats est mentionnée. Les révisions devraient renforcer le rôle de contrôle du Parlement et de la Cour des comptes, et intégrer les normes ITIE (Initiative pour la transparence dans les industries extractives) dans le cadre juridique. Le suivi des contrats pourrait être renforcé et couvrir leur exécution tout au long de la chaîne de valeur de l’industrie extractive. La législation minière actuelle aurait dû se baser sur une politique minière définissant le rôle du secteur dans la stratégie de développement de la RDC.

La politique de promotion du « contenu local » doit focaliser sur l’amélioration de l’environnement des affaires. Or, les politiques retenues dans le code et les révisions tendent à promouvoir l’obligation de participation locale. Il serait mieux de renforcer les liens en amont et en aval et le transfert de connaissances et de technologies. L’obligation de garder 40 % des devises étrangères en RDC est difficile à mettre en place. En effet, les dispositions fiscales révisées devraient permettre d’atteindre le niveau désiré de recouvrement de devises. Les révisions développent la question de la responsabilité sociale des entreprises, mais il faudrait préciser les engagements en la matière afin qu’ils bénéficient aux populations locales. Ces engagements ne peuvent remplacer les recettes et les dépenses publiques.

L’approche gagnant-gagnant

Le ministre des Mines qui a défendu ce projet de loi au Parlement a indiqué que la nouvelle loi profitera à tous les acteurs, contrairement à celle de juillet 2002 qui se voulait   « incitative et attractive ». Le nouveau texte comporte de grandes innovations et de nouvelles orientations. Plusieurs autres innovations sont apportées et touchent six domaines d’intervention, à savoir la gestion des titres miniers et du domaine minier, la responsabilité sociétale et environnementale, la transparence et la bonne gouvernance, le régime fiscal et douanier et la conformité par rapport à la constitution de la République démocratique du Congo.

Dans le nouveau code minier, on ne parle plus d’octroi des droits miniers aux personnes physiques. Tout exploitant artisanal, à l’exception des mineurs et des femmes enceintes, doit appartenir désormais à une corporation. Un cahier de charges sera aussi exigé à toute entreprise minière dans le cadre de sa responsabilité sociale et environnementale. Les personnes ayant subi des préjudices dans l’exercice de leurs fonctions doivent être indemnisées et cela doit être clairement mentionné dans le cahier de charges. La nouvelle loi supprime par ailleurs les exonérations après cinq ans d’activité. Par ailleurs, les entreprises minières devraient payer 5 % d’amende si elles ne rapatriaient pas, dans le temps, les 40 % de leurs revenus. Par ailleurs, certaines matières premières devraient être considérées comme « stratégiques ».