Le projet de loi approuvé au Parlement

Le Sénat a voté à l’unanimité la nouvelle loi sur les principes fondamentaux du tourisme en RDC. Ce texte de 57 articles vient doter le pays d’un cadre légal cohérent, régentant l’ensemble de l’activité du tourisme, pour sa promotion et son développement.

 

L’adoption d’une nouvelle loi sur le tourisme est historique. L’État réaffirme par là sa volonté de réhabiliter un secteur stratégique de développement, à même de contribuer à l’accroissement de ses ressources, à la création des emplois et à la lutte contre la pauvreté. Bref, cette loi va booster la promotion du tourisme dans le pays et à l’extérieur. Comme innovations, elle vient d’intégrer les instruments juridiques internationaux ratifiés par la République démocratique du Congo, établir les domaines de collaboration en matière du tourisme entre le pouvoir central et les provinces, etc. Elle donne aussi des orientations sur les mesures de facilitation à prendre par le gouvernement pour moderniser et simplifier les formalités d’entrée, de séjour et de sortie.

L’OMT met le cap vers 2030

L’adoption de cette loi au Parlement intervient au moment où la 22è session de l’assemblée générale de l’OMT (11-16 septembre 2017) a pris d’importantes résolutions à Chengdu en Chine. C’est le meeting le plus important à l’échelle mondiale des hauts fonctionnaires du secteur et des représentants de haut niveau du secteur privé. Actuellement, on ne peut pas sous-estimer l’importance de la Chine comme moteur du développement touristique. Dans le monde, ce pays est non seulement le quatrième le plus visité mais il est aussi le premier marché émetteur. La Chine se classe par ailleurs dans le peloton de tête pour ce qui est du tourisme interne. Et les autorités chinoises fondent leur action dans ce domaine sur la conviction que le tourisme est un pilier stratégique de l’économie nationale et un instrument de développement efficace.

Après l’accord historique sur le Programme de développement durable à l’horizon 2030, l’année 2016 a été la première étape de planification et de mise en œuvre, dans les pays, des objectifs de développement durable. « Il ne sera possible de traduire les engagements en actions et en résultats que si le développement durable occupe une place centrale, et non plus périphérique, dans la prise de décision des organismes publics et privés », estime Taleb Rifai, secrétaire général de l’OMT. Les objectifs de développement durable de portée universelle fixent un nouveau cap. Dans ce contexte, le tourisme peut et doit jouer un rôle prépondérant pour assurer un meilleur avenir pour l’humanité et pour la planète.

En RDC, la relance des activités touristiques est à l’ordre du jour. Les opérateurs du secteur misent sur la loi-cadre, qui attend désormais promulgation. Pour le ministre du Tourisme, Franck Mwedi Malila Apenela, la loi-cadre est un texte qui vise la relance du secteur touristique en RDC, en régulant l’activité du tourisme, en vue de sa promotion et de son développement. Les sénateurs ont exprimé une préoccupation majeure, que la loi tienne compte de la protection de l’environnement et de la biodiversité. Ils ont estimé par ailleurs que les sites comme le marché des esclaves au Maniema, le lieu d’assassinat de Patrice Lumumba, les monuments aux soldats de la Force publique à Aru et Watsha, le mausolée du président Kasa-Vubu, les parcs nationaux (Salonga, Garamba…), la forêt des Mangroves à Moanda… doivent faire l’objet de beaucoup d’attention.

La nouveauté dans la loi-cadre consiste en fait en la clarification du mode de fonctionnement du secteur du tourisme. La loi se veut incitative, elle est assise sur la promotion de l’investissement et le développement du partenariat public-privé. Bref, elle projette le pays dans le tourisme durable, en réaffirmant le processus de décentralisation. Selon des sources ministérielles, la relance de ce secteur en RDC répond avant tout à la nécessité de diversification du tissu productif de l’économie nationale. Pour cela, il faut des fonds conséquents pour financer les activités.

C’est ainsi que la redynamisation du Fonds de promotion du tourisme (FPT) est à l’ordre du jour. L’assiette du FPT est constituée des redevances sur les prix de nuitée, repas et boissons. Le FPT recouvre aussi les redevances sur le prix de billet d’avion ainsi que sur le prix de moyen de transports terrestre (intérieur et extérieur), fluvial (intérieur et extérieur), lacustre et ferroviaire. La réaffectation de ce fonds au ministère du Tourisme permettra de réhabiliter le secteur devenu économiquement stratégique pour bon nombre de pays à travers le monde.

Mais pour y arriver, il y a des préalables. D’abord, il faudra redéfinir le statut même du FPT. À l’origine, le Fonds a fonctionné dans le cadre d’un service centralisé, conformément à l’ordonnance 83-182 du 28 septembre 1983. Elle fixe les mesures d’application du FPT. Puis, il a été affecté comme ressources de l’Office national du tourisme (ONT) en vertu de l’ordonnance 86-210 du 12 juillet 1986, portant sa création. Jusqu’en 2005, la mobilisation et le recouvrement des redevances ont été sujets à caution, donnant lieu à la confusion. C’est ainsi que la loi 05/008 du 31 mars 2005 est venue modifier la loi 04/015 du 16 juillet 2004, fixant nomenclature des actes générateurs de recettes administratives, judiciaires, dominicales et de participation ainsi que leurs modalités de perception. La loi de finances pour l’exercice 2005 a intégré le FPT dans le budget général de l’État, les budgets pour ordre étant supprimés.

Une erreur jamais assumée

En intégrant le FPT dans le budget général, le Parlement avait estimé que cela était une « erreur ». Malgré la mise au point du Parlement, relayée par le cabinet du président de la République, cette erreur n’a jamais été corrigée. La conséquence est que l’État s’est privé de ressources importantes générées par l’activité touristique, censées financer l’économie. Par exemple, le potentiel des redevances annuelles sur les billets d’avion (réseau international), pour le seul aéroport de N’Djili, représente quelque 15 millions de dollars, soit 13 millions pour le FPT et 2 millions pour la TVA.

Selon un rapport interne du secrétariat général au Tourisme, datant de 2015, le total global constaté, liquidé et ordonnancé a été évalué à plus au moins 2 millions de dollars. Quel manque à gagner pour le Trésor public ! C’est dire que l’État perd doublement des ressources importantes, parce que non collectées ou se volatilisent à travers des mécanismes de corruption. Avec la nouvelle loi-cadre, il est question de capitaliser les ressources importantes qui auraient pu être générées dans le cadre de l’opérationnalisation d’une politique.

À ce jour, le secteur de l’HORECA (hôtels, restaurants, casinos) compte 3 746 hôtels, toutes catégories confondues (1 à 5 étoiles) recensés, avec une capacité en chambres de 48 124 et en lits de 48 388. Les restaurants, toutes catégories confondues (de 1 à 4 fourchettes) sont au nombre de 894… En matière de sites touristiques, le pays compte plus de 964 rigoureusement identifiés. Une centaine d’agences de voyage (161 au total) et une vingtaine d’associations touristiques (24 au total) opèrent dans le pays. La nouvelle loi vise notamment à mettre en valeur le patrimoine touristique national, à développer le partenariat public-privé dans le tourisme et l’hôtellerie, diversifier les produits touristiques et améliorer la compétitivité. Partant du principe « un touriste génère plus de 10 emplois », la RDC devrait devenir la première destination touristique dans le monde, sinon en Afrique.

Les atouts de la RDC

On trouve en RDC toute une gamme variée d’attraits touristiques. Chaque province est en soi une destination touristique, présentant des particularités sous forme d’opportunités d’affaires. À travers le pays, on peut exploiter et développer plusieurs types de tourisme (balnéaire, culturel, loisirs, découverte, affaires, safaris…). En chiffres, le potentiel touristique est constitué des 25 millions d’ha, soit 10,47 % du territoire national, en aires protégés ; 7 parcs nationaux et 57 réserves et domaines de chasse, dont 5 figurent sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO. Il s’agit des parcs de Virunga, Kahuzi Biega, Garamba, Salonga, et de la réserve de faune à Okapi.

Il est également constitué des 4 espèces endémiques (gorilles de montagne, Okapis, Bonobos (chimpanzés nains), paons congolais ; d’une variété d’écosystème couvrant près de 145 millions d’ha, soit le second massif de forêts tropicales du monde après l’Amazonie et une des réserves de biodiversité de la planète. Il y a aussi des sites naturels, le fleuve Congo, le littoral Atlantique (37 km), les chutes impressionnantes, les lacs et leurs contours, les zones montagneuses de l’Est). Enfin, il y a des monuments, édifices religieux… Le partage des produits touristiques communs avec les pays frontaliers ainsi que le prolongement des destinations régionales sont autant d’opportunités pour accroître les marchés existants et entraîner de nouveaux marchés touristiques, dans les régions des Grands lacs, de la SADC, du COMESA et de la CEEAC dont la RDC fait partie.

En 2013, la RDC a révisé son plan directeur projeté sur 15 ans. Les objectifs à atteindre à terme : 1 146 962 touristes internationaux et 173 000 000 dollars, soit 10 % de la valeur du PIB en 2012. Pour générer ces flux, il faut promouvoir et préserver les espèces animales phares, réhabiliter les parcs nationaux, créer des niches écologiques, etc.