Le salon de Pékin sur fond de fortes sensations

 C’est confirmé. Après le scandale de Dieselgate, Volkswagen veut montrer les muscles. La nouvelle génération du Touareg se montrera publiquement fin avril en Chine. Mais le constructeur allemand l’a révélée jeudi 22 mars après avoir diffusé un dernier teaser pour la route.

 

Les rumeurs disaient donc vrai : la troisième génération du Volkswagen Touareg sera bel et bien présentée au salon de Pékin, qui ouvrira ses portes le 25 avril prochain. Mais le SUV de Wolfsbourg (le nouveau Touareg) a pris un peu d’avance sur l’événement en se révélant le jeudi 22 mars, présenté lors d’un grand lever de rideau. Néanmoins, on sait déjà presque tout du style du nouveau Volkswagen Touareg puisque le SUV allemand s’était fait surprendre par des paparazzi il y a quelques mois.

Le modèle définitif restera donc très proche du concept T-Prime GTE. Sur le plan technique, le nouveau Touareg reprendra la plate-forme MLB Evo notamment présente chez son cousin l’Audi Q7. Comme ce dernier, il devrait avoisiner les 5 m de long. Le V6 TDI du SUV aux anneaux devrait d’ailleurs se retrouver sous le capot du Touareg 3. Mais contrairement au Q7 qui mise sur un cœur Diesel pour sa version hybride rechargeable, le modèle de Wolfsbourg devrait opter pour un bloc essence. Un V6 100 % essence devrait en outre être proposé. « Dans son souci de faire oublier le scandale du « Dieselgate », Volkswagen fait de la surenchère sur l’électrique. En cultivant l’ambiguïté sur les véhicules électriques ou… électrifiés ».

Comment faire oublier le « Dieselgate » ? Telle est la rude tâche de Matthias Müller, président de Volkswagen depuis fin septembre 2015, juste après le déclenchement du fameux scandale. Du coup, le groupe allemand en rajoute dans le politico-idéologiquement correct et la surenchère. Lors de sa conférence de bilan annuelle mardi 13 mars, Matthias Müller, président du directoire du consortium, a encore renchéri sur l’électrique. Il a ainsi annoncé que, fin 2022, seize usines du consortium produiraient des voitures électriques. Il a affirmé également avoir choisi des fournisseurs de cellules de batteries en Europe et en Chine, 20 milliards d’euros de commandes prévisionnelles.

Avec 80 lancements, le roi du diesel vise pas moins de 3 millions de véhicules électriques annuels à horizon 2025. Dès 2019, il y aura un lancement de modèle zéro émission dans les douze marques tous les mois, promet-il. Ce n’est certes pas que de la communication, puisque les projets sont bel et bien engagés. Mais les chiffrages prévisionnels extrêmement optimistes font sourire maints experts industriels, pour le moins sceptiques. Volkswagen est lancé en effet avant tout dans une opération de séduction politique pour retrouver une virginité, bien entamée par les onze millions de logiciels faussant les tests d’anti-pollution.

Le groupe automobile allemand use notamment de certaines confusions – volontaires ? – sur l’électrique. Le 13 mars, le groupe a évoqué en effet des modèles « électriques », alors que, en septembre 2017, il parlait de 80 modèles « électrifiés ». Ce qui n’est pas du tout pareil. Les modèles électrifiés comprennent en effet des véhicules thermiques hybrides (essence ou diesel avec l’appoint d’un moteur électrique) ! En présentant son plan électrique « Roadmap E » à la rentrée dernière, Volkswagen tablait sur 30 hybrides rechargeables dans les 80 véhicules « électrifiés ».

D’ailleurs, le véhicule thermique conventionnel n’est pas mort, de l’aveu même de Matthias Müller. Le patron du premier constructeur mondial (en comptant les poids-lourds) affirmait vouloir encore investir 20 milliards d’euros dans les véhicules conventionnels sur cinq ans. En septembre dernier, le même Müller annonçait plus de 20 milliards d’euros dans l’électrique, mais d’ici à 2030 ! « Non seulement j’espère que le diesel n’est pas mort, mais je suis convaincu qu’il est en train de connaître une renaissance », a même affirmé l’ex-patron de Porsche, un passionné de belles autos rapides.

Il n’empêche. Malgré ces ambiguïtés, les constructeurs automobiles allemands sont quand même en tête des investissements dans les véhicules électriques et l’Allemagne est le premier pays destinataire des investissements mondiaux dans cette technologie, selon une étude d’EY dévoilée récemment à Francfort. Au cours des deux dernières années, les investissements dans la voiture électrique annoncés par les 16 plus grands groupes automobiles mondiaux ont atteint 3,2 milliards d’euros pour l’Allemagne, dépassant largement ceux concernant la Chine (990 millions d’euros), les États-Unis (887 millions d’euros) et la France (110 millions d’euros), d’après cette analyse.

Sur la même période, les constructeurs allemands ont annoncé pour 4,7 milliards d’euros d’investissements dans l’électrique dans le monde, nettement plus que les constructeurs américains (335 millions d’euros), français (110 millions d’euros) ou japonais (19 millions d’euros). « L’importance de la motorisation électrique va considérablement croître à moyen terme, ce qui pousse les constructeurs à augmenter massivement leurs dépenses dans cette technologie », explique Peter Fuss, expert du cabinet de conseil. Presque tous les plus grands groupes automobiles ont ainsi annoncé une offensive dans l’électrique pour les années à venir. C’est particulièrement le cas des constructeurs allemands.

Par rapport à certains concurrents, ces derniers ont « quelque peu pris leur temps » pour se lancer dans l’électrique, relève Peter Fuss. Surtout, ils sont très dépendants de la Chine, leur plus gros marché, où les fabricants seront soumis dès 2019 à d’ambitieux quotas de ventes de « véhicules à énergie nouvelle ». L’électrification des voitures, une aubaine pour des sociétés récentes comme l’américain Tesla ou les constructeurs chinois, est donc un virage à ne pas manquer pour ces entreprises.

Le groupe Volkswagen, numéro un mondial de l’automobile, prévoit notamment d’investir 1 milliard d’euros pour transformer son usine de Zwickau, dans l’est de l’Allemagne, en site entièrement consacré à l’électrique, et 750 millions d’euros dans son usine de Cassel (centre) pour y fabriquer des motorisations électriques. Daimler, fabricant des Mercedes-Benz, compte lui bâtir une nouvelle usine de batteries électriques aux États-Unis. Si les marques allemandes restent à la traîne en terme de ventes de voitures électriques, dominées par le chinois BAIC, l’alliance Renault-Nissan et Tesla, elles pourraient parvenir à gagner des parts de marché avec l’arrivée de plusieurs modèles en 2019 et 2020