Le secteur routier souffre d’inefficacité et d’inefficiences majeures

Les investissements de l’État dans le réseau routier restent en dessous du minimum nécessaire, estimé à 3 % du PIB, pour assurer l’entretien et le développement des routes. Cela correspond à un déficit moyen annuel de 1,4 % du PIB.

 

Le gouvernement avait prévu de réhabiliter et moderniser, à l’échéance de 2016, environ 17 000 km linéaires de routes, dont près de 2 000 km revêtues et 15 000 en terre. Il avait aussi programmé de remettre en état environ de 25 000 km de pistes rurales et d’achever les travaux lancés dans le cadre des 5 chantiers sur les grands axes routiers et les voiries dans certaines villes comme Kinshasa, Lubumbashi, Goma, Bukavu, Kisangani, Mbandaka, Gemena, Bunia, Butembo, Uvira, Kindu, Kananga, Tshikapa, Kenge, Kikwit, Mbuji-Mayi, Matadi, Likasi… Enfin, le programme quinquennal de 2012 prévoyait de moderniser les axes routiers constituant le Ring national en vue de sa transformation progressive en réseau autoroutier ; les axes d’interconnexion avec les pays voisins ; ainsi que de bitumer progressivement les routes assurant la liaison entre les chefs-lieux de provinces et entre les chefs lieux et les grands centres.

Pour atteindre ces objectifs, outre les possibilités des BOT, PPP ou concessions, d’accroître substantiellement le taux d’investissement public dans le secteur des infrastructures, le plan gouvernemental prenait en compte la consolidation du Fonds national d’entretien routier (FONER) et de mettre en place, pour les pistes rurales, un dispositif de cantonnage manuel avec l’encadrement des PME ou des organisations locales de développement en vue d’assurer la maintenance à coût réduit tout en optimisant l’utilisation de la main-d’œuvre locale.

Lors de la session parlementaire de septembre 2016, le député Muhindo Nzangi a demandé que la question de l’état des routes à travers le pays soit inscrite à l’ordre du jour. À ce jour, le tableau est peu reluisant : sur les 58 000 km des routes d’intérêt général que compte le pays, seulement 4 000 km sont asphaltés. C’est  vraiment insuffisant pour un pays qui a la taille de l’Europe de l’Ouest. À l’Office des Routes (OR), qui a la charge de la gestion des routes nationales et de desserte agricole, les données statistiques et la comptabilité posent malheureusement problème. La Banque mondiale qui est un partenaire de taille dans ce secteur, a souvent décrié les dysfonctionnements, notamment dans le processus de passation des marchés. Quelque 9 000 km des routes devraient être réhabilités pour un montant de 1 milliard de dollars sur la période de 2012 à 2016. À l’heure de l’évaluation, le bilan est loin d’être satisfaisant.

Changer de stratégie 

De l’avis des experts de la Banque mondiale, le gouvernement devrait changer de méthode dans sa politique en vue de rendre praticables sur 10 ans 40 600 km du réseau routier d’intérêt général. En 2012, le gouvernement a fondé ses objectifs sur le contrat sino-congolais. La Sino-congolaise des mines (SICOMINES) qui a garanti le financement des infrastructures contre les ressources naturelles. Elle n’a produit sa première tonne de cuivre qu’en octobre 2015 alors que le secteur minier était dans une conjoncture basse. Le volet minier de l’accord ayant connu des difficultés dans sa concrétisation, normal que le financement du volet infrastructures ne devait qu’en pâtir. En chiffres, seulement 350 millions de dollars ont été décaissés pour la réalisation des projets, tels que l’avenue du Tourisme et la route Lutendele à Kinshasa ainsi que les RN 4 (Beni-Luna sur 60 km au Nord-Kivu) et RN 5 (Lubumbashi-Kasomeno sur 137 km au Haut-Katanga).

Dans la loi portant reddition des comptes pour l’exercice 2015, il est mentionné que seulement quelque 780 km des routes en terre ont été réhabilités. Certes, l’état des routes qui constituent le Ring national s’améliore grâce notamment à l’appui financier et institutionnel des partenaires internationaux comme la Banque mondiale, la BAD, la JICA, DFID, Fonds koweïtien, BADEA, OFID… Mais on est encore en deçà de la moyenne africaine qui est de 70 % des routes primaires et secondaires des voies praticables. Par exemple, l’Office des routes n’est pas capable d’entretenir 7 000 km des routes par an. Selon les experts de la Banque mondiale, le choix minimal incompressible de la RDC serait d’utiliser ses ressources limitées pour améliorer le réseau routier d’intérêt général. L’objectif devrait être d’atteindre 70 % du de ce réseau en état bon en 10 ans. Pour cela, un investissement total moyen de l’ordre de 370 à 420 millions de dollars par an, équivalent à 2 % du PIB, est nécessaire. Ce financement devrait provenir essentiellement de sources internes, telles que le Fonds national d’entretien routier (FONER) et le budget d’investissement. L’aide extérieure devrait permettre de combler l’écart entre les besoins et les ressources internes. Le développement et l’entretien des voiries urbaines nécessitent des ressources supplémentaires qui s’ajouteraient à celles du réseau routier d’intérêt général.

L’efficacité de la dépense sur le réseau en terre s’accroîtrait si l’accent était mis sur l’entretien. La réhabilitation et le bitumage de la partie revêtue du Ring national donnent des résultats probants, mais leur coût est excessif par rapport aux moyens du pays. Par ailleurs, la réhabilitation des infrastructures urbaines et l’allocation des ressources entre programmes urbains et interurbains en faveur des premiers posent le problème de l’efficacité et de l’équité de la dépense publique. L’efficience du secteur est faible et, à résultats similaires, les coûts des travaux se situent au-dessus des moyennes africaines. Les inefficiences et les surcoûts dépendent en grande partie des déficiences du processus de passation des marchés qui ont abouti à l’arrêt de plusieurs projets et à des pertes financières et économiques, surtout entre 2008 et 2012.