L’élection des députés provinciaux par les conseillers locaux et municipaux voilerait-elle l’article 220 de la constitution ?

Cette préoccupation se trouve sur toutes les lèvres des congolais et les commentaires se portent à merveille.

C’est pourquoi il importe d’interroger la constitution pour se rendre compte de ce qu’il en est. En effet, l’art. 220 pose le principe du suffrage universel qui ne peut faire l’objet d’aucune révision constitutionnelle. Et l’art. 197 dispose que les députés provinciaux sont envisager l’élection des députés provinciaux au suffrage universel direct et secret ou cooptés. Comment peut-on alors envisager l’élection des députés provinciaux au suffrage indirect alors qu’elle est prévue au suffrage universel direct ? Cette interrogation retient toute notre attention et nécessite une réponse dépouillée de tout à priorisme. C’est pour cette raison qu’il convient de nous référer à l’art 5 de la constitution pour plus de précision. Cet article dispose que le suffrage est universel, égal et secret. Il est direct ou indirect. Cela revient à dire que le principe d’universalité du suffrage posé à l’art 220 reste inchangé.

Ce suffrage universel dit l’art 5 peut être direct ou indirect. En d’autres termes, si hier les députés provinciaux ont été élus au suffrage universel direct, demain ils pourraient l’être au suffrage indirect. Dans les deux cas le principe d’universalité du suffrage universel posé à l’art 220 garde toute son économie.

Qu’entendre par suffrage universel ?

En réalité, le suffrage n’est rien d’autre que le vote émis c’est-à-dire la voix que l’électeur accorde à une personne mieux à un candidat lors des élections.

On parle de suffrage universel lorsque les électeurs se rendent aux urnes pour désigner les candidats qui représentent leurs aspirations profondes. C’est un électorat ouvert à tous ceux qui sont en âge de voter sauf restriction de la loi.

Le suffrage universel direct est celui par lequel l’électeur opère lui-même le choix de la personne qu’il souhaiterait voir exercer le pouvoir politique à son nom. Dans ce cas il y absence d’intermédiaire entre l’électeur et l’élu ou représentant.

Le suffrage universel dit indirect lorsque les électeurs sont appelés à voter pour un corps électoral qui, à son tour procédera au choix des représentants qui exerceront le pouvoir politique. La différence avec le suffrage universel direct est que le suffrage indirect interpose un intermédiaire entre l’électeur et le représentant, mais l’intermédiaire lui-même doit avoir la légitimité d’un suffrage universel direct. Tel est le cas de la RDC où les députés provinciaux de 2006 étaient directement élus par le peuple (suffrage universel direct), à leur tour ils ont élu les gouverneurs des provinces et les sénateurs (suffrage indirect). C’est également le cas qui se passe dans beaucoup de pays. Pourquoi ce mode l’élection ne semble pas rencontrer l’entendement de certains congolais ? Rien d’étonnant car la contestation fait partie des vertus démocraties.

L’essentiel est qu’elle soit bien gérée. En démocratie l’unanimité est une denrée rare. Les contestations de ce mode d’élection estiment que l’élection des députés provinciaux au suffrage indirect pourrait favoriser l’accession aux assemblées provinciales des hommes et des femmes qui ne seraient pas compétents car ils pourraient se servir de la corruption pour se faire élire. Ils estiment également qu’un collège électoral serait plus exposé à la corruption. En première vue, cette inquiétude parait fondée car on pourrait facilement manipuler ou intimider un corps électoral. Cependant avec un peu de recul on se rend compte que pareil agissement ne serait pas automatique et qu’il y a lieu de relativiser l’inquiétude car tout dépendrait de la de l’électorat et non de la quantité. L’argument selon lequel le suffrage indirect ouvrirait la voie à l’émergence des gens qui ne seraient pas compétents ne résiste pas à la critique objective.

Il semble que le problème se situe ailleurs, les contestateurs des suffrages indirects invoquent les conséquences éventuelles au lieu de chercher les causes qui engendreraient ces conséquences. Il serait intéressant de s’attaquer aux causes qui minent le processus électoral en RDC. Parmi ces causes on peut citer notamment les tergiversations de la classe politique qui ne permettent pas au pouvoir d’organiser des élections, de respecter le calendrier électoral, la dictature des partis politique, le non-encadrement des électeurs.

En effet, il existe en RDC très peu de parti politique dans lesquels s’exerce la démocratie. Si la création des partis politique obéit à la loi, leur fonctionnement pose problème. Quiconque veut créer un parti politique cherche des amis, des connaissances de provenances diverses en vue de recueillir des signatures nécessaire pour l’agrément de ce part. L’agrément obtenu, il se comporte tel un « monarque absolu. » Les signataires prétendument appelés cofondateurs du parti font la simple figuration. Médusés par le comportement du chef du part, les cofondateurs créent des ramifications porteuses du même nom à peine voilé. Réaction, le chef du parti passe sur tous les médias, multiplie incidents et déclarations, son parti n’est plus qu’une coquille vide ou presque. Et lorsqu’il lui resterait quelques militants et sympathisants, seuls ceux d’entre eux qui seraient prêts à avaler ses caprices et ses humeurs pourraient espérer obtenir la faveur de se porter candidats au nom du parti. Une autre cause se trouve être le non-encadrement des militants. Les chefs des partis politiques maintiennent délibérément leurs militants dans l’ignorance aux fins de mieux les manipuler. Ils entretiennent la confusion pour les empêcher de savoir et comprendre ce qui se passe réellement au sein des partis au point que seule la rumeur constitue leur source d’information. Ce qui est dit pour les partis politiques l’est pour certaines associations de la société civile.

Entretemps, dans les médias et la presse, les animateurs des partis politiques et de la société civile s’érigent en défendeurs de la démocratie et de la transparence pendant qu’à l’interne ils brillent par l’autoritarisme et l’opacité.

Tout ceci nous amène à penser que le mauvais choix des animateurs des institutions ne résulterait pas seulement du mode de scrutin mais serait tributaire de plusieurs facteurs. Les chefs des partis politiques devraient restaurer la confiance entre leurs membres, ceux de la société civile devraient s’investir dans la sensibilisation des électeurs.