L’embellie, oui, mais il faut diversifier en Afrique

Sur le continent, ça s’améliore grâce notamment à l’embellie des prix des produits de base et du pétrole, explique le Fonds dans ses prévisions semestrielles.

 

L’Afrique va mieux mais sa croissance ne génère pas encore suffisamment de revenus. C’est ce que l’on doit retenir utilement du rapport du Fonds monétaire international (FMI) publié le 17 avril. Le Fonds estime que la croissance va atteindre 3,4 % en Afrique subsaharienne au cours de cette année, et sans doute 3,7 % en 2019. Les deux locomotives, le Nigeria et l’Afrique du Sud, redémarrent mais de façon encore un peu poussive. De même que le géant pétrolier angolais. L’embellie provient des cours du pétrole et plus généralement des produits de base, les matières premières, qui sont à la hausse depuis deux ans.

La diversification est toujours la recommandation première du FMI pour l’Afrique. Les États doivent investir dans d’autres secteurs que les matières premières. Au total, les économistes préviennent que cette croissance, même si elle s’améliore, reste encore trop faible pour se traduire par des améliorations spectaculaires du niveau de vie de la grande majorité des Africains. 

Tout va mieux et tout est plus risqué !

Si on écoute le FMI : « Tout va mieux et tout est plus risqué ! » Dans ces dernières déclarations sur la situation sur l’économie mondiale, le Fonds monétaire international souffle le chaud et le froid juge, dans sa chronique pour Le Monde, Jean Paul Betbeze, membre du cercle des économistes. Le Fonds monétaire international (FMI) nous le dit le 17 avril, pour préparer sa grande réunion de printemps à Washington : « L’expansion économique mondiale qui a débuté aux environs du milieu de l’année 2016 est devenue plus large et plus vigoureuse… La croissance mondiale semble en voie d’atteindre 3,9 % cette année et l’année prochaine, soit bien plus que notre prévision d’octobre dernier. » On retrouve derrière cette expansion les « usual suspects » : États-Unis et Chine, Japon et zone euro.

Mais, le Rapport sur la stabilité financière dans le monde, de ce même FMI, s’inquiète… le 8 avril ! « Les risques à court terme pesant sur la stabilité financière se sont quelque peu accentués depuis la parution de l’édition précédente du Rapport sur la stabilité financière dans le monde et les risques à moyen terme demeurent élevés. » Et tout y passe : dans les pays avancés, les banques centrales vont devoir monter leurs taux, en liaison avec la montée de l’inflation, mais en tenant compte des « vulnérabilités financières à moyen terme de ces économies ». Monter les taux parce que l’inflation monte bien sûr, mais surtout les banques centrales expliquant mieux ce qu’elles font. Pas facile.

Pire, les risques de bulle sont là, ce qui n’est pas « sans rappeler la période qui a précédé la crise (de 2008) » quand les taux monteront. Diantre ! Le secteur bancaire va certes mieux, mais des crédits non performants demeurent (pensons à l’Italie) et certaines banques peuvent se trouver exposées à des manques de dollars. Sans oublier des pays émergents exposés eux aussi à la montée des taux, notamment pour des crédits particulièrement risqués et libellés en dollars ! Bref, tout va mieux et tout est plus risqué ! On pourra dire que le FMI ne prend pas beaucoup de risques, ou alors qu’il ne sait pas bien comment intégrer les actions de Donald Trump et la stratégie des nouvelles « routes de la soie » de Xi Jinping, ou bien qu’il s’inquiète de la montée des crédits publics et privés dans le monde, soit pour accélérer sa croissance, soit pour en précipiter la crise, à moins qu’il ne comprenne pas bien cette sortie de crise !

Un peu de tout sans doute, mais joue surtout la concurrence mondiale des deux économies dominantes, dans un nouveau cadre économique. Les États-Unis veulent pousser leur croissance par tous les moyens : baisse des impôts sur les sociétés, taxation des importations pour rapatrier des activités, plus de grands travaux, ce qui creuse le déficit public et le déficit commercial. La Chine veut maintenir sa croissance « officielle » à 6,75 %, celle qui est prévue par le Parti communiste, ce qui implique de soutenir des banques et des entreprises publiques un peu zombies, tout en finançant largement les grands travaux de communication destinés à relier l’Asie à l’Europe. Les États-Unis veulent maintenir leur hégémonie, la Chine diriger les émergents. Pour tout cela, il faut beaucoup de financement à long et très long terme, autrement dit assumer beaucoup de risques.

Souhait politique

Mais ce qui est commun à tous les pays, et à la prudente analyse du FMI, est un souhait politique évident et économiquement ardu. Le FMI veut que tous les pays (avancés, émergents et en développement) aient deux objectifs : augmenter leur croissance potentielle par des réformes structurelles et renforcer leur résistance aux chocs, notamment financiers, quand viendra la hausse des taux courts et longs qu’il craint tant. Mais pourquoi donc y a-t-il si peu d’inflation en plein-emploi aux États-Unis ? Pourquoi le crédit est-il si peu cher, et donc si risqué, quand les taux monteront ? Pourquoi les marchés financiers ne s’inquiètent-ils pas plus de ce qui peut se passer, et en fait, le permettent ? Pourquoi pas plus de soucis devant la montagne de crédits inquiétants en Chine ? Le FMI est dans l’embarras, répétant que, les choses allant mieux, elles pourront aller plus mal.

Pourquoi ne pas expliquer ce qui se passe, la bataille hégémonique mondiale pour piloter la révolution industrielle en cours, le robot piloté par l’intelligence artificielle ? Il faut plus de matheux et surtout plus de crédit pour les robots, des robots qui déclassent les emplois intermédiaires et demandent des emplois de base. Plus de crédit sans inflation salariale donne aujourd’hui plus de croissance. 

Mais demain ? Le FMI ne cesse de s’inquiéter des munitions qu’il faut pour résister à la récession qui se prépare, par la hausse des taux. Il veut des banques plus fortes, des entreprises et des États moins endettés. Voilà la source de sa contradiction : il oublie qu’il faut des salariés mieux formés.