Les effets collatéraux du Brexit sur l’industrie locale

Depuis le référendum du 23 juin 2016 en faveur de la sortie de l’Union européenne, l’industrie automobile britannique est l’un des secteurs les plus touchés. La production a chuté de 25 %, et la sortie de l’UE arrive au pire moment, alors que le secteur aborde le virage électrique.

EN 2019, la fabrication de véhicules a reculé de 14 % par rapport à 2018, portant la chute à 25 % sur trois ans, selon les statistiques publiées le jeudi 30 janvier par la Society of Motor Manufacturers and Traders (SMMT), l’organisme représentant le secteur. 

La production est désormais de 1,3 million de véhicules, faisant paraître fantaisiste l’ambition affichée il y a seulement quatre ans d’atteindre la barre des 2 millions. « La baisse de la production, à son plus bas niveau depuis presque une décennie [au moment de la crise financière], est très inquiétante », s’alarme Mike Hawes, le directeur du SMMT.

La crise de l’automobile britannique ne vient pas que du Brexit. Le scandale autour du diesel et le transfert des consommateurs vers les véhicules électriques secouent le secteur dans toute l’Europe. 

Le ralentissement économique en Chine, où les voitures de luxe sont très appréciées, se fait également sentir lourdement, notamment pour Jaguar Land Rover.

Scénario du pire

Mais la sortie de l’Union européenne (UE), qui a été effective le samedi 1er février, arrive au pire moment. D’abord, cette dernière a provoqué de sévères remous à court terme. La livre sterling a fortement chuté, renchérissant les importations de pièces détachées. Les consommateurs, inquiets, se sont aussi détournés des achats importants comme ceux d’une voiture. Ensuite, face au risque d’un Brexit sans accord, qui aurait été chaotique, la plupart des usines ont préféré fermer pendant plusieurs semaines en avril et en octobre, dates qui étaient censées marquer la sortie de l’UE. Ces risques ne se sont pas matérialisés, mais les conséquences sur la production sont réelles.

Enfin, et surtout, alors que l’industrie doit se préparer au virage électrique, les constructeurs ont largement arrêté d’investir au Royaume-Uni. Trop risqué, alors que personne ne sait de façon certaine quelles seront les relations futures entre Londres et Bruxelles. Y aura-t-il des droits de douane ? Des contrôles aux frontières ? Un accord de libre-échange ? Dans ce brouillard, les constructeurs automobiles ont investi, en 2019, 1,1 milliard de livres (1,3 milliard d’euros), environ 60 % de moins que la moyenne des sept années précédentes. 

Et encore, tout ou presque vient d’un seul investissement de Jaguar Land Rover, qui a annoncé, en juillet 2019, qu’il allait injecter près de 1 milliard de livres dans une de ses usines pour construire des véhicules électriques. Le reste du secteur attend. « Plus l’incertitude continuera, plus nous allons manquer les investissements nécessaires pour l’avenir », s’alarme David Bailey, professeur d’économie à l’université de Birmingham, qui vient de coéditer un livre sur le Brexit et l’automobile (« Carmageddon ? Brexit and Beyond for UK Auto », Bite-Sized Books, 2020, non traduit).