Les Lignes maritimes congolaises entament leur mue

LMC affiche son ambition de passer dans le multimodal. Après le transport maritime et routier encore timide et limité à quelques camions-citernes, l’ex-CMZ vise désormais la voie ferrée.

L’OFFICE de gestion du fret multimodal (OGEFREM) a réussi cette mutation. Voilà 10 ans pratiquement qu’il se heurte à un lobbying des opérateurs économiques de la Fédération des entreprises du Congo (FEC) qui s’active à ramener l’Office de gestion du fret multimodal à son objet social d’avant la réforme des entreprises du portefeuille, donc uniquement le fret maritime. Instrument privilégié du commerce extérieur de l’État congolais, les LMC ont la latitude de sceller des joint-ventures avec des partenaires privés. 

Mais pour l’instant, la compagnie maritime publique cherche à acquérir des navires polyvalents (multipurpose) et à diversifier ses lignes d’exploitation. Les LMC ont dans le viseur l’Afrique du Sud, la côte ouest-africain, le Moyen et Extrême-Orient… le trafic méditerranéen. Hélas, selon nos sources, elles ont perdu un juteux marché faute de navire approprié, le transport des hydrocarbures. Toutefois, les LMC demeurent encore l’épine dorsale du commerce extérieur de la République démocratique du Congo comme par le passé. Elles rêvent, en fait, de leur gloire d’antan. L’exploitation maritime de la ligne Anvers/Matadi remonte à l’époque ou le Congo fut le patrimoine privé du roi des Belges et appelé alors État indépendant du Congo (EIC), reconnu par la Conférence de Berlin, le 26 février 1885. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale (1940-1945), l’économie internationale avait été caractérisée par un vaste mouvement de reprise dont l’essor entraîna un gonflement sensationnel des courants de transports entre la Belgique et sa colonie, le Congo-belge. De cette conjoncture naîtra, le 28 novembre 1946, la Compagnie maritime congolaise (CMC), filiale de la Compagnie maritime belge (CMB) qui détenait 80 % des actions tandis que le gouvernement général du Congo Belge n’en détenait que 20 %. La CMC était soumise à la législation en vigueur au Congo Belge. Elle avait son siège social à Kinshasa alors Léopoldville et le siège administratif à Anvers (Antwerpen). Ses premiers navires furent les MV Kinshasa et le MV Kindu. 

Ces navires étaient gérés conjointement par l’AMI/Anvers avec ceux de la CMB. Ils desservaient les ports de Matadi, Boma, Dar es Salam, Beira. La CMC vendit ses deux premiers navires en 1951 pour les remplacer par deux autres, les MV Congo Moko en 1962 et le MV Congo Zole en 1968. À la proclamation de l’indépendance du Congo, le 30 juin 1960, l’opinion congolaise estimait qu’il fallait augmenter la participation congolaise au capital de la CMC en privilégiant l’actionnariat privé congolais. Le 14 mars 1966 : promulgation par le président Mobutu de l’ordonnance-loi portant publication du code de navigation maritime. Les navires de la CMC furent autorisés à battre pavillon congolais et sa gestion fut confiée au conseil d’administration présidé par Gaston Diomi qui délégua au groupe AMI-CMB la gestion financière et technique des navires.

Le 21 juin 1966 avait été signé entre la République démocratique du Congo et la Compagnie maritime belge un protocole d’accord aux termes duquel la République démocratique du Congo détenait une participation majoritaire dans le capital de la CMC. 

Le pavillon congolais était né avec Matadi comme port d’attache. Le 18 juillet 1967, la CMC prit solennellement possession de sa flotte. Le MV P.E. Lumumba, ex-MV Léopoldville, avec deux autres navires rebaptisés, à savoir le MV Okito, ex-Congo Moko, et le MV Mpolo, anciennement Congo Zole. 

La CMC recevait pour mission d’affirmer sur les mers l’indépendance économique du Congo. Elle devient l’instrument privilégié du pays pour son commerce extérieur. Le transport des produits lourds, pondéreux et onéreux lui fut confié. Sans aucune modification à ses statuts, la CMC devient Compagnie maritime du Zaïre (CMZ) à la suite du changement de nom du pays en 1971. Il en sera ainsi durant toute son existence. De 1971 à 1975, la CMZ était devenue l’un des plus grands armements d’Afrique noire avec une flotte de dix navires parmi lesquels les MV Kasa-Vubu, cargo de 11 700 t (port en lourd) en 1971 ; le MV Kananga, cargo mixte de 15 350 t ; et le MV Lumumba, cargo de 15 000 t en 1973. Puis en 1974, MV Bandundu, cargo de 15 000 t ; le MV Kisangani, cargo de 15 000 t, le MV Mbandaka, cargo de 15 000 t ; le MV Mbuji-Mayi, cargo de 15 000 t ; et le MV Bukavu, cargo de 15 000 t. 

En sus, la CMZ exploitait en commun avec la CMB deux cargos de 16 000 t (port en lourd) sur la ligne Anvers/Matadi. Le 2 décembre 1974, l’État décide de la dissolution de la CMZ, société d’économie mixte, et de la création de la CMZ (Compagnie Maritime Zaïroise par la loi 74/026 du 2 décembre 1974), entreprise publique à capitaux entièrement zaïrois. En 1997, la CMZ est rebaptisée Compagnie maritime du Congo (CMDC). Cette dénomination ne sera confirmée que, plus tard, par le décret n° 069/2002 du 24 juin 2002, suite au changement de nom du pays de la République du Zaïre en République démocratique du Congo. 

Par le décret n° 09/12 du 24 avril 2009, la CMDC est transformée en Lignes maritimes congolaises. Le 12 septembre 2014, LMC Sarl est devenue SA, une société anonyme unipersonnelle avec conseil d’administration au capital de 16 474 900 000 FC, en application de l’Acte Uniforme sur le droit commercial général de l’OHADA. Mais la compagnie n’a aucun chronogramme pour sa mue.