L’Occident court après l’Empire du Milieu

Depuis plus d’une décennie, la Chine réalise de bonnes affaires sur le continent africain. D’autres pays émergents suivent son exemple. Face à cette situation, les Etats-Unis et l’Europe tentent de regagner le terrain perdu.

Du 10 au 11 septembre, Berlin, la capitale allemande, a accueilli le sommet Allemagne-Afrique. Dirigeants politiques et opérateurs économiques du continent africain et de la première puissance économique européenne se sont parlé. Du 4 au 6 août, Washington avait mobilisé, à la Maison-Blanche, une cinquantaine d’Etats africains, pour un premier sommet Etats-Unis-Afrique. Déjà en avril, il s’était tenu à Bruxelles, le Sommet UE-Afrique, après celui de l’Elysée, fin 2013. Toutes ces grandes rencontres ont eu un objectif : les échanges économiques. L’Europe et les Etats-Unis veulent, en effet, se montrer plus entreprenants pour reprendre un terrain de plus en plus occupé par la Chine et d’autres pays émergents. Les uns, aussi bien que les autres, sont attirés par les potentialités dont regorge l’Afrique.  Selon une étude publiée en avril 2013 par le Center for Global Development, un groupe international de réflexion, la Chine a investi plus de 75 milliards de dollars en Afrique, au cours de la période allant de 2000-2011. Ces chiffres s’approchent des montants dépensés par les Etats-Unis, soit 90 millions de dollars, selon la même étude. La Chine détient ainsi le cinquième du total des investissements sur le continent africain.

L’offensive occidentale      

Barack Obama, Angela Merkel ou, encore, François Hollande n’ont pas dit leur dernier mot face à la percée de l’Empire du Milieu. Au terme du sommet de Washington, le président américain a annoncé un plan d’investissement en Afrique à hauteur de 33 milliards de dollars, allant jusqu’en 2020. Il a assuré que son pays œuvrait pour un partenariat «d’égal à égal » et sur le long terme. « Nous ne voulons pas juste extraire vos ressources minérales pour notre propre croissance », a-t-il dit aux dirigeants africains. Ces 33 milliards de dollars d’investissements publics et privés visent le développement des échanges commerciaux entre les Etats-Unis et l’Afrique (7 milliards), divers secteurs comme la banque et les infrastructures (14 milliards) ainsi que le projet énergétique Power Africa (12 milliards). Obama a promis de reconduire, après l’aval du Congrès, pour quinze ans, l’African Growth and Opportunity Act (AGOA), programme d’exportation sans droits de douane, de la plupart des produits manufacturés africains vers les États-Unis, initié sous Bill Clinton. Pour Washington, estime un analyste, regagner le terrain perdu au profit de l’Empire du Milieu en Afrique est devenu une priorité stratégique afin de se repositionner à trois niveaux ». Un, la première puissance mondiale veut recommencer à peser sur les industries extractives comme le pétrole et les mines et ne pas se laisser distancer après les permis d’exploration accordés aux pays émergents. Deux, le dossier brûlant de la sécurité alimentaire, car l’Afrique, réservoir mondial de terres arables, sera au centre de toutes les attentions au cours des années à venir, du fait de la pression démographique mondiale. Trois, les normes sous toutes leurs formes : juridiques, technologiques, voire même culturelles. Pour sa part, l’Union européenne veut inaugurer une nouvelle ère de coopération avec l’Afrique. La chancelière allemande, Angela Merkel, et le président français, François Hollande, ont clairement exprimé cette volonté à Bruxelles, en avril. Dans cette coopération, axée sur le développement, la sécurité et la protection de l’environnement, Merkel et Hollande veulent jouer les premiers rôles. Lors du récent sommet, à Berlin, l’Allemagne a émis le vœu d’augmenter le taux de ses échanges commerciaux avec le continent. Ce taux ne représente actuellement que 3 % de son commerce extérieur. « L’Afrique, en plein essor, n’est plus seulement le continent des problèmes mais, aussi celui des opportunités », a affirmé Angela Merkel.

Le plus des Occidentaux       

Dans cette guerre de positionnement, le monde occidental propose, en plus du soutien économique, un domaine que la Chine n’exploite pas : le soutien à la paix. Sur un continent africain miné par des conflits armés et la terreur djihadiste, l’Occident ne rechigne plus à intervenir militairement. La France est ainsi présente au Mali et en Centrafrique. Au Mali, l’Allemagne a soutenu l’intervention française, puis envoyé des formateurs dans le cadre de la mission de formation EUTM Mali, en plus de sa participation à la Brigade franco-allemande. De plus, elle s’est engagée dans la mission que l’UE en République centrafricaine avec 800 hommes, envoyés sur le terrain pour le transport stratégique.

Barack Obama a, pour sa part, annoncé le lancement d’une Initiative pour la sécurité et la gouvernance, qui va aider six pays (Ghana, Kenya, Mali, Niger, Nigeria et Tunisie) à former et à renforcer leurs forces de sécurité et une aide financière annuelle de 110 millions de dollars, pendant trois à cinq ans, à six autres pays qui contribuent aux opérations de maintien de la paix, afin de faciliter la mise en place de la Force africaine de réaction rapide aux crises.