Mines : les assignations de l’année 2018 ont été atteintes en six mois

Les mines ont rapporté au premier semestre 2018, quelque 864.604.162,12 dollars, selon le ministre des Finances. 

Ces recettes portent sur l’ensemble des rentrées des régies financières (DGI, DGRAD, DGDA) sur les six premiers mois de l’année 2018, en termes d’impôts directs et indirects, des droits de douanes et des recettes domaniales et de participation. Comparées aux revenus miniers du premier semestre 2017 qui n’étaient que 295 millions de dollars, les réalisations minières de 2018 enregistrent une croissance de 193 % due sans doute à l’embellie des cours mondiaux du cuivre et du cobalt. 

Effet taux de change

Il convient, en effet, de rappeler que tous les trois mois, le ministre des Finances rend publiques les recettes réalisées dans le secteur des ressources naturelles (mines, hydrocarbures et bois). Au premier trimestre 2018, les mines ont, en effet, 397 857 756, 86 dollars alors qu’au second trimestre, période qui compte des échéances fiscales, l’État a gagné un plus de 70 millions de dollars de plus, soit des recettes de 466 746 405,26 dollars. 

Notons que dans le projet de loi de finances 2018, les prévisions des recettes minières sont de l’ordre de 446 329 642 546 FC pour la Direction générale des recettes administratives, domaniales, judiciaires et des participations (DGRAD), 754 613 874 021 FC de prévisions de la DGI (fisc) et les 107 435 993 960 FC de la DGDA (douane). In globo, les mines devraient rapporter au bas mot, 1 308 379 510 527 FC. 

Converties en dollars, au taux de 1671,80 FC/USD tel que repris dans le Cadre macroéconomique 2018 révisé, les prévisions des recettes minières sont alors de 782 617 245,20 dollars, sinon de 817. 737. 194 dollars si l’on s’en tient au taux initial repris dans le budget 2018, soit 1813,4 FC/USD ou encore de 807 641 673,16 dollars au taux moyen appliqué sur le marché, 1 620FC/USD. Il sied de rappeler que le taux sur base duquel le ministère des Finances a évalué les recettes minières a varié d’un mois à un autre. Mais dans tous les cas de figures, les recettes attendues du secteur minier sur toute l’année ont été atteintes en six mois. Alors même que, selon des experts de la DGDA, le code minier révisé n’est pas encore d’application. 

Coulage des recettes

Et pourtant, le Trésor aurait dû se gaver davantage… avec un peu d’ordre administratif. Le ministère des Mines et la DGRAD ne disposent pas, en effet,  du même nombre et de la même nature des actes générateurs des recettes du secteur selon un rapport  critique sur le budget 2018 réalisé par la mouvance de la société civile sous la direction de REGED (Réseau bonne gouvernance et démocratie). 

À titre exemplatif, les limiers de la société civile mettent en exergue le cas de la redevance annuelle pour les entités de traitement et/ou transformation de toutes catégories et tailleries, plus d’un demi-milliard de FC (510 585 000 FC) perçu en 2017. Et les prévisions pour l’exercice s’élèvent à 1 414 292 640 FC, selon le ministère des Mines. 

Curieusement, la DGRAD qui est un service de recouvrement, et le ministère du Budget n’alignent pas dans leurs livres cet acte générateur de recettes si  important. La société civile dénonce également un chapelet des actes générateurs qui ne portent pas de prévisions, mais sont perçus depuis au moins 2015. Il s’agit notamment de la taxe sur l’autorisation d’achat des substances minérales autres que l’or et le diamant, en 2015 et 2016, pas de prévision, mais une réalisation de l’ordre de 6 448 130 pour 2015 et 5 322 928 pour 2016 et aucune prévision pour 2017.

La taxe sur l’autorisation d’achat de la cassitérite n’est pas activée. La vente des produits non marchands du CEEC : carence des prévisions en dépit des réalisations 339 121,888 en 2015 ; carence de prévisions en 2016 pour une réalisation de 279.944,967 ; pas de prévision en 2017. La vente des produits non marchands de l’ex-SAESSCAM (service en charge de la petite mine) devenu SAEMAPE : carence des prévisions en dépit des réalisations 84 131,330 en 2015 ; carence des prévisions en 2016 pour une réalisation de 69 450,375 ; pas de prévision en 2017.

Cette situation confuse est la conséquence logique, estime la société civile, de la passivité sinon la complicité dans la concussion des services habilités à lutter contre la fraude minière, mais également l’insuffisance des moyens logistiques et financiers adéquats ainsi que l’absence de personnels qualifiés. La société civile déplore aussi le chevauchement des services aux frontières dont les services de sécurité et des renseignements (non habilités) en violation de la directive qui établit à quatre services dont la DGM, OCC, DGDA et le service d’hygiène. Et enfin, la politisation du secteur minier, le trafic d’influence, les conflits d’intérêts, la tribalisation de l’administration (administration des originaires).

Exonérations

L’attention dans le secteur est essentiellement focalisée sur la redevance minière, pourtant d’autres actes générateurs peuvent également engranger d’importantes recettes, au regard du flux des activités extractives sur l’ensemble du territoire national, note la société civile.

Par ailleurs, jusqu’à fin juin 2018, la DGDA ne disposait pas toujours de la liste exhaustive des entreprises minières qui ne doivent plus bénéficier des droits d’entrée au taux préférentiel. Après six ans d’exploitation, une entreprise minière jouissant d’un régime de privilège devrait formellement rentrer dans le régime de droit commun. Mais cette directive n’est guère d’application au point que les régies financières, particulièrement la Direction générale des douanes et accises, DGDA, attend des dispositions claires du gouvernement pour projeter ses réalisations pour la période 2019-2021, dans la cadre du CBMT, Cadre budgétaire à moyen terme.

À titre exemplatif, Il y a six ans, suite à une recommandation expresse du gouvernement, la DGDA a accordé un régime préférentiel à la Société Anhui Congo d’investissement minier, SACIM. Il s’agit , en pratique, d’un chapelet des facilités au titre de partenariat stratégique sur les chaînes de valeur conformément au Décret n°03/049 du 6 octobre 2013 dont l’exonération des droits de douane et la suspension de la perception de la Taxe sur la valeur ajoutée, TVA à l’importation, la suspension de la TVA sur les produits intermédiaires ou finis ainsi que sur les prestations des services produits par l’entreprise. Autres facilités, l’allègement des coûts de la rémunération de certaines prestations dans le cadre institutionnel conformément au décret susmentionné. À fin juin 2018, la Société Anhuit Congo d’investissement minier a annoncé une production mensuelle de 392 000 carats de diamant.  Par ailleurs,  d’après la Banque centrale du Congo,  la RDC a exporté 52 000 t de cobalt au premier semestre 2018 contre 39 500 t sur la même période en 2017, dégageant ainsi une hausse de 32,8 %. Côté recettes, le minerai essentiel pour la construction des voitures électriques aura rapporté près de 3.3 milliards de dollars. Mais la part de l’État dans cette somme ne tient qu’aux royalties et autres taxes, droits et redevances. 

La Banque centrale n’a avancé aucun chiffre sur ce, comme il est de coutume. L’on sait seulement que les exportations ont enregistré un accroissement de 69,9 % par rapport à la même période de 2017. Alors que, pour le métal rouge, l’accroissement  n’a été que de 7,8 %. Le volume des exportations du cuivre ayant, en effet, passé de 553 800 tonnes en juin 2017 à 597 200 tonnes en juin 2018. L’évolution de cours du cuivre indique un relèvement du prix de 20,5 % sur la période correspondante. La tonne qui se négociait à 5 742,6 dollars en juin 2017 a été vendue à 6 917,9 dollars fin juin 2018.