On s’empoigne pour le partage des maroquins

La gestion des entreprises publiques s’est subitement invitée aux négociations sur les Arrangements particuliers alors même que la répartition des 54 portefeuilles dans le prochain gouvernement entre la majorité présidentielle et le Rassemblement était loin de satisfaire l’opposition au Centre interdiocésain. 

Le Rassemblement des forces politiques et de la société civile acquises au changement, dit RASSOP, a balayé du revers de la main l’offre des ministères de la Majorité présidentielle désormais alliée à l’opposition signataire de l’Accord du 18 octobre 2016 à la Cité de l’Union africaine (UA). Pas un seul ministère de premier rang, si ce ne sont que ceux des Relations avec le Parlement, et des Droits humains… de la Santé publique et de l’Agriculture. Seuls ces deux derniers portefeuilles ont été acceptés par le Rassemblement. Il convient de noter que les assignations de la Santé publique dépassent les 200 millions de dollars ces trois dernières années alors que l’agriculture bénéficie d’importants financements de la Banque mondiale, la Banque africaine de développement (BAD) et d’autres partenaires extérieurs.

Le RASSOP a tout de même droit à 13 postes ministériels et 3 vice-ministères contre 18 portefeuilles et 3 vice-ministères à la MP. L’Opposition signataire de l’accord de la Cité de l’UA dispose de 8 ministères et 3 vice-ministères alors que  l’Opposition républicaine de Kengo wa Dondo se tire avec 3 ministères. La Société civile signataire de l’Accord du 18 octobre 2016 et les non signataires confondus n’ont eu droit qu’à 2 ministères. Pour autant, aucun compromis n’a pu être trouvé sur 4 ministères de souveraineté, à savoir les Affaires étrangères, l’Intérieur, la Défense et la Justice que la MP considère comme relevant du pouvoir discrétionnaire du chef de l’État, tout en s’accrochant aux Finances, au Portefeuille, auxMines. L’opposition signataire de l’Accord de la Cité de l’UA ne compte pas non plus céder des acquis actuels, dont le ministère du Budget occupé dans le gouvernement Badibanga par l’UNC (Vital Kamerhe), Pierre Kangudia.

Consoler ceux qui n’ont rien

t voilà qu’un quidam de la société civile, renseignent nos sources, sort l’idée du partage des entreprises pour « réconforter ceux qui n’ont eu droit qu’à du menu fretin au gouvernement », a fait comprendre ce quidam. Voilà qui suscite derechef des appétits gloutons des acteurs politiques. L’on sait que la mise en place au sein des entreprises du Portefeuille lancée par le chef de l’État s’est arrêtée à brûle-pourpoint, sans autre forme de procès. Sinon que le régime des intérimaires s’est enraciné… contrairement à la loi. Gérer les entreprises comme la Régie des voies aériennes (RVA) ou l’ancien OCPT devenu Société congolaise des poste et télécommunications (SCPT), qui réalisent des recettes de plus de 80 millions de dollars l’an vaut plus que le portefeuille des PME ou des Droits humains, fait remarquer  un analyste. « Il n’a rien à envier à un ministre quiconque prendrait la SONAS, l’Autorité de régulation et de contrôle  des assurances (ARCA), l’Autorité de régulation des postes et télécommunications (ARPTC), l’Autorité de régulation de l’aviation civile (AAC)…

On a facilement de quoi financer sa campagne pour les législatives, par exemple. Ancien membre de la cellule de communication et des relations publiques de la primature, un journaliste ayant requis l’anonymat rapporte combien Matata Ponyo, en cédant le fauteuil de 1ER Ministre, a su, en retour, imposer les siens au sein des entreprises, sinon des établissements publics des plus juteux. Son ancien directeur de cabinet, José Sele Yalaghuli, gère le fisc (Direction générale des impôts, DGI) ; son ancien ministre délégué aux Finances, Patrice Kitebi, est au Fonds de promotion industrielle (FPI) appelée à se muer en une banque d’investissements ; son poulain Guy Matondo trône au BCECO ; son ex-conseiller principal dans les PT&NTIC, Kabeya Tshikuku, gère l’aérogare modulaire à l’aéroport de N’djili. Son ancien chef du protocole a vu son ONG remporter les marchés d’entretien de la pelouse de l’immeuble dit intelligent ainsi que celui de sept immeubles réhabilités, Place Royal… Ce n’est que la partie immergée.

Du temps du régime de transition dit 1+4, les entreprises du portefeuille de l’État avaient fait l’objet de partage entre ex-protagonistes. En un temps record, « le partage du gâteau », comme l’on disait à l’époque, a conduit à des abus, malversations financières, contrats bidons, usurpations du pouvoir avec des ministres qui s’étaient reconvertis en ADG-ADF de fait dans les entreprises. Tant pis pour personne, aucune véritable poursuite judiciaire n’a été déclenchée contre les auteurs établis de ce délit. Telle une pièce de théâtre, le ministre du Commerce extérieur de l’époque, Roger Lumbala, démis de ses fonctions pour s’être trop servi à l’Office congolais de contrôle (OCC), s’est fait remplacer par sa femme Ngalula. « C’est une bonne femme, elle a pu garder le ménage en mon absence », dira, à sa nomination, son mari, ex-rebelle et patron du RCD-N, soupçonné par l’ICCN d’avoir braconné des dizaines de têtes d’éléphants à l’époque de ses menées subversives dans la région des Uele.

Et plus tard, c’est Fulgence Lobota Bamaros sera bombardé directeur général du Fonds national d’entretien routier (FONER). Celui-là même que le directeur de cabinet du chef de l’État, Évariste Boshab, chargea avec une lettre sans en-tête de récupérer à Brazzaville l’argent de la SNEL, quelque 32 millions de dollars, selon la presse locale, à Brazzaville à titre de fourniture d’électricité. Ironie de l’histoire, sinon conséquence de la gabegie, aujourd’hui c’est la Société nationale d’électricité (SNE) du Congo d’en-face qui vend le courant à la SNEL pour mieux desservir Kinshasa. Samy Badibanga semble avoir quasiment tout abandonné à la Majorité présidentielle et alliés, autant de ministères ECOFIN que les entreprises publiques, se contentant seulement, outre sa primature, d’un vice-ministère aux Finances où il a su placer le professeur neurologue Tharcisse Loseke, un UDPS, à la fois un banni et un wanted, comme lui, à la 10è Rue Limete. Nul doute, le Rassemblement ne saura guère faire une part aussi belle à la MP en ce temps où toutes les institutions sont hors mandat et nul ne saurait se prévaloir de jure d’une quelconque ascendance sur un autre, pour reprendre l’expression de Valentin Mubake. Ce dernier demeure toujours candidat 1ER Ministre au même titre que Félix Tshisekedi et Katebe Katoto.

Chaque poste porteur d’intérêts ou de susceptibilité politique et financière fera l’objet d’après négociations. Lecture d’analystes : « C’est aussi à cela que dépendra le choix du futur Premier ministre. La Primature à X contre trois ou quatre portefeuilles sensibles ». Alors que la date du 27 mars était annoncée par la CENCO, en concertation avec la MP et le RASSOP, comme marquant la fin des négociations, la double question de la désignation et de la nomination d’un 1ER Ministre issu du Rassemblent est loin d’être résolue. Au Ghana, pour contenter toutes les tendances qui l’ont soutenu aux élections, le nouveau président Nana Akufo Addo a ajouté aux 50 ministres et vice-ministres qu’il avait précédemment nommés, soixante autres membres du gouvernement. En tout, le gouvernement d’Accra compte 110 ministres! Tant pis pour le Trésor public. Ainsi va la gestion de l’État sous les tropiques.