Parc national de la Salonga : sortir de la liste noire de l’Unesco

Le PNS fait partie des aires protégées qui bénéficient des financements de l’Union européenne. D’une manière générale, les efforts de l’UE dans les financements des projets dans le secteur de l’environnement en RDC concourent à la limitation du réchauffement climatique dans le seuil prévu par l’Accord de Paris.

SELON le rapport annuel 2018 de la COFED (service technique de l’ordonnateur national du FED), l’exécution du programme environnement et agriculture durable dont les objectifs est de « stimuler le développement agricole et socioéconomique » de cinq aires protégées au bénéfice des populations est entré dans « sa phase de croisière ». En ce qui concerne le Parc national de la Salonga (PNS), et dans le cadre du 11è FED, l’Union européenne (UE) appuie le projet agricole rural de conservation du parc ou le PARCCS. 

Pour rappel, le PNS, créé en 1970, est cogéré actuellement par l’Institut congolais pour la conservation de la nature (ICCN) et le WWF. Inscrit dans un très large paysage forestier (90 424 km², dont une zone d’intervention prioritaire de 61 000 km², avec une bande maximale de 50 km autour du parc), ce parc représente la plus grande étendue de forêt dense humide et le deuxième plus grand parc national de forêt tropicale dans le monde avec une biodiversité considérable. Par ailleurs, en raison de sa superficie et son état de conservation peu perturbée, il constitue un trésor environnemental inestimable grâce aux services que ses écosystèmes rendent aux communautés à l’échelle locale, régionale et mondiale, notamment en termes de stockage de carbone, de régulation du climat, et de réservoir de la biodiversité et d’eau douce.

Grâce à sa valeur écologique remarquable, le Parc national de la Salonga a été inscrit, en 1984, sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO. Mais depuis 1999, il est classé « patrimoine mondial en péril ». 

D’ailleurs, Pierre Kafondo, le directeur général du PNS, a annoncé, le 6 décembre dernier, lors de la matinée de communication à l’intention des médias, à l’hôtel Memling à Kinshasa, organisée par la COFED et la Délégation de l’UE, la venue à Monkoto, en janvier 2020, d’une mission d’experts de l’UNESCO afin d’évaluer les progrès accomplis, aux fins de retirer ce parc de la liste du patrimoine mondial en péril. 

Le responsable du parc a résumé à l’intention des journalistes les activités déjà réalisées sur le terrain dans le cadre du Projet agricole secteur de l’environnement et de l’agriculture durable à travers le Programme intégré national (PIN-RDC) du 11è FED (Fonds européen de développement) de l’UE. 

Volet conservation

D’après lui, les stratégies développées par les partenaires de mise en œuvre, dont WWF, ainsi que les activités menées s’inscrivent dans la logique d’amélioration des indicateurs afin de sortir ce parc de la liste noire de l’UNESCO. 

Du point de vue de la conservation des habitats et de la séquestration du carbone, le PNS abrite une diversité de formations forestières intactes. Ce qui en fait l’un des très rares biotopes absolument intacts existant encore en Afrique centrale. Les forêts du parc jouent un rôle régulateur fondamental du bassin du Congo. 

Le parc alimente plus de la moitié des affluents de la rive gauche du fleuve Congo dans la cuvette centrale du bassin ainsi que les têtes de source et les bassins versants d’un grand nombre de cours d’eau. Il contribue également à la régulation du climat global, par la séquestration d’une quantité gigantesque de carbone, et du climat régional qui est un facteur décisif de développement et de sécurité alimentaire.

Les efforts de conservation se sont améliorés, a fait savoir Pierre Kafondo, grâce au renforcement de la surveillance à travers une meilleure organisation des patrouilles. Les équipes sont mieux formées : plus de 150 écogardes recyclés, équipés et motivés. Résultats : la couverture du parc est améliorée et le taux d’indices de braconnage réduit. 

Les populations d’espèces phares (bonobos et éléphants) semblent se stabiliser. Un continuum écologique entre les deux blocs du parc a été créé sous forme de concessions forestières des communautés locales au niveau du corridor de Monkoto…

En ce qui concerne le recensement et le suivi des espèces phares, le parc assure la survie de nombreux grands mammifères comme les éléphants de forêt, des primates rares et fragiles comme le cercocèbe à ventre doré ou l’endémique bonobo, des espèces d’oiseaux typiques des forêts guinéo-congolaises, et les trois espèces de crocodiliens africains. D’après le responsable du parc, il y a une amélioration croissante de la connaissance du contexte et des valeurs de conservation, grâce au recensement total et à méthodologie de suivi écologique (biomonitoring). Le suivi des éléphants, bonobos, céphalophes et singes à queue est régulier à travers les Cameras Trap Distance Sampling (échantillonnage à distance par pièges photographiques) de façon systématique pour apprécier la fréquentation ou l’utilisation des biais (clairières) par les espèces-clés.

En réaction aux plaintes et allégations de violations de droits humains par les écogardes dans le cadre de leurs missions de protection du parc dont la presse internationale se fait l’écho, le PNS a développé un certain nombre d’outils dont le guide de conduite des écogardes, le mécanisme de plaintes et de recours ainsi que des modules de formations sur les droits humains (sessions de recyclage et pendant les causeries morales). 

Dans tous les cas, l’enclavement reste un défi logistique majeur pour le parc. Pour y accéder, il faut emprunter l’avion, les rivières et quelques routes qui sont dégradées et impraticables faute d’entretien. Le parc est réparti en 6 bases très éloignées les unes des autres. Pour assurer la liaison entre les sites, le parc utilise les pirogues motorisées (site stations), un canot rapide et des motos. Le ravitaillement des stations en carburant et rations de patrouille pose problème. La logistique du PNS représente un investissement important en termes de moyens.

Volet développement

L’action du projet vise « un équilibre plus durable dans et hors du parc », tant dans la gestion proprement dite du parc que pour la stabilisation des populations dans le corridor et aux alentours. Pour cela, le parc développe une stratégie d’aménagement du territoire plus durable, afin que les gens y vivent mieux et que la périphérie constitue une zone de stabilité, pour décourager la déforestation et surtout le braconnage. Aujourd’hui, les populations saluent les bienfaits du programme dans l’amélioration de leurs conditions socioéconomiques. Outre l’adoption des outils reconnus mondialement pour la gestion d’une aire protégée, explique Kafondo, l’efficacité de cette gestion intégrée pour le développement territorial est régulièrement évaluée afin d’orienter la planification, la mise en œuvre et la mobilisation des ressources vers les impacts souhaités. Plusieurs facteurs positifs peuvent être épinglés dans l’action de conservation. Mais le principal, c’est le début d’un zonage fonctionnel pour la conservation et le développement durable du complexe.