Plus de 20 ha de forêts se brûlent, des milliers de tonnes de bois illégalement exploités

Les richesses de la République Démocratique du Congo s’évaporent toujours au détriment d’une exploitation rationnelle et avantageuse de la population. La misère et la pauvreté côtoient un peuple assis sur une manne et ne sait où trouver des dirigeants dont le leadership pourra mener au développement de leur pays. En février 2014, les feux de brousse ont ravagé près de 20 hectares de forêt en un mois dans la réserve de biosphère de l’Institut national d’études et de recherche agronomiques (Inera) à Yangambi dans la Province Orientale. Nos sources indiquent que le collectif des organisations environnementales de la Tshopo a déploré la perte de plusieurs espèces végétales protégées. Curieux, il soupçonne que des individus mettent délibérément le feu à ces forêts. Le responsable de cette organisation a déclaré que le feu, qui remonte à la semaine dernière, s’est répandu sur une distance d’environ 1 kilomètre et a aussi atteint le bureau de la sous-division provinciale de l’enseignement primaire, secondaire et professionnel Isangi I, situé à une soixantaine de kilomètres de Kisangani. Le bureau de l’établissement et tous les documents conservés ont été brulés, a précisé un agent de cette sous-division.

Les feux de brousse favorisent la disparition de certaines espèces végétales rares de cette réserve, soulignent les responsables de l’Inera à Yangambi qui demandent aux autorités d’initier une enquête pour identifier ces personnes inciviques et le superviseur de l’environnement du territoire d’Isangi, Gilbert Likau, a invité les brigades forestières à intensifier la surveillance de la réserve.

L’exploitation illégale du bois ou la loi de la jungle

Le désordre et le manque de suivi qui caractérise l’exploitation des bois de forêt en Rdc favorisent les sorties illégales de cette matière et cause d’énormes pertes au niveau du fisc et des recettes à percevoir par l’Etat congolais. D’abord la coupe sans autorisation de bois par près de 90% des scieurs et exploitants forestiers artisanaux est très régulière dans la province Orientale et la plupart de ces exploitants détiennent des permis de coupe et titres d’agrément délivrés par des personnes non qualifiées, a affirmé dimanche 19 janvier dernier sur Radio Okapi, le ministre provincial des Ressources naturelles, Paulin Odiane. « Nous sommes en train de remettre de l’ordre dans ce secteur. Nos prédécesseurs ont délivré des documents et ces documents nous ne les considérons presque pas, par ce qu’ils ont été délivrés par des personnes non qualifiées », a-t-il déclaré sans indiqué qui sont ces personnes et quel est le sort leur réservé en cas de culpabilité dans ces actes inciviques.

Cette situation d’autant plus grave qu’il favorise le détournement de fonds dus au trésor public et détruit systématiquement l’environnement. Comme mesure, le ministre provincial ne se limite qu’à accorder le délai d’un mois à tous ceux qui détiennent des documents frauduleux pour se mettre en ordre avec le gouvernement congolais. Entretemps, c’est dans les pays étrangers que nous parviennent les échos faisant état de saisies de bois ou autres ressources de la République. Notamment en Allemagne où deux cargaisons de bois en provenance de la RDC ont été saisies début novembre 2013 par les autorités de ce pays qui répondaient à une alerte de Greenpeace à travers un communiqué de presse de l’Ong internationale. Selon Greenpeace, cette saisie constitue le premier cas d’application du nouveau règlement européen sur le bois depuis son entrée en vigueur le mois de mars 2013.

«Cette saisie lance un signal fort à toutes les entreprises d’exploitation forestière ainsi qu’à leurs clients européens afin qu’ils évitent toute pratique commerciale frauduleuse », a déclaré Danielle Van, chargée de la campagne Forêt à Greenpeace Hollande. Le bois saisi est du Wengé, espèce d’arbre tropical en voie de disparition, enregistré en RDC par la société d’exploitation forestière libanaise la Bakri Bois Corporation. Le coordonnateur national Rdc de Greenpeace Afrique a relayé l’alerte estimant que «Les autorités ne peuvent plus fermer les yeux sur l’exploitation forestière illégale et destructrice qui doit cesser. Il en va de l’avenir des forêts et de millions de personnes qui en dépendent. Aucune écharde de bois illégal ne devrait se retrouver sur le marché européen », explique Raoul Monsembula.

En Belgique en avril 2013, un total de 40 mètres cubes de bois sciés Afrormosia exploités en RDC avaient aussi été saisis à Anvers. Le ministre congolais de l’Environnement, Bavon N’sa Mputu, avait même déclaré à l’époque que «la justice congolaise doit éclairer l’opinion sur ce bois d’une valeur estimée entre 60 000 et 70 000 euros exporté par la société d’exploitation forestière Tala Tina ». Dans un rapport publié en octobre dernier, l’ONG Greenpeace a de nouveau dénoncé l’exploitation illégale du bois en République démocratique du Congo, précisant que « les compagnies forestières, y compris des multinationales, bafouent systématiquement la loi congolaise, en toute impunité ».

En dépit de cette mise en barge, une autre cargaison de bois d’espèces wenge en voie de disparition a été trouvée dans une usine de transformation en République Tchèque. Greenpeace note que ce bois serait abattu dans province de l’Equateur à l’aide d’un permis industriel de la concession Bakri Bois (BBC), jugé illégal par l’observatoire indépendant des forêts. Ce bois a été détenu par le groupe suisse Danzer, selon le même communiqué de l’ong.

Sans dénoncer la fraude, la Fec plaide plutôt pour une fiscalité cohérente

Depuis deux ans, la Fédération des industriels du bois (FIB), membre de la Fédération des entreprises du Congo (Fec), avait, à l’issue de son atelier organisé à Kinshasa, plaidé sur la fiscalité cohérente, stable et transparente dans le secteur du bois. Ce forum s’est proposé de vérifier les bases juridiques des prélèvements en provinces dans le secteur du bois à travers le projet Fleght qui s’occupe notamment des réglementations, de la gouvernance et des échanges commerciaux. Il est vrai que les participants à cet atelier avaient milité pour la suppression des taxes sans contre parties ou de double imposition, et opter pour mieux informer et sensibiliser les services des ports, plus particulièrement de Matadi (Bas-Congo) sur les diverses tracasseries dans l’exportation du bois. « Mais l’accord de partenariat volontaire à signer par la RDC et l’Union européenne doit respecter certains principes de base, notamment la clarification des éléments constitutifs de la fiscalité», a expliqué le secrétaire général de la FIB, Françoise Van de Ven.

Il est actuellement indispensable que les autorités et les exploitants forestiers définissent des nouvelles bases pour remettre de l’ordre dans ce secteur, qui passent par la révisitation du code forestier.