Remettre en marche l’industrie touristique congolaise nécessite la prise en compte de plusieurs paramètres dont la promotion constitue le point d’orgue.

« Si l’on vous dit que Dubaï amasse beaucoup d’argent à cause du pétrole, on vous ment. L’essentiel de son argent lui vient du tourisme. J’y ai rencontré des Françaises qui s’étonnaient de ce qu’elles ont découvert à Dubaï. Tout y est organisé », affirme Augustin Malala, un commerçant congolais.

Selon les avis de ceux qui œuvrent dans le secteur du tourisme en RDC, le gouvernement doit commencer par mettre un accent particulier sur la promotion. Le constat est le même tant du côté des opérateurs économiques que des fonctionnaires du Tourisme. « Notre pays possède de grands parcs nationaux et beaucoup d’autres curiosités comme sa musique, mais, il ne conçoit et n’applique aucune politique de réelle promotion. Dans les pays comme la Tunisie et l’Egypte, le Kenya ou le Sénégal, on sait de quoi l’on parle…il en va aussi de l’Afrique du Sud», déclare Steve Kabasele, président de l’Association des agences de tourisme de la RDC et responsable d’Acrep Voyage and Tourism.

Selon Olivier Okito, responsable à l’Office national du tourisme, ce service de l’État n’a dans ses attributions que la promotion du tourisme. Malheureusement, il n’a pas de moyens pour faire son travail. Le Fonds de promotion culturelle, l’unique entité créée pour générer des ressources au profit de l’ONT, a été transféré à la Direction générale des recettes administratives, judicaires, domaniales et de participation (DGRAD).

Promouvoir le tourisme intérieur et de masse

Elvis Mutiri Wabashara, ministre du Tourisme, compte passer à une étape supérieure après avoir ausculté l’état des lieux. Pour l’heure, il poursuit sa visite des provinces où, à chaque escale, il consulte ses collaborateurs. Au Nord-Kivu et au Bas-Congo, toutes les parties impliquées dans le secteur lui ont soumis leurs desiderata. Nombreux ont épinglé surtout la problématique de la promotion et le manque des moyens.

La dernière conférence tenue en février 2015 à Kinshasa par le ministère de tutelle a permis de faire le diagnostic et de proposer des solutions. Presque deux ans après l’adoption du « Plan Directeur intégré pour le développement du tourisme en RDC », Kinshasa est toujours incapable de mobiliser des devises, malgré ses sites historiques, ses lacs, forêts et parcs.

Selon l’Agence nationale pour promotion des investissements (Anapi), le secteur touristique présente des atouts dont plusieurs formes de tourisme peuvent être développées : tourisme de masse et de niches (balnéaire, safaris, écologique, scientifique, culturel, historique).

La promotion du tourisme demande des financements. Heeder Thomas, directeur général adjoint de l’Organisation mondiale du tourisme (OMT), lors de son passage à Kinshasa, avait promis d’aider la RDC à remettre son tourisme en marche.

Les Congolais devraient être sensibilisés sur le tourisme intérieur et de masse : ils ont besoin de connaître leur propre pays. Il faut promouvoir le tourisme scolaire, ainsi que le souhaite Elvis Mutiri. Car, elles ne sont pas nombreuses les écoles qui organisent des visites guidées au jardin zoologique de Kinshasa. Quelques écoles privées le font, à titre onéreux, en transportant les élèves dans des sites tel que le mausolée de Laurent Désiré Kabila.

Non-maîtrise des statistiques 

Le constat est décevant au niveau de l’enseignement supérieur et universitaire. Au sein de certaines universités, les étudiants préfèrent uniquement découvrir des pique-niques dans la périphérie de Kinshasa. L’activité touristique proprement dite demeure l’apanage des expatriés qui se déplacent dans la province du Bas-Congo ou dans certains sites des environs.

Combien de touristes a-t-on enregistrés l’année passée ? Il est difficile d’avoir des statistiques. Aucune agence de voyages ou de tourisme n’est en mesure de vous renseigner avec des chiffres fiables. Cette remarque vaut autant pour la dizaine d’agences agréées par l’Association internationale des transports aériens (IATA) que pour les cinquante autres non agréées.

Dans la plupart d’agences, la vente des billets d’avion constitue l’activité principale. « C’est un métier difficile comme celui de tout intermédiaire financier qui, de temps en temps, doit couvrir ses clients défaillants vis-à-vis du fournisseur qu’est la compagnie aérienne », explique Steve Kabasele.

Selon Olivier Okito, il n’y a pas que les agences de tourisme qui ne maîtrisent pas les statistiques. « À ce jour, il est difficile d’avoir les vrais chiffres que font les restaurants, les hôtels, les taximen, les sites touristiques… tout simplement parce qu’il n’y a pas moyen de contrôler ce qu’ils perçoivent », explique-t-il.

Un agent de l’ONT commente : « ce repli sur soi explique l’absence de financement du tourisme par l’État, lequel ne sait pas faire le suivi des activités ». Steve Kabasele se montre plutôt rassurant : « Ce que l’agence rapporte au fisc est important, selon qu’elle est petite ou grande. Il y a la TVA qu’elle paie sur ses prestations, les impôts professionnels sur les revenus mensuels des employés, certaines redevances versées au Fonds de promotion du tourisme ».

Difficultés de tous ordres

De 2012 à 2013, le tourisme n’a pas rapporté plus de 5 millions de dollars à la RDC. En 2014, le pays s’attendait à moins de 10 millions de dollars soit 9.087.316.000 FC. Pourtant, grâce notamment aux gorilles des Virunga refugiés du côté rwandais depuis 2005, Kigali a engrangé 293,6 millions de dollars en 2013.

Quoi qu’il en soit, le déficit de promotion ne décourage pas toutes les agences. Certaines se démènent tant bien que mal. Per exemple, la Générale des transports et services (GTS Express) organise des circuits touristiques à l’intérieur et à l’extérieur du pays. Avec quatre actionnaires dont trois nationaux et un expatrié, GTS Express propose du tourisme national et international, à l’instar de Jeffery Travels, une autre agence implantée au pays. Elles organisent souvent des visites guidées au parc des Bonobos, à la chute de Zongo, dans la province du Bas-Congo.

D’après Guillaume Kabasele d’Acrep Voyage and Tourism, certaines autres agences ont cessé depuis que l’Agence maritime internationale du Congo (Amicongo) ne fonctionne plus correctement comme dans le passé. « Nous orientons les clients à l’Est du pays », argue-t-il.

Certes, le secteur du tourisme connaît des difficultés de tous ordres : manque de moyens et d’infrastructures, persistance des poches d’insécurité dans l’Est, coûts exorbitants des billets d’avion sur des vols domestiques, formation insuffisante des travailleurs, absence de charroi automobile approprié pour les touristes. Malgré leur haute qualité à Kinshasa, les infrastructures hôtelières sont précaires dans certains coins disposant des sites touristiques importants. Sur cette longue liste de griefs figurent aussi les tracasseries administratives et policières. En définitive, pour booster le tourisme, il y a lieu de mettre l’accent sur la promotion.