Routes de Kinshasa : Arab Contractors préférée à Sinohydro

C’est finalement la firme égyptienne qui va exécuter les marchés de travaux de bitumage de cinq artères de la capitale. D’autres entreprises étaient en compétition : les chinoises Sinohydro et SZTC, la turque Zenith-EGC et les congolaises Malta Forresrt, Safricas et Safrimex. 

 

Le résultat a été proclamé le 6 mars 2018 par la Cellule Infrastructure du ministère des Infrastructures, des Travaux publics et de la Reconstruction (ITPR), mais il a été rendu public, il y a peu, par l’Autorité de régulation des marchés publics (ARMP). Selon la Cellule Infrastructure des ITPR, l’offre d’Arab Contractors a été la moins disante sur les deux lots, soit 17 075 928,65 dollars en raison de 10 227 332,42 pour le lot 1 et 6 848 596,23 dollars pour le lot 2. La société chinoise Sinohydro, par contre, exigeait 26 885 328,53 dollars pour les deux lots ; Malta Forrest, 26.6 millions de dollars ; SZTC, 20 218 962,42 dollars autant que le groupe Malta Forrest.

Ces offres ont naturellement été rejetées car jugées économiquement peu avantageuses après examen des rabais conditionnels. Les firmes congolaises Safricas et Safrimex ont été écartées au niveau du préliminaire faute d’avoir obtenu la note de 70/100 fixée dans le dossier d’appel d’offres. Alors que la candidature du groupement formé par la congolaise EGC et le turc Zenith (constructeur des passerelles sur le boulevard Lumumba) a été jugée non conforme car la garantie exigée dans l’appel d’offres n’a été émise que par Zenith en lieu et place de toutes le deux entreprises.

Banque arabe de développement 

Et d’après la Cellule Infrastructure du ministère des ITPR, la méthode de passation des marchés a été la SFQC (sélection fondée sur la qualité et le coût).  Et que toute entreprise qui se sentirait lésée avait jusqu’au 12 mars pour introduire un recours dont l’examen pourrait tirer sur plus de deux semaines. Cependant, des observateurs avertis font comprendre que les 17 millions de dollars que vont nécessiter les travaux de réhabilitation de 5 artères de la voirie de la capitale proviennent, en effet, de la Banque arabe de développement économique pour l’Afrique (BADEA) et du Fonds de l’OPEP pour le développement international (OFID).  Il s’agit des prêts de plus de 16 millions de dollars en raison de 8 millions pour chaque institution. Or il est de coutume, pas seulement en RDC, qu’un marché public financé par un partenaire extérieur soit attribué à une entreprise ayant un lien (intérêts économiques, nationalité, etc.) avec ledit bailleur de fonds. New Delhi finance les travaux de construction des centrales de Katende et de Kakobola, lesquels sont exécutés par des entreprises indiennes. Il sied de rappeler que les artères dont question sont l’avenue Croix rouge (commune de Kinshasa), l’avenue Bianda (commune Mont Ngafula), boulevard Biangala (Salongo, commune de Lemba), la chaussée de Kimwenza (commune de Kalamu) et Kisenso (commune de Kisenso), qui représentent un linéaire total de 12,36 km. Elles font, en partie de 22 avenues sélectionnées par le gouvernement depuis 2015 pour leur réhabilitation.

Le gouvernement s’est engagé à apporter une contribution de 2 millions de dollars aux travaux de bitumage de ces 5 artères. Durant ces cinq dernières années, les crédits les plus élevés accordés à la voirie structurante, donc relevant du pouvoir central, auront été versés en 2013 avec une enveloppe de plus de 15 milliards de FC, nettement 15 809 521 950 FC. Des larges artères de la capitale avaient été ciblées pour leur modernisation. Une fois encore, ce fut un rendez-vous manqué.

By-pass et route de la Paix 

Le projet de réhabilitation de l’avenue Elengesa réapparaîtra dans un programme de plus de 3 milliards de FC. Elengesa, du nom d’un acteur politique des années 1960, est pratiquement un boulevard de plus d’une dizaine de km qui relie les communes populeuses de Ngiri-Ngiri, Makala, Bumbu… Selembao. Avis d’experts : sa réhabilitation permettra de désengorger l’avenue de Libération, ex-24 novembre ainsi que l’avenue Kasa-Vubu. Autre artère susceptible de permettre la fluidité de la circulation plutôt dans la partie est de Kinshasa, c’est l’avenue de la Paix. Le gouvernement avait reconnu, il y a près de 18 mois, que « la construction de l’avenue de la Paix permettra de désenclaver plusieurs quartiers des communes de Kisenso, Matete et Mont Ngafula ». Mais voilà près de 15 ans que sa construction est chaque fois annoncée, les travaux commencent, puis s’arrêtent.

L’avenue de la Paix est longue de 14,5 km et fait partie de principales artères de la voirie de Kinshasa qui restent encore non revêtues. Autre artère principale dans la voirie de la capitale, l’avenue By-pass, ouvrant sur 13,7 km Salongo, rond-point Ngaba et Triangle Cité verte au centre-ville. La route de By-pass a été construite en 1981. Elle s’est fortement dégradée depuis. Un projet a été élaboré en 2011 en vue de sa réhabilitation et modernisation en une chaussée de 2×2 bandes pour un montant de quelque 40 millions de dollars, cependant sans frais des expropriations et autres frais connexes relatifs aux délocalisations des concessionnaires. Il s’agit entre autres des tuyaux de la REGIDESO, des câbles de la SNEL.

Mais le projet ne sera jamais aligné dans le budget de l’Etat de quatre dernières années. La réfection de By-pass aurait été finalement prise en charge par le contrat SOPECO. By-pass étant le prolongement de la nationale n°1.

Un contrat de concession de 11 ans a, en effet, été signé en 2008 entre, d’une part, l’État congolais et la firme chinoise CREC-7 à travers sa filiale SOPECE pour la gestion du péage sur la route nationale n°1 Kinshasa-Matadi. Les recettes de péage sur ce tronçon de la nationale n°1 sont passées depuis début 2015 à 3,5 millions de dollars le mois. Et en retour, les Chinois se sont engagés notamment à entretenir régulièrement la route Kinshasa/Matadi et à verser 130 000 dollars par mois à la province du Kongo-Central.

Trois postes de péage sont, en effet, érigés entre Kinshasa et Matadi. Depuis, SOPECE a revu à la hausse le prix de son péage. Ce qui n’est pas sans énerver les transporteurs routiers. Dans la capitale, en plein Kinshasa, les artères qui sont réellement modernisées l’ont été grâce aux financements extérieurs. Il s’agit notamment de l’avenue Kasa-Vubu et la boucle Matonge sur financement de la Banque mondiale, les avenues Kabambare, Sergent Moke et Kabinda sur financement de l’Union Européenne, alors que le Fonds kowétien a permis la réfection de l’avenue de la Libération dont  le tronçon Rond-point Moulaert-UPN.

La JICA (coopération japonaise) a financé les travaux de modernisation de l’avenue des Poids-Lourds. Pourtant, il n’est pas de sources de financement qui font défaut. Le gouvernement a, par exemple, alloué plus de 1 milliard de dollars pour des travaux de construction et de réhabilitation des infrastructures publiques en 2015, et le Fonds spécial de développement a été dotée, deux exercices de suite 2015 et 2016, d’un crédit de plus de 35 millions de dollars. Mais sur terrain, les effets de ces montants colossaux ne sont guère perceptibles.