Surestream licencie son personnel

Faute de trouver un terrain d’entente avec le gouvernement pour le renouvellement de son permis d’exploration du bloc Ndunda, à Muanda, la société britannique est tentée de plier bagages.

Les travaux d’exploration pétrolière que réalisait Surestream Petroleum sur le bloc Ndunda à Muanda sont à l’arrêt. Baudouin Ebeli Popo, directeur général de Surestream, a été limogé. La société a également licencié des travailleurs en masse. La cause ? Les permis d’exploration de Surestream Petroleum n’ont pas été renouvelés par le gouvernement. Sans contrat d’exploration depuis trois ans, la société britannique et son partenaire italien n’avaient plus de raison de garder le personnel. Pourtant, les deux partenaires avaient repris espoir sur le renouvellement du permis à la suite de l’implication de l’ancien ministre des Hydrocarbures, Crispin Atama Tabe.

Clarification

Dans une correspondance adressée à Surestream Petroleum Ltd, Atama Tabe proposait des amendements au contrat initial de partage de production pour le permis de ce bloc situé dans le bassin côtier. Ces amendements étaient consécutifs à l’arrivée d’Ente nazionale idrocarburi (ENI) et voulaient clarifier la position de la société italienne dans le partenariat. ENI est formellement présent sur le bloc depuis 2011 comme partenaire de Surestream et la Congolaise des Hydrocarbures (COHYDRO). En fait de clarification, Kinshasa tenait à taxer la présence de ce nouveau partenaire.

Ces amendements proposés devaient être approuvés par les parties, avant d’être coulés dans un projet d’ordonnance et faire l’objet d’un avenant au contrat de partage de production. Selon une source proche du dossier, ces propositions ouvraient la voie, en cas d’acceptation par toutes les parties, au renouvellement du permis Ndunda et au passage à la deuxième phase d’exploration d’une durée de cinq ans. Si le document a été approuvé par Surestream, il serait désormais entre les mains de la major italienne qui ne devrait pas tarder à l’entériner.

Pris à son propre piège

En 2005, Surestream a conclu trois permis avec le gouvernement, en association avec la COHYDRO. Ces contrats portent sur l’exploration des blocs Ndunda, Yema et Matamba-Makanzi dans le bassin côtier. Dans ces deux derniers cas, elle est associée à Glencore, le géant suisse des métaux non ferreux qui a décidé de se lancer dans l’aventure pétrolière au Congo. C’est depuis trois ans que Surestream attend l’accord du gouvernement pour renouveler ses trois permis. Kinshasa refusait jusqu’à maintenant toute avancée, car les autorités souhaitaient revoir à la hausse certains droits et obtenir une substantielle contrepartie sur ce permis qui, à l’évidence, a été mal négocié. Pris à son propre piège, l’exécutif a finalement abandonné cette option.

Autre couac ayant retardé l’accord : le prix du renouvellement. Le passage à la deuxième période d’exploration coûte désormais 1,5 million de dollars. Or Surestream a signé son contrat en 2005, à une époque où cette opération était facturée 125 000 dollars par l’État. Disposant d’une clause de stabilisation, l’entreprise n’a jamais accepté le principe de payer dix fois le montant prévu initialement. D’où des années de bras de fer avec les autorités.

Pour sortir de l’enlisement, l’injonction de rédiger les amendements est venue de la primature, alors même qu’au niveau de la présidence de la République certains conseillers restaient opposés à ce renouvellement sans l’application d’une taxe. Du fait de la paralysie de ses activités au Congo depuis toute cette période, Surestream n’a désormais que trois salariés dans le pays. Pour ENI, la cure est encore plus drastique : plus aucune personne n’est salariée à plein temps par l’italien au Congo. À son siège à Kinshasa, on n’observe aucune activité.

Les innovations du code 

Surestream explorait les gisements de pétrole dans le territoire de Muanda, à 200 km à l’ouest de Matadi. En octobre 2013, elle avait fermé ses portes, le gouvernement central n’ayant pas renouvelé ses permis d’exploration pour une raison qui demeure inconnue. C’est depuis trois ans que cette entreprise était dans la phase d’exploration de son projet. En septembre 2010, Surestream a finalisé un accord d’amodiation avec le groupe ENI qui prenait alors 55 % des parts dans le bloc Ndunda dans l’ex-Bas-Congo. Depuis août 2015, le Congo s’est doté d’une nouvelle loi qui règlemente le secteur des hydrocarbures. Parmi ses principales innovations, la mise en place d’un régime basé sur le contrat de partage de production et sur le contrat de services, à l’exclusion du régime concessionnel (aboli), l’implication de la société nationale dans toutes les activités de la chaîne pétrolière (amont et aval pétroliers), la levée de la mesure de suspension des contrats dans le secteur en amont pour favoriser le retour des investisseurs et le principe des droits acquis.

Au terme de ce dernier, « les droits d’hydrocarbures régulièrement acquis, avant l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, conservent leur validité jusqu’à leur expiration ». Avant l’adoption de la nouvelle loi, la production des hydrocarbures au Congo était restée marginale depuis de nombreuses années, à peine 25 000 barils de pétrole par jour, pour des revenus d’environ 400 millions de dollars. Kinshasa compte multiplier cette production par dix, à la suite de la mise en valeur des gisements du Graben Albertine, dans l’Est et de la zone d’intérêt commun constituée avec l’Angola sur le plateau continental du littoral ouest. Le flou entretenu autour du dossier pour le renouvellement des permis de Surestream viole les dispositions légales et les principes édictés. Il n’est pas de nature à encourager le développement du secteur pétrolier.