Une décision impopulaire fait jaser à Mbuji-Mayi

Des jeunes à la recherche de la mitraille pour gagner un peu de sous.

Les vendeuses des friperies et les propriétaires des rares boutiques d’habillement dans la ville de Mbuji-Mayi donnent de la voix. Ils désapprouvent la mesure du gouverneur du Kasaï oriental, Alphonse Ngoy Kasanji, qui a interdit le port des habits rouges. La décision de l’autorité provinciale est motivée par le souci d’éviter que « les paisibles citoyens soient confondus aux miliciens du chef Kamuina Nsapu », a fait comprendre, le 13 décembre, le ministre provincial de l’Intérieur, Charles Mbuyi. D’après lui, le gouvernorat provincial a, en effet, été informé par des jeunes miliciens arrêtés dans la commune de Bipemba que les insignes rouges constituaient la marque de distinction des miliciens de Kamuina Nsapu. À Bakwa Dianga, une vendeuse de friperie en serait venue aux mains avec une cliente revenue changer quelques « décrochez-moi-ça » de couleur rougeâtre qu’elle avait achetés, à la suite de la mesure du gouverneur.

Loin de calmer les esprits, le ministre provincial de l’Intérieur en a rajouté dans la confusion en invitant la population à dénoncer « quiconque se livrerait à effrayer la population avec le port des bracelets ou autres gadgets rouges ayant des effets magico-religieux afin de permettre à la population de bien passer les fêtes de fin d’année », a soutenu Charles Mbuyi. Il serait plutôt difficile aux tenanciers de bistrots, pubs ou boîtes de nuit de faire les affaires en cette période car le Gouv’ Ngoy Kasanji a prolongé le couvre-feu qui dure depuis plus de trois mois dans tout le Kasaï oriental. Il court désormais de 20 heures à 6 heures du matin. Précédemment, toute circulation dans la ville de Mbuji-Mayi, plus de 3 millions d’habitants, était interdite entre 21 heures et 5 heures du matin. Pour autant, l’insécurité n’avait guère connu de repli.

Laissé-pour-compte

La presse locale en a particulièrement fait les frais. Après que deux journalistes des chaînes privées locales eurent subi d’humiliants sévices corporels, aux heures vespérales, devant leurs femmes et enfants, a-t-on appris, un journaliste de la RTNC, Lubala Kalala, a été froidement abattu devant les siens dans la commune de Bipemba. Par ailleurs la Fédération des entreprises du Congo (FEC locale) se trouve complètement paralysée. Son président, Hubert Kazadi Mabika, a donné sa démission et s’en est allé à Lubumbashi pour des raisons personnelles.

Alors que les professionnels de l’hôtellerie, restauration et cafetariat disent travailler à perte. Des éléments de la paix, sous prétexte de contrôler des pièces d’identité, racketteraient plutôt leurs potentiels clients. L’incident survenu à la permanence de l’UDPS n’est guère pour rasséréner les opérateurs économiques. Ici, affaires et politique sont inextricablement liés. La crise récurrente à la Minière de Bakwanga (MIBA) a fait rejaillir dans l’opinion la complainte du Kasaïen laissé-pour-compte. La sécurité a d’ailleurs été renforcée dans les permanences des partis de la Majorité, dont le PPRD. Un climat de ni paix ni guerre règne dans la capitale diamantifère.