Washington ne décolère pas et s’apprête à durcir encore le ton contre Pékin

Dans un discours prévu le jeudi 4 octobre, le vice-président américain Mike Pence a multiplié les accusations contre Pékin, notamment sur le plan diplomatique et militaire, en pleine guerre commerciale.

ALORS QUE les tensions ne cessent de s’accroître entre Washington et Pékin, sur le plan commercial comme militaire, les États-Unis s’apprêtent à durcir encore le ton. Mike Pence, le vice-président américain, a prononcé le jeudi 4 octobre à Washington un discours dans lequel il a multiplié les attaques tous azimuts contre la Chine. Il a accusé Pékin de « tenter de virer Trump ». Devant l’Hudson Institute, il a dénoncé les tentatives de la Chine pour se débarrasser de Donald Trump. Notamment en exploitant les divisions entre le fédéral et le local.

Retour en arrière sur les libertés, « agression » économique et militaire, et, surtout, ingérence politique pour se débarrasser de Donald Trump… Pour nombre d’observateurs, le vice-président américain a énoncé « le réquisitoire le plus dur contre la Chine » depuis l’arrivée du milliardaire républicain à la Maison Blanche.

Les dés sont-ils jetés ?

Le numéro deux du gouvernement des États-Unis a repris dans un même discours très détaillé les accusations proférées ces dernières semaines par plusieurs membres de l’administration, à commencer par le président en plein Conseil de sécurité de l’ONU. Et a ainsi confirmé l’impression d’une offensive tous azimuts pour faire plier Pékin en pleine guerre commerciale.

« La Chine a lancé un effort sans précédent pour influencer l’opinion publique américaine, les élections législatives de novembre, et l’environnement menant à l’élection présidentielle de 2020 », a-t-il dénoncé devant le Hudson Institute, un cercle de réflexion conservateur de Washington.

« La Chine s’ingère dans la démocratie américaine » et, « pour dire les choses de manière abrupte, le leadership du président Trump fonctionne : la Chine veut un président américain différent », a-t-il lancé.

L’idylle des débuts entre Donald Trump et Xi Jinping est donc bien loin. Et le président américain le reconnaît sans détours, estimant à l’ONU que son homologue chinois n’était « peut-être plus » son « ami ». « Nous espérons que la relation avec Pékin puisse s’améliorer », a assuré jeudi Mike Pence.

Dénonçant une « agression économique » à coups de « vols » de technologies, le vice-président américain a confirmé qu’après les tarifs douaniers infligés sur 250 milliards de dollars d’importations chinoises, Washington était prêt à « faire substantiellement plus que doubler la mise en l’absence d’accord équitable ». La Maison Blanche a fait savoir parallèlement qu’elle tentait de former « une coalition » avec d’autres économies majeures pour « combattre la Chine dans le domaine commercial ».

Absence de démocratie, enfin, a-t-il protesté, érigeant Taïwan en modèle « pour tous les Chinois » – une affirmation susceptible de faire enrager les autorités de Pékin. « La Chine a bâti un État de surveillance inégalé, qui ne cesse de grossir et de devenir plus intrusif, souvent avec l’aide de la technologie américaine », a-t-il affirmé.

Une collision évitée

Mike Pence a fustigé notamment le géant asiatique pour un grave incident qui s’est produit en Mer de Chine méridionale. Un navire de guerre chinois s’est approché « dangereusement » – à moins de 41 m – d’un destroyer américain dans ses eaux disputées, avait protesté un responsable de l’US Navy. Le bâtiment américain, qui a été sommé de « quitter la zone », a été contraint de « manœuvrer afin d’éviter une collision », avait précisé ce commandant. 

La Chine a prié les États-Unis d’en finir avec ses « provocations ». Mais, « en dépit de ce harcèlement inconsidéré, la marine américaine continuera à naviguer et à opérer là où le droit international le permet et où nos intérêts nationaux l’exigent », a rétorqué Mike Pence, au think-tank Hudson Institute. « Nous ne serons pas intimidés. Nous ne nous retirerons pas », a-t-il ajouté. Le destroyer USS Decatur effectuait ce que les États-Unis qualifient « d’opération pour la liberté de navigation », quand il est passé à moins de 12 miles marins de récifs de l’archipel des Spratleys. Ces îlots sont revendiqués par Pékin, qui y construit des infrastructures militaires, mais aussi par les Philippines et le Vietnam. 

La contre-attaque chinoise

Le vice-président américain a mis par ailleurs sur le tapis un autre sujet sensible, Taïwan, après que Washington a autorisé le mois dernier une nouvelle vente d’armes à Taïpei. L’île mène de facto une politique indépendante, mais la Chine considère qu’elle fait partie intégrante de son territoire. Mike Pence a déclaré que les États-Unis respecteront la politique de la « Chine unique », mais que le choix de la démocratie fait par Taïwan « montre un meilleur chemin » à tous les Chinois. La réaction de Pékin risque d’être virulente. Le ministère chinois des Affaires étrangères a demandé récemment aux États-Unis « d’arrêter ces incessantes critiques et diffamations sur la Chine » et dénoncé des mots et des actes qui « endommagent » la relation bilatérale. Les tensions ne semblent pas près de s’apaiser.