Zenghei mis devant ses responsabilités pour la réhabilitation de la RN27

Grâce à un financement de la Banque mondiale, les travaux vont reprendre sur l’axe Komanda-Bunia-Goli, 300 km, en Ituri, à la mi-mars. Mais la Banque mondiale exige plus d’efficacité et de vélocité à l’entreprise chinoise pour que l’Office des Routes reprenne le chantier.

LA BANQUE mondiale a formellement notifié la Cellule Infrastructures du ministère des Infrastructures, des Travaux publics et de la Reconstruction (ITPR) d’exiger à l’entreprise chinoise Zenghei Corporation plus d’efficacité et de vélocité sans précipitation funeste. Apparemment, l’institution financière internationale n’a guère apprécié les dernières passations de marchés publics dans le domaine des routes opérées par la Cellule Infrastructures. Apparemment. Tout ou presque s’est conclu au gré à gré (entente directe) et quelques marchés par appels d’offre restreints et consultations préalables des soumissionnaires présélectionnés. 

Expertise nationale

Fin décembre 2018, à quelque 48 heures des élections, l’Autorité de régulation des marchés publics avait rendu public une vingtaine de marchés publics attribués de gré à gré par la Cellule Infrastructures dans le cadre de la mise en œuvre des activités de lutte contre la violence sexuelle et basée sur le genre (VSBG) sur le chantier des travaux de réhabilitation de la Route Nationale 2 (RN2), sur le tronçon Bukavu-Goma (146 km) dans la province du Sud-Kivu.  

Ce projet, tout comme la réhabilitation de la RN27 sur le tronçon Komanda-Bunia-Goli, rentre dans le cadre du projet Pro-Routes financé par la Banque mondiale. L’institution financière internationale veut que le chinois Zenghei achève le plus tôt sa part du marché pour que l’Office des Routes reprenne la gestion du chantier afin de commencer d’autres travaux dont la maintenance ainsi que la canalisation des eaux de ruissellement. 

À la faveur d’un point de presse à Bunia, chef-lieu de la province de l’Ituri, Pacifique Keta Upar, le gouverneur ad intérim, est revenu sur le respect du deadline imposé au chinois Zenghei par la Banque mondiale via l’autorité adjudicatrice des marchés, la Cellule Infrastructures. 

Le projet Pro-Routes a été initié en 2008 pour répondre aux impératifs de la connectivité des provinces de la République démocratique du Congo, à travers les routes en terre battue, étant donné que plusieurs localités du pays étaient restées enclavées à cause du délabrement avancé des infrastructures routières. Pro-Routes vise, en priorité, le rétablissement durable d’un accès entre les capitales provinciales, les districts et les territoires dans les trois ex-provinces : province Orientale, Sud-Kivu et Katanga. Le projet vise précisément de rouvrir environ 1 800 km de routes hautement prioritaires et d’en assurer l’entretien.  Sa deuxième composante porte sur le renforcement institutionnel du ministère de tutelle et des agences de gestion du secteur routier, notamment au niveau de la formulation d’une stratégie et d’une politique routière. Pro-Routes devrait également aider l’État congolais à se doter d’une industrie de construction routière. 

Mais le projet a été suspendu pendant plusieurs mois, après l’échéance du 28 février 2018. Pro-Routes a repris grâce à un financement additionnel de la Banque mondiale sous forme de prêts de quelque 63,3 millions de dollars. Sur les 58 000 km de routes d’intérêt général que compte la RDC, moins de 5 000 km sont asphaltés mais se trouvent dans un état qui, à maints endroits, pose problème. Au ministère des Infrastructures, des Travaux publics et de la Reconstruction, l’on sollicite environ 100 millions de dollars pour l’exercice 2019 afin de relancer notamment le fameux projet Relier la République par routes (RRR). 

Un budget de 181,7 millions de dollars

Pour mémoire, le projet RRR bat de l’aile depuis qu’il a été lancé. Le gouvernement n’apporte pas toujours sa contrepartie dans les projets financés par les partenaires. Ces derniers menaceraient de suspendre leurs financements futurs, a-t-on appris lors du séminaire d’orientation budgétaire 2019-2021. À l’Office des Routes (OR), qui a la charge de la gestion de routes nationales et de desserte agricole, les données statistiques et la comptabilité ne s’accorderaient pas toujours, commente cet activiste de la société civile.  

La Banque mondiale qui est un partenaire de taille dans ce secteur, a souvent décrié le dysfonctionnement de l’OR, comme en témoigne sa publication de septembre 2015 sur la gestion de dépenses publiques et la responsabilité financière de l’État. Fin 2017, un cabinet malien, Afrique Audit et Conseil, a été chargé d’auditer le projet Pro-Routes. L’État a été nommément épinglé, singulièrement le ministère des ITPR pour des « attributions ombrageuses » des marchés de modernisation de routes ciblées par le projet. 

Mais de l’avis des experts du ministère de tutelle, l’État devrait poursuivre pour les prochaines années, la stratégie de mise en concession des routes. Il sied de rappeler que la route Kasindi-Beni-Butembo, dans la province du Nord-Kivu, devrait être cédée à des opérateurs privés. Dans un rapport sur le budget 2019, les organisations de la société civile encadrées par le Réseau gouvernance économique et démocratie (REGED) ont déploré l’absence d’un document de stratégie sectorielle des ITPR en RDC. Par ailleurs, le budget 2019 des ITPR (environ 182 millions de dollars) est en grande partie, soit 52 %, tributaire des ressources extérieures.