Ancien 1ER Ministre en France, il convoite la mairie de Barcelone en Espagne

Applaudi par les uns, hué par les autres, Manuel Valls est désormais seul face à son destin politique. Il l’a compris, mardi 2 octobre, au moment de faire ses adieux à l’Assemblée nationale française. Voici un cas d’école qui va certainement relancer la polémique au pays sur la double nationalité.

LE 25 SEPTEMBRE, Manuel Valls a annoncé sa candidature aux élections municipales de Barcelone en Espagne, prévues en mai 2019. Pour ce faire, il a démissionné de tous ses mandats en France, à travers ses adieux mardi 2 octobre à l’Assemblée nationale française. L’ancien 1ER Ministre de François Hollande a témoigné de « sa reconnaissance à la France, un pays unique qui donne la possibilité à quelqu’un qui est né à l’étranger de devenir maire, député et chef d’un gouvernement » sous les huées des députés LFI (La France insoumise) et l’ovation de la majorité parlementaire.

Manuel Valls s’apprête donc à entamer une nouvelle vie politique. « Pour un ancien 1ER Ministre, la pire des choses serait de susciter l’indifférence », a déclaré Edouard Philippe à l’adresse de son prédécesseur. « Au vu des réactions dures ou chaleureuses et respectueuses, on peut dire que vous n’avez jamais suscité l’indifférence », a poursuivi le chef du gouvernement français. Ce dernier a rendu un hommage appuyé au rôle de Manuel Valls au lendemain des attentats de 2015. « Vous avez, à des moments où la France était menacée, trouvé les mots. La France vous en sera toujours reconnaissante », a conclu Edouard Philippe. 

Les réactions à la pelle

C’est du centre-droit et du gouvernement que sont venus les mots les plus chaleureux… car Manuel Valls est et restera une des principales figures de la politique française qui quitte la scène politique française – sans susciter beaucoup de regrets, notamment à gauche. « Je pense que Manuel Valls est lucide sur le fait que les gens ont tourné la page. Et qu’il tourne la page aussi », a commenté Benoît Hamon, vainqueur de la primaire PS de 2017 face à l’ancien 1ER Ministre. « Manuel Valls fait partie des personnes qui ont organisé, éclairé la grande transhumance des élites de la gauche vers la droite. On voit à l’épreuve des faits, à travers le quinquennat de François Hollande et maintenant celui d’Emmanuel Macron, que cela n’améliore pas la vie des Français », analyse l’ancien candidat à la présidentielle qui a comme Manuel Valls quitté le Parti socialiste en 2017. « Il est parti. Il part un peu plus loin », ironisait Boris Vallaud le porte-parole du PS, quelques heures avant l’annonce de Manuel Valls, ne souhaitant pas s’appesantir davantage. Le sénateur PS Rachid Temal, quant à lui, s’est montré plus vindicatif. « C’est le dernier épisode d’une mauvaise série B. Donc heureusement que le ‘the end’ arrive enfin », raille-t-il, en apportant « tout (son) soutien aux camarades socialistes espagnols du PSOE à Barcelone ».

Adversaire de Manuel Valls lors des législatives de 2017, l’Insoumise Farida Amrani s’est dite « triste et déçue » pour les habitants de sa circonscription, accusant Manuel Valls de « trahi (r) sa patrie ». Elle a annoncé qu’elle sera candidate pour lui succéder. « Il fait un pari osé, risqué. Il a été très maltraité par LREM, il en tire les enseignements », avait commenté Christian Jacob, le chef de file des députés LR.

Par ailleurs, Manuel Valls, qui avait apporté son soutien à Emmanuel Macron avant la présidentielle, a reçu des encouragements en provenance du gouvernement. « C’est une belle illustration de l’Europe », a estimé sur Sud Radio Nathalie Loiseau, la secrétaire d’État française aux Affaires européennes. Gérald Darmanin, le ministre du Budget (ex-LR), trouve du « panache » au geste de l’ex-député de l’Essonne. « Manuel Valls (…) est quelqu’un que l’Europe et la République ont de la chance d’avoir dans leurs rangs », a-t-il affirmé sur France Inter.

Du côté des députés LREM, avec qui Manuel Valls avait décidé de siéger, on salue sa démarche « transfrontalière ». Sans regretter particulièrement son départ. Il « avait un statut un peu à part, des positions un peu à part » au sein du groupe LREM, constate le député Aurélien Taché. « Il a quand même pris des positions très hétérogènes par rapport à celles de LREM, et même par rapport au président de la République », a-t-il noté.

C’est finalement du côté du centre-droit que sont venus les mots les plus chaleureux. « J’ai beaucoup d’estime pour Manuel Valls. Qu’il prenne ce risque renforce mon estime pour lui », a salué Jean-Christophe Lagarde, le président de l’UDI. « Il a été un bon 1ER Ministre d’un mauvais président de la République. Dans les circonstances qui ont été celles qu’il a connues au gouvernement, celles des attentats, il tenait la barre plus que son président », a ajouté le co-président des députés UDI-Agir, qui regrette qu’Emmanuel Macron n’ait pas utilisé « son expérience et ses talents ».

Jean-Christophe Lagarde n’est pas de ceux qui pensent que Manuel Valls prend nécessairement un aller sans retour pour la Catalogne : « J’espère pour lui qu’il remportera cette élection à Barcelone. Mais s’il échouait et revenait à l’Assemblée nationale, son expérience et son talent, même après neuf mois d’absence, apporteraient sans doute plus que certains députés présents 24 heures sur 24 », juge-t-il.