Comment le krach asiatique va peser sur les investissements chinois en Afrique

La « Chinafrique » connaît-elle un revers de fortune ? Ce qui se passe en Chine ne reste plus en Chine. Désormais, un battement d’aile de papillon à Pékin suffit à provoquer un tsunami boursier dans le reste du monde. Dans une Afrique déjà dépendante de la Chine, on suit donc avec beaucoup d’attention le yoyo de la place de Shanghai.

Selon le Fathom Consulting Group, la fin de l’âge d’or est même pour bientôt et la plupart des pays africains n’équilibreront pas leur budget cette année en raison essentiellement d’une baisse de la demande chinoise en matières premières. Depuis le pic des années 2011-2013, les échanges entre l’Afrique et la Chine ont presque fondu de moitié, et cette tendance risque d’empirer. Pékin pourrait en effet limiter ses importations de cuivre de Zambie, de pétrole d’Angola et du Nigeria, ou encore d’or et de platine d’Afrique du Sud.

 La Zambie pourrait trébucher la première

L’effondrement du marché chinois n’est pas un bon signe pour les pays africains, explique Ravi Bhatia, analyste crédit chez S&P. La croissance de l’économie africaine est due en partie à la demande chinoise en matières premières, en minerais et en pétrole. Le ralentissement chinois continuera donc à influer sur les prix des matières premières et les volumes d’exportation.

Les pays les plus exposés sont forcément les plus dépendants de la demande chinoise. C’est le cas d’abord de la Sierra Leone qui se remet tout juste de l’épidémie Ebola et puise ses maigres ressources des exportations de fer et de titane vers les usines chinoises. Même inquiétude pour l’Angola dont les exportations de pétrole sont vitales : la Chine achète près de 40 % du brut angolais.

Depuis la fin de la guerre civile en 2002, la Chine aurait accordé près de 14,5 milliards de dollars de crédits à Luanda. Des fonds essentiellement gagés sur un baril de pétrole dont la chute des cours rend encore plus problématique la situation économique du pays.

La Zambie pourrait trébucher la première. Les investissements chinois y représentent en effet 7,5 % de la production nationale et 80 % des exportations. Une crise durable en Chine, un recul de la demande, ajouté à la baisse des cours des matières premières, auraient donc évidemment des conséquences dévastatrices.

Autre victime collatérale de la crise chinoise : l’Afrique du Sud. Affecté comme les autres par la chute des cours, le pays a enregistré cette semaine un recul de 1,3 % de son PIB au deuxième trimestre par rapport au premier, ravivant le spectre d’une récession dans l’économie la plus industrialisée du continent.

Sur un an, la croissance sud-africaine ne dépasse pas 1,2 %, en baisse par rapport au rythme de 2,1 % du premier trimestre. « Les perspectives économiques restent relativement faibles », selon les analystes de Nedbank qui prévoient une croissance « probablement inférieure à 2 % en 2015 et encore plus faible en 2016 ».

Encore de beaux jours pour la « Chinafrique »

La Chine est le premier partenaire économique de l’Afrique du Sud, mais elle n’a plus la même boulimie qu’autrefois. Les exportations de fer sud-africain ont par exemple chuté de 36,9 % sur un an et des minerais comme le platine, utilisé dans l’automobile, subissent de plein fouet la baisse des cours et de la demande mondiale.

Pour l’heure cependant, la Chine n’entend pas tourner le dos à l’Afrique. Selon les prévisions de Thomson Reuters Oil Research and Forecasts, les importations chinoises de pétrole africain ont encore augmenté de 41 % entre les mois de juin et juillet 2015, avec une pointe à 3,4 millions de tonnes exportées vers la Chine pour l’Angola et 767 000 tonnes pour le Sud Soudan en juillet.

La « Chinafrique » a donc encore certainement de beaux jours devant elle. Pour chaque dollar que les États-Unis investissent en Afrique, la Chine en met trois. La deuxième économie du monde aura toujours besoin de carburant pour tourner. Même au ralenti.