La gestion de la fibre optique privatisée

Près de deux ans après le lancement des travaux du point d’atterrage de Moanda, l’internet haut débit n’est toujours pas au rendez-vous. Ce retard cause un préjudice à tout le monde, y compris des pays voisins. Conséquence : la Société congolaise des postes et télécommunications (SCPT) est dessaisie de la gérance au profit d’un privé.   

La fibre optique de la République démocratique du Congo sera gérée par une société privée. La  décision a été annoncée le 4 juin par Thomas Luhaka, vice-Premier ministre et ministre des Postes, Télécommunications, et des Nouvelles technologies de l’information et de la communication.  Pour Thomas Luhaka, le gouvernement envisage d’installer cinquante mille kilomètres de fibre optique à travers le pays dans le but de réduire la fracture numérique entre les utilisateurs des Nouvelles technologies de l’information et de la communication. Selon Oscar Manikunda, président de l’Autorité de régulation des postes et télécommunications en RDC (ARPTC), le pays comptait 37 millions d’abonnés aux en NTIC  au  premier trimestre de cette année. « Cela représente un accroissement annuel de 35%. Le pays a enregistré six millions d’abonnés  à l’internet au cours de cette période, soit 55% d’accroissement », a-t-il indiqué.

Un secteur en  pleine opacité

D’après Didier Musetu, directeur général de la SCPT, les travaux d’atterrage de la fibre optique de Moanda ont pris fin et ceux de la ligne Kinshasa-Kasumbalesa le seront aussi cette année. Ces travaux d’atterrage de la fibre optique avaient commencé en juillet 2013. Nombreux sont ceux qui, jusque-là, ont dénoncé l’opacité qui entoure la gestion de la fibre optique. Dans une pétition adressée au chef de l’État en décembre 2014, les agents et cadres de la SCPT avaient souligné qu’une année et demie après le lancement des travaux de la station d’atterrage de la fibre optique dans le Bas-Congo,  ni la présidence de la République ni la primature n’étaient raccordées. Et affirmé que leur entreprise avait reçu  deux millions de dollars du consortium WACS, mais qu’aucun projet concret n’a été mis en place par la direction générale de l’entreprise pour l’exploitation de l’internet haut débit. Par ailleurs, selon les mêmes salariés, la SCPT avait obtenu une ligne de crédit de 12 millions de dollars de la Banque internationale pour l’Afrique au Congo (BIAC) pour la construction de la station d’atterrage de Moanda.  Ils s’étonnaient du fait que la société Doreco, qui a construit la station, revendique une créance de plus de 700 000 dollars. En plus, la SCPT ayant reçu de WACS un montant de 500 000 dollars, affirme avoir payé 160 000 dollars à la société CITCC pour l’entretien du câble à fibre optique.

Après son entrée en fonction, Thomas Luhaka avait reçu, en janvier, les membres du comité professionnel de la Fédération des entreprises du Congo (FEC). Au menu : la fibre optique qui serait, selon ses hôtes, de mauvaise qualité. Certains avaient même ironisé en affirmant qu’elle est bonne pour le musée. Ces entrepreneurs avaient exigé que le réseau soit audité et régulièrement entretenu. D’après eux, la gestion de la fibre optique par la SCPT était calamiteuse. À l’issue d’une enquête parlementaire, l’Assemblée nationale a dénoncé, mi-mai, la surfacturation du matériel acheté pour réaliser la première phase de la connexion de la RDC à la fibre optique. Certains députés  ont demandé des poursuites judiciaires des auteurs de cet acte.

Les travaux se poursuivent malgré le retard

La RDC est en retard par rapport au déploiement de tout son réseau interne en fibre optique. Cette extension est très attendue par les points d’atterrage de six autres pays dont la Tanzanie, le Burundi, le Rwanda, l’Ouganda, la Centrafrique et le Soudan du Sud. Cette situation leur est préjudiciable. Le 19 mars dernier,  la cinquième phase du  projet dénommé Programme régional des réseaux de télécommunications haut débit en Afrique centrale a été lancé. Baptisé CAB 5, ce réseau haut débit est financé par la Banque mondiale à hauteur de 92 millions de dollars. Il consiste en la construction, la gestion et la commercialisation du câble optique. Il va permettre au finish de relier Kinshasa à Lubumbashi et Kisangani et va s’ajouter aux 3 300 km de fibre optique qui relient Moanda, Kinshasa et Kasumbalesa.