La PREGESCO épingle le gouvernement

Cette organisation de la société civile constate que le gouvernement n’atteindra pas, en 2015, les objectifs définis par l’Organisation des Nations unies (ONU). Avant de relever que le budget de l’État est largement consacré au fonctionnement des institutions du pays, au détriment des priorités sociales.

Le Programme de renforcement des capacités de la société civile dans la prévention et la gestion des conflits en Afrique centrale (PREGESCO) a annoncé, fin décembre, que 66% du budget national est absorbé par les dépenses liées au fonctionnement des institutions publiques du pays. C’était à l’ occasion de la clôture d’un séminaire de formation de trois jours organisé à l’ intention des acteurs de la société civile congolaise autour du contrôle citoyen des budgets publics axés sur les objectifs du New Deal en RDC. Pour Georges Tshionza Mata, coordonateur régional du PREGESCO, cette annonce ne procède pas de la manipulation ou d’une simple déclaration politique, mais plutôt la résultante d’un travail fouillé, réalisé pendant trois mois sur l’exécution des trois derniers exercices budgétaires : 2012, 2013 et 2014. « Nous sommes inquiets du bilan que va présenter la République démocratique du Congo  en 2015 en rapport avec la réalisation des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) du fait que les deux précédentes évaluations n’étaient pas élogieuses pour l’image du pays. En mars 2011, le bilan était largement sombre et en novembre 2014 quelques améliorations ont été observées dans les secteurs de la santé et de l’éducation. Ce constat suscite inquiétudes et interrogations quant aux conclusions de la prochaine évaluation. Nous avons donc évalué l’exécution du budget de l’État en tant que citoyens », a-t-il affirmé.

Un pays fragile

La RDC reste un pays fragile qui se relève difficilement d’une période d’instabilité politique et économique de plus de deux décennies. Ses spécificités lui offrent pourtant des opportunités en matière de développement économique et social, mais elles posent également des défis énormes sur le plan de la sécurité et de la paix, de l’autorité de l’État, de la décentralisation et de la gouvernance politique et économique, qui sont des sources de vulnérabilité. Cette fragilité se caractérise par un grand déficit dans la non prise en charge des besoins sociaux de base tels que l’ accès aux soins de santé primaires, à l’ éducation, à l’ eau potable, à l’ énergie, à l’ habitat, à la sécurité, à l’emploi et à la justice. Pour faire face à ces énormes défis et vu la faiblesse des ressources financières dont dispose le pays, les décideurs politiques doivent consacrer la grande part du budget national à l’amélioration du bien-être de la population plutôt qu’au fonctionnement des institutions publiques. Le coordonateur régional du PREGESCO a indiqué que, suivant le Programme d’action du gouvernement (PAG), la revue de l’exécution budgétaire des axes prioritaires fait apparaître des situations contrastées et des disparités importantes en termes d’allocation des ressources, d’ une part, et en termes de réalisation des dépenses d’autre part. Sur le plan de la réalisation des dépenses, le taux il se situe autour de 54,63%. En 2012 il était à 55,59%. En 2013, les données fin juin 2014 le situaient à 22,54%. Et la tendance observée depuis 2011 montre que, en 2011, le taux d’exécution moyen était de 47,28 %. En 2012, le taux d’exécution moyen tournait autour de 54,63% ; 55,59% pour 2013. L’année dernière, fin septembre, il était à 56,25%. L’impression générale qui se dégage de cette revue est que les dépenses publiques suivant les axes prioritaires- clés du PAG n’ont jamais atteint le niveau critique à partir duquel elles peuvent fortement avoir un impact sur les transformations subséquentes aux réformes engagées pour permettre de quitter la phase de crise (PSG 2,3 et 5) et d’achever la phase de transition (PSG 1 et 4) dans laquelle se trouve présentement le pays.

Un potentiel sous-utilisé 

S’agissant des fondements économiques, il n’y a aucun doute sur le fait que la RDC est un pays au potentiel de développement immense, quasiment intact, et  que ce potentiel est actuellement sous-utilisé. Le secteur agricole, avec une faible productivité, est en déclin depuis plusieurs années en raison notamment de l’insécurité. Le système de transport, archaïque, est désarticulé et fragmenté, avec une offre insuffisante. Le réseau routier est en mauvais état avec de grandes faiblesses en termes de pénétration et de fluidité. L’économie informelle prédomine, tandis que les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) ont des coûts exorbitants pour une grande partie de la population. Concernant les revenus et les services, on note dans ce secteur une sous-fiscalisation, voire l’absence d’une fiscalisation de certaines fractions de l’économie nationale, notamment les secteurs minier, pétrolier et informel, qui sont à la base d’un important manque à gagner pour l’État. En outre, la structure des recettes publiques de la RDC se caractérise par la prédominance des recettes douanières dans le budget. La dépendance envers ces recettes n’offre pas un ancrage solide aux politiques publiques d’autant plus que les recettes douanières constituent plus de 30% des revenus globaux. Cette situation expose les finances publiques aux chocs extérieurs et peut à tout moment affecter la mise en œuvre de la politique budgétaire.

Des réalités contrastées

Dans le domaine de l’eau, bien que disposant d’abondantes réserves d’eau tant en surface que souterraines, notamment un réseau hydrographique représentant 53% des réserves d’eau douce d’Afrique, la majorité de la population congolaise n’a pas accès à l’eau potable. Pour une population estimée à plus de 60 millions d’habitants, le taux moyen d’accès à l’eau potable est de 22% comparé aux 60% pour l’ensemble de l’Afrique subsaharienne. Cette moyenne cache des grandes disparités entre les provinces, les centres urbains et ruraux (12% en milieu rural et 37% en milieu urbain). En matière d’électricité, le pays possède actuellement l’un des plus bas indicateurs de consommation d’énergie du monde avec un taux d’électrification avoisinant 10%, selon la SNEL. Cette réalité contraste avec le potentiel hydroélectrique du pays.

Le partenariat de Busan

C’est dans un contexte de vulnérabilité que la RDC avait signé le partenariat de Busan (Corée du Sud) pour une coopération efficace au service du développement, entré en vigueur le 1er décembre 2011 et ayant posé les bases d’ un nouveau partenariat mondial pour l’ efficacité de l’aide, intégrant la problématique du développement durable dans les pays en situation de conflit et de fragilité à travers le New Deal. C’est une nouvelle approche qui définit cinq objectifs de renforcement de l’État et de consolidation de la paix comme fondements pour atteindre les Objectifs du millénaire pour le développement et propose aux acteurs nationaux et internationaux une nouvelle façon de travailler ensemble pour soutenir la construction des États pacifiés. Nonobstant de multiples contraintes structurelles et conjoncturelles, la RDC a fait d’énormes progrès en enregistrant durant plusieurs années de suite des résultats encourageants dans plusieurs domaines, notamment sur le front de la création des richesses et de la stabilité du cadre macroéconomique. Malgré ces progrès, l’ampleur des défis au développement reste immense.