L’Angola s’impatiente de la poussivité de son voisin congolais

Luanda a dépêché un émissaire à Kinshasa, porteur d’une lettre de son président à son homologue congolais. Les Angolais souhaitent que le réseau ferroviaire de la RDC soit connecté au leur au plus vite, même à titre expérimental, avant fin 2017. 

 

Le ministre angolais des Transports, Augusto da Silva Tomais, a remis en mains propres, le 14 novembre, au chef de l’État congolais, Joseph Kabila Kabange, une lettre de son homologue angolais, Joao Lourenço, relative à l’exploitation du chemin de fer de Benguela. L’émissaire angolais l’a fait savoir au sortir de l’entretien que lui a accordé le président congolais. L’émissaire angolais a souhaité que la RDC fournisse des efforts afin que les trains de la Société nationale congolaise des chemins de fer (SNCC) atteignent la localité frontalière angolaise de Luao, en face de la bourgade de Dilolo.

Mais pour ce faire, il va falloir que le tronçon de la voie ferrée comprise entre Kolwezi et Dilolo, environ 20 km, soit opérationnel. « Du côté congolais, a laissé entendre le ministre des Transports angolais, les efforts sont en train d’être faits pour que les trains de la SNCC arrivent à Luao, en Angola, en passant par Kolwezi et Dilolo, en RDC ». Dans la foulée, Augusto da Silva Tomais a obtenu de son homologue congolais, José Makila Sumanda, un contrat de partenariat pour la réhabilitation du réseau SNCC, partant de Lubumbashi à Dilolo. L’on croit savoir que Luanda serait prêt à financer les travaux y afférents d’autant plus que le ministre des Transports angolais a confié à son homologue de la RDC que l’Angola disposait d’une expertise avérée dans ce domaine.

Favoriser les échanges commerciaux

Augusto de Silva Tomas a renchéri que la réhabilitation de la voie ferrée est porteuse de croissance, car, a-t-il dit, celle-ci contribuera à réduire la distance séparant les deux pays et aidera les opérateurs  à se fréquenter mutuellement. Un optimisme partagé par son collègue de la RDC, même si le projet en question ne figure nullement part dans le budget de l’État pour l’exercice 2017. Pour le vice-1ER Ministre, ministre des Transports et des Voies des communications, José Makila Sumanda, la réhabilitation de la voie ferrée Lubumbashi-Dilolo contribuera, en effet, à booster l’économie congolaise par le corridor sud, de Lubumbashi, en RDC jusqu’à Bengwela, en Angola. Et que le trafic et les échanges commerciaux entre les deux pays s’accroîtront, étant donné que les opérateurs économiques des deux pays auront la facilité d’acheminer leurs marchandises vers les centres de consommation.

Luanda veut visiblement aller plus vite et tient à imprimer son rythme à la RDC. Les ministres des Transports angolais et congolais ont, en effet, tenu, en compagnie des experts des deux pays, une séance de travail en présence du directeur de cabinet du chef de l’État, Néhémie Mwilanya Wilondja sur l’exploitation du chemin de fer de Benguela. Mais pourquoi Luanda y tient tant?

L’Angola est financièrement exsangue à la suite de la dégringolade des cours du pétrole ces trois dernières années. Le marché de Lufu passe à ce jour comme une source inespérée d’approvisionnement en devises du pays car les Congolais font généralement leurs transactions en dollar.

Et voilà que le chemin de fer de Benguela (Caminho de ferro de Benguela) s’impose, en effet, tel un trait d’union entre l’océan Atlantique et l’océan Indien. Il a été rouvert en 2014, après des années de guerre civile grâce à des investissements chinois (2 milliards de dollars). Cette voie ferrée passe pour une route loxodromique  autant pour les exportations des minerais du Haut-Katanga que pour les importations des équipements et engins destinés à l’industrie minière. La production du cuivre en RDC va crescendo depuis le dernier trimestre 2016 à la suite de la reprise des activités de Kambove, Luisha Mining et KCC. Le pays est passé depuis deux ans comme le premier producteur mondial du cobalt. L’objectif inavoué de Luanda est donc d’attirer le trafic minier vers « ses » rails dont le tracé et une partie de financement, apprend-on, sont venus du Congo-Belge. La dernière fois qu’un lingot de cuivre est passé par la voie de Benguela remonte à 1981, renseigne-t-on à la Générale des carrières et des mines (GECAMINES). Depuis, avec l’effondrement du trafic fleuve-rail assuré alors par l’ex-ONATRA, les minerais de la RDC sont exportés par route via l’Afrique du Sud.