Le ministère de l’Emploi et les agences de placement eu quête de solution

Sanctionnées par le ministre de tutelle pour non-respect des lois, les sociétés de recrutement veulent régulariser leur situation. Leurs recours ont permis la mise en place d’une commission.

Le secteur des travaux publics recourt souvent à du personnel temporaire.
Le secteur des travaux publics recourt souvent à du personnel temporaire.

Le délai accordé aux 49 agences de placement suspendues par l’ex-ministre de l’Emploi, du Travail et de la Prévoyance sociale, a expiré le 4 décembre. Sanctionnées depuis le 10 novembre, certaines de ces structures ont introduit des recours auprès du ministère de tutelle, après qu’elles aient reçu la notification de la suspension, le 18 novembre. Cette démarche a conduit à la création d’une commission chargée d’examiner les différents dossiers. D’après les intéressés, la mesure qui les frappe serait arbitraire car « ceux qui opèrent dans le noir ne sont pas inquiétés. » Au total 70 agences sont répertoriées dans cette filière, dont 21 qui ne sont pas concernées par la suspension. Jean-Félix Tshobo Nduka, responsable de Congo Interim Agency, l’une des agences installées à Kinshasa sanctionnées, affirme avoir introduit un recours après avoir régularisé sa situation en payant la nouvelle taxe de l’Office national de l’emploi (ONEM) et celle due à l’Institut national de préparation professionnelle (INPP). S’agissant des rapports trimestriels et annuels d’activités à transmettre à l’ONEM, il reconnaît que son entreprise, qui en a envoyé 10 sur 18, cherche à se rattraper. Pourtant, l’ex- ministère de tutelle indiquait pour sa part qu’aucune des entreprises suspendues n’est en règle. Pire, la plupart d’entre elles n’ont pas d’adresse connue.

Dépôt des rapports

Pour la levée de la sanction, chaque entreprise est tenue de déposer le rapport de ses activités. C’est ce qui permet au ministère de l’Emploi, du Travail et de la Prévoyance sociale de connaître les statistiques des opérations et les activités menées par les agences de placement sur le marché de l’emploi. « Sous peine de suspension d’activités, le Service privé de placement est tenu de signaler son existence chaque année à l’Office national de l’emploi moyennant le dépôt d’un rapport annuel d’activités. Les sanctions peuvent aller jusqu’au retrait de l’autorisation en cas de manquement au cours de deux années successives », avertit la loi. Quant à l’ONEM, organe de régulation du marché de l’emploi, il veille sur l’enregistrement des demandeurs d’emploi, la délivrance des cartes de demandeurs d’emploi, et le visa des contrats de travail.

Paiement des contributions

Après avoir déposé les rapports, les SPP doivent payer la cotisation sociale à l’Institut national de sécurité sociale (INSS), la contribution patronale à l’ONEM, sans oublier celle  due à l’INPP. Tout employeur a l’obligation de payer mensuellement 3,5 % du salaire de chaque travailleur au titre de la cotisation sociale, et 5% pour l’entreprise elle-même.

Le ministre a été formel : « Nous veillerons à ce que l’application de toutes ces mesures soit stricte. Ces maisons ne versent même pas les cotisations sociales de leurs agents à l’INSS. C’est pour dire qu’elles n’ont pas besoin de préparer les vieux jours de leurs employés. Maintenant qu’elles sont frappées, elles seront obligées de payer tous les droits dus à leurs travailleurs… »

Des lourdes pénalités

La suspension provisoire qui pèse sur les SPP sera levée certes, mais nombreuses vont devoir subir les conséquences de leur négligence. Non seulement elles devront payer tous les arriérés, mais également des pénalités. « L’employeur est tenu de remettre chaque mois  à l’ONEM, au plus tard le deuxième jour du mois qui suit le paiement de la rémunération, une déclaration sur la base de laquelle  la contribution sera établie », précise l’arrêté du ministre, en ajoutant que les déclarations fausses ou incomplètes donnent lieu à l’application des pénalités équivalant à 50 % du montant  de la contribution due. Fixé par un arrêté ministériel, le taux de la contribution patronale de l’ONEM est de 0,2% de la rémunération mensuelle payée par l’employeur à ses travailleurs, qu’ils soient du public, du parapublic ou du privé. Cette contribution est payable au plus tard dans les 15 jours qui suivent le mois pendant lequel  la rémunération a été payée. « Le non payement dans le délai imparti donne lieu à l’application d’une majoration de 50% sur le montant de la contribution mensuelle due par jour de retard », stipule la loi. Recevant l’autorisation de fonctionnement de l’ONEM, les SPP ne peuvent pas se dérober de leurs obligations vis-à-vis de cet office étatique, par la voie duquel ils obtiennent l’agrément délivré par le ministère de tutelle. L’agréation de l’ONEM dure deux ans. Non-remboursable, elle coûte 700 francs fiscaux.    

Service de placement et sous-traitance

En RDC, les SPP interviennent dans le cadre d’un partenariat public-privé, particulièrement en ce qui concerne les ressources humaines. Différents arrêtés et directives ministériels fixent leurs conditions d’ouverture, d’agrément et de fonctionnement, en précisant les tâches qui leur sont dévolues. Parmi celles-ci il y a « l’inscription des demandeurs d’emploi ;  la prospection des offres d’emploi auprès des entreprises et établissements ; la création des bases de données des demandeurs d’emploi et des entreprises et établissements ; la sélection des demandeurs d’emploi ; le placement des demandeurs d’emploi dans les entreprises et établissements utilisateurs ». Ces services ont quelques avantages que leur reconnaît l’État congolais, notamment « des fonds en rapport avec la vulgarisation et la sensibilisation de la mise en œuvre de la politique nationale de l’emploi ». Ils peuvent se spécialiser dans les différents secteurs de l’emploi et cela, dans le strict respect des codes de profession et codes des secteurs d’activité », selon la loi.

Celles qui ont pignon sur rue, s’en sortent bien en plaçant des travailleurs dans les différentes catégories professionnelles et même dans l’administration. Seulement, il y en a qui outrepassent leur mission. Certains SPP se transforment, en violation de la loi, en société de sous-traitance, entretenant ainsi une sorte de flou. C’est l’Inspection générale du travail qui veille à ce qu’ils ne puissent pas gérer le personnel placé dans les entreprises et établissements. Malgré cela, des agences œuvrant dans la sous-traitance foisonnent en RDC. Elles recherchent une main-d’œuvre qu’elles emploient généralement dans le secteur du gardiennage et de la sécurité.

Dans certains cas, non contents des conditions de travail, les employés de ces sociétés sous-traitantes demandent à être engagés directement par les entreprises utilisatrices. Selon un expert, la sous-traitance est « un contrat d’entreprise par lequel une personne physique ou morale confie l’exécution d’un certain travail ou la fourniture d’un certain service moyennant un prix forfaitaire à condition que le sous-traitant engage lui-même la main-d’œuvre nécessaire pour exécuter un contrat d’entreprise.» Un avocat au barreau de Lubumbashi, explique que la sous-traitance n’est pas appliquée en conformité avec la législation du travail en RDC, qui n’est pas aussi explicite sur la question. D’où les abus qui se commettent.


La liste des 49 entreprises de placement suspendues

1. Établissements 1.Buli Global Business ; 2. Engineering Cost Trad ; 3. Sakiema Business Sprl ; 4. Kewipa Sprl ; 5. Établissements Mars Trading ; 6. G.G. Services ; 7. Cabinet d’Audit et d’Experts – ; 8. Sani Beauté Sprl ; 9. Cabinet Congo Recrutement ; 10. Société JDC DRC SARL; 11. OK Madji Consulting; 12. International Training; 13. New Fort Service; 14. Kin Intérim Sprl; 15. Etablissements Job Centre Service ; 16. VL Consult ; 17. Établissements Maison Mak ; 18. Groupe RGM ; 19. Afrik Intérim ; 20. SCS ; 21. Congo Matériaux ; 22. Emploi Service RDC ; 23. Assainis pour Tous ; 24. Bwanukongo ; 25. GIE Sprl ; 26. IBL ; 27. Seram ; 28. Etablissements M.SS. ; 29. Case Sprl ; 30. JNC Consulting ; 31. SOGEFMO ; 32. Agence Kerrith ; 33. Établissements Rahim ; 34. Lobi Services ; 35. Société TLS ; 36. CIA ; 37. BRJM ; 38. New System Corporation ; 39. CNTC ; 40. Intérim Nations ; 41. Samiris ; 42. BCTC Sprl ; 43. Universal Security Sprl ; 44. EMI Consulting ; 45. The Icon Group Tig ; 46. Global Business Solution ; 47. Groupe Lumanisha ; 48. Newescokin Sprl ; 49. Sogetrans.