Le monnayage des cotes en milieu universitaire, une des causes de la baisse du niveau de l’enseignement en RDC

La jeunesse en RDC constitue plus de 60% de la population. Il s’agit là d’une source et d’une ressource nécessaires au développement du pays. Considérée comme l’avenir de demain, cette jeunesse doit être mieux outillée pour assurer et assumer la relève. Raison pour laquelle les études sont importantes pour y parvenir. Après l’obtention du diplôme d’Etat, l’université se pointe à l’horizon pour certains. La RDC regorge plusieurs universités et instituts supérieurs qui assurent des enseignements dans de nombreuses filières. S’il y a quelques années, on pouvait apprécier le produit sorti et formé dans nos universités et instituts supérieurs, de nos jours, la tendance a fortement baissé. Le niveau de l’enseignement supérieur et universitaire n’est plus le même. Les mauvaises pratiques ont envahi et se sont installées dans nos universités et instituts supérieurs. Et parmi ces mauvaises pratiques érigées en système, il y a le monnayage des cotes appelé communément « branchement ».

Ce sont des antivaleurs qui sont devenues au fil des années pour certains étudiants, une véritable garantie pour passer de classe mieux pour assurer la réussite. Une pratique qui constitue, d’une part, un danger permanent pour l’avenir de la jeunesse congolaise, d’autre part, elle semble devenir une source de revenus sûre pour certains enseignants (professeurs, chefs de travaux ou encore assistants). Actuellement, pour passer des promotions, d’une part, plusieurs étudiants congolais qui n’ont pas réalisé de bons points aux travaux pratiques, interrogations et examens négocient la côte acceptable auprès de certains professeurs, chefs de travaux ou assistants moyennant une somme d’argent, et d’autre part, l’achat obligatoire des syllabus, questionnaires des TP et interrogations conditionne également la réussite dans plusieurs universités et instituts supérieurs de la RD Congo. Moralité, la plupart de ceux qui terminent les études universitaires ont du mal à faire face au monde du travail.

Les entreprises qui les reçoivent en stage se plaignent et se posent la question sur l’avenir de l’enseignement universitaire en RDC. « Un étudiant finaliste du premier ou du second cycle de l’université qui n’est pas capable de tenir une conversation en français. Pire encore, l’écriture elle-même pose problème. Pour s’en convaincre, jeter juste un coup d’œil sur les feuilles de dictée et vous serez surpris », raconte un responsable des stages dans une entreprise de la place. Avant de poursuivre « lorsqu’un étudiant sait que pour passer de classe, il suffit de recourir au branchement, c’est-à-dire corrompre des professeurs, il ne fera aucun effort pour étudier ».

La parole aux concernés

Pour mieux comprendre le contour de cette pratique, Business et Finances est allé à la rencontre des acteurs directs de cette triste réalité : le corps professoral et les étudiants. Jossy Mutombo, finaliste en économie monétaire à l’Université Libre de Kinshasa, ULK, accorde la grande part de responsabilité aux étudiants. Selon elle, les étudiants paresseux et irresponsables sont ceux qui affectionnent le plus cette pratique, particulièrement les filles qui passent leur temps à parler shopping, séries télévisées et théâtres au lieu de discuter des enseignements reçus à l’université.

Du côté de l’ISP/Gombe, Mabaya Makembi finaliste en Hôtellerie pointe du doigt les assistants et chefs de travaux qui, selon elle, favorisent ces antivaleurs. « Ils font express de composer des travaux pratiques et interrogations difficiles pour amener les étudiants qui échoueront à les contacter pour un éventuel branchement » a-t-elle ajouté. Patrick Nkoso, gradué en Sciences Commerciales, option Comptabilité à l’Institut Supérieur de Commerce en 2011, s’en prend à la vente des syllabus qui doit être bannie en milieu universitaire pour lutter contre ce malheureux phénomène.

Car selon lui, « certains professeurs accordent déjà des points aux étudiants qui achètent leurs syllabus, et dans une telle situation, ceux qui n’auront pas acheté seront dans l’obligation de coopérer pour combler le vide ». Un professeur de l’Institut Facultaire des Sciences de l’Information et de la Communication, IFASIC, qui a souhaité garder l’anonymat, soutient pour sa part que ce phénomène qui n’est rien d’autre que la corruption, est un mal qui touche le pays dans son ensemble. Le Gouvernement à sa part de responsabilité et il en est de même pour les professeurs ainsi que les parents des étudiants. Selon lui, « chacun doit jouer pleinement son rôle pour préparer une génération meilleure des jeunes congolais. Une génération qui va constituer une élite certaine afin de conduire notre pays à bon port ».

Il est donc impérieux que chacun jouent son rôle pour lutter contre cette antivaleur au risque de former des piètres cadres de demain. A commencer par le gouvernement qui est appelé à allouer une rémunération décente aux professeurs d’université et instituts supérieurs afin de leur permettre d’abandonner leurs vielles habitudes. On apprend que des efforts sont effectivement faits, mais cela n’est pas encore suffisant, lance-t-on du côté des syndicats des enseignants.