L’entrepreneuriat des femmes et des jeunes filles

Dans le secteur des micros-entreprises, beaucoup d’initiatives se déclinent au féminin et concernent surtout l’alimentaire. 

 

La conjoncture économique difficile des années 1970 et 1980 semble avoir favorisé l’éclosion des entreprises familiales ou de petite taille. Boutiques d’habillements ou de produits alimentaires et cosmétiques, garages, boulangeries, transports, bars, ateliers de couture ou de coiffure… continuent d’essaimer à travers le pays. Leurs promoteurs ont pour objectif l’acquisition de revenus de subsistance ou de compléments de revenus. Généralement, ils n’ont pas de compétences particulières et pratiquent l’auto-emploi. Ils sont dépourvus de statut légal même s’ils paient parfois des taxes commerciales comme la patente. L’activité porte sur un micro-service (par exemple cabine téléphonique, change de monnaie) ou sur le commerce de détail. La force de travail et un petit fonds de roulement suffisent pour démarrer ce genre d’activités. Le travail a lieu dans la rue, à domicile ou sur un marché. Ce qui rend son potentiel d’évolution très faible ou inexistant.

Beaucoup de ces activités génératrices de revenus sont initiées par des femmes. Plus de 64% des femmes exercent une activité économique, dont 65% dans le secteur agricole.  Dans l’ensemble, depuis quelques années, c’est la femme qui assure de plus en plus le rôle de chef de ménage. L’homme est devenu soit incapable de subvenir aux besoins de la famille par manque de travail, soit décédé. La présence des femmes entrepreneurs est très remarquée dans le secteur des micro-activités (alimentation, habillement, quincaillerie…). C’est dans ce secteur que l’on constate le plus d’évolution des activités, certaines aboutissant à de véritables entreprises.

Micros et petites entreprises

Dans les activités génératrices de revenus, on distingue les micro-entreprises des petites entreprises. Le créateur d’une micro-entreprise (étal, boutique, cabine téléphonique, atelier de couture ou de coiffure, garage…) met souvent en œuvre des compétences techniques simples, il pratique l’auto-emploi mais peut parfois être aidé de membres de sa famille ou d’un apprenti. L’activité est réalisée à plein temps mais sa petite taille ne lui permet que de subvenir à ses besoins. Son statut légal est souvent peu clair, mais il paie fréquemment des taxes. Son activité nécessite parfois des technologies simples, du petit outillage, pas toujours de local permanent et un fonds de roulement pour l’achat des matières premières et le renouvellement du petit matériel. Son potentiel d’évolution reste faible.

Par contre, le promoteur d’une petite entreprise s’inscrit dans une logique entrepreneuriale dès le départ, nécessitant un savoir-faire. L’activité est bien définie et exercée à temps plein par un « patron », assisté de membres de sa famille et, surtout, de salariés et d’apprentis. L’entreprise est souvent enregistrée (entreprise individuelle), paie des impôts et participe quelquefois à une organisation professionnelle. Par exemple, les organes de presse, les compagnies aériennes, les cliniques privées, les pharmacies, les cabinets d’audit ou d’avocats… La technologie reste assez simple mais nécessite toutefois des investissements et des équipements légers avec un local permanent. Le promoteur dispose d’un capital de départ et il peut y avoir début d’accumulation de capital avec croissance. À l’intérieur de cette catégorie, existe toute une frange d’entreprises dotées d’un réel potentiel de croissance et engagées dans un processus de diversification et de modernisation.

Les moyennes entreprises 

Dans ce secteur, le promoteur d’une moyenne entreprise a une attitude réellement entrepreneuriale avec une vision à moyen et long termes, des capacités techniques et de gestions confirmées. Il a un personnel aux fonctions bien précises, son activité est bien spécialisée, parfois diversifiée. Son existence est légale dans la majorité des cas, il est enregistré, bien souvent membre d’un organisme professionnel ou intermédiaire. La complexité technologique et la production en série nécessitent des moyens de production adaptés sur un site spécialisé. Un capital et un fonds de roulement parfois importants sont donc indispensables, mais sont souvent insuffisants. Le potentiel d’accumulation et de croissance est réel, souvent freiné par le manque de ressources humaines et financières.

En RDC, la classe moyenne nationale est quasiment inexistante. Les activités économiques ont toujours été contrôlées dans une large majorité par les entrepreneurs étrangers (Européens, Américains, Asiatiques…). C’est ainsi que le gouvernement s’est fixé pour objectif d’assurer l’émergence d’une classe moyenne d’opérateurs économiques congolais et de protéger l’exercice du petit commerce. Pour atteindre cet objectif, il est prévu de réformer et d’actualiser le cadre juridique relatif à l’exercice des activités économiques, interdire l’exercice du petit commerce et des petites activités aux étrangers, faciliter l’accès au crédit des PME et PMI, voire mettre en place un Fonds de garantie au bénéfice de celles-ci.

Depuis une quinzaine d’années, on assiste à une redistribution de rôles sur l’échiquier. Bien avant, on connaissait les Américains, les Français, les Belges dans les grandes entreprises ; les Grecs et les Indo-Pakistanais dans la panification ; les Portugais dans le commerce de produits alimentaires ; les Ouest-Africains dans le petit commerce. Au fil des ans, de nouveaux investisseurs, d’origines diverses, se sont installés en communautés d’affaires au Zaïre. Les Libanais se sont distingués dans la création de petites entreprises, bousculant ainsi les positions acquises sur l’échiquier. Ils avaient pris une place importante dans l’économie congolaise dans les années 1970-1990. Mais avec les produits venus de Chine ou de Turquie, mais aussi d’Europe comme l’Italie, l’Espagne, les Libanais ont perdu peu à peu leur position dominante. La stratégie des Libanais a changé. Ils délaissent volontiers le commerce pour investir massivement dans l’immobilier, notamment l’hôtellerie de moyen standing, dans la fabrication industrielle de pains et dérivés, dans la filière bois et dans la fourniture d’accès à internet (cybercafés)… Quant aux Ouest-Africains dont la présence au Congo est aussi très ancienne, ils réconfortent leurs positions dans le commerce de détail dans les marchés et les quartiers populaires.

Depuis une dizaine d’années, les Chinois sont clinquants mais ils doivent compter avec la concurrence des Indiens, qui tendent à leur disputer la place prédominante qu’ils occupent dans l’économie du pays. La présence chinoise s’est fortement développée à partir des années 2004, à la faveur du programme gouvernemental dit 5 chantiers de la République. Et depuis, les Chinois sont partout. C’est dans la filière BTP (bâtiment et travaux publics) que  les sociétés chinoises sont les plus visibles au Congo.

Les Indiens, eux, marquent leur territoire dans le secteur du commerce, de supermarchés et de l’hôtellerie. Comme les nombreux détaillants chinois, les Indiens s’installent aussi dans les grandes villes, voire dans les villages, faisant de l’ombre aux commerçants ouest-africains (Sénégalais, Maliens et Guinéens) ou nationaux. Aujourd’hui, nationaux et étrangers sont présents dans tous les segments de l’entreprise et dans tous les secteurs : mines, bois, agro-alimentaire, construction, maintenance, commerce de détail, distribution, restauration, banque, services, professions libérales…

La concurrence s’aiguise

Chinois, Indiens et Libanais doivent faire face à la montée en puissance d’autres acteurs étrangers. Parmi les nouveaux investisseurs figurent les Africains qui font une percée au Congo avec l’implantation des banques, des boulangeries, des restaurants et des cabinets d’affaires. Parmi les investisseurs originaires des pays arabes, les Marocains sont particulièrement dynamiques. La présence marocaine est visible dans le transport aérien (Royal Air Maroc). Elle devrait se renforcer suite au protocole d’accord de coopération.

Les Turcs et les Iraniens font également partie des nouveaux entrants sur le marché congolais. Bien évidemment, les nouveaux arrivants profitent de relations commerciales entre les États. Pour s’assurer des débouchés, tous les moyens sont déployés : lobbyings, relations d’affaires, rapprochement entre chambres consulaires, création de chambres de commerce bilatérales, expositions, voyages d’hommes d’affaires… Les investisseurs sont largement encouragés par les autorités, qui cherchent à attirer les investissements étrangers pour diversifier et développer l’économie du pays. Reste que le partenariat de ces investisseurs avec les entreprises congolaises, notamment les PME, est plutôt timide.