N’djili et ses mécaniciens à la criée

 Ils sont jeunes. Ils ont choisi d’exercer, à leur manière, le métier qu’ils ont à peine appris dans différents garages disséminés à travers la commune de N’djili et ses environs : proposer des services rapides aux propriétaires des véhicules, sans pour autant avoir de garage. L’astuce leur permet de clôturer la journée avec quelques billets de banque en poche. 

Certains mécaniciens à N’djili n’ont pas besoin des garages pour exercer le métier. (Photo DR)
Certains mécaniciens à N’djili n’ont pas besoin des garages pour exercer le métier. (Photo DR)

Cette pratique atypique se passe au quartier 1, dans la commune de N’djili, dans un espace de loisir à ciel ouvert aménagé pour les jeunes de cette municipalité. C’est là qu’on retrouve, juste à l’entrée du site, ces jeunes mécaniciens, débout avec leurs sacs chargés d’outillage, se rendant complètement disponibles aux automobilistes qui sont courtisés comme devant les étalages de friperie. Chacun vante sa spécialité : réparation des freins, remplacement des rotules, des roulements ou encore des amortisseurs. Toutes les petites pannes que connaissent chaque jour les véhicules sont réparées sur place, en grande rapidité, mais aussi à un prix bon marché. « La plupart de nos clients sont des chauffeurs de taxis et taxi-bus (surtout les Mercédès 207). Une fois qu’ils font leur entrée sur le site, nous allons vers eux et leur proposons nos services. Si le chauffeur est d’accord, je lui trouve un endroit pour garer la voiture et je fais mon travail », affirme Carlos Mayunga, 25 ans, un de ces mécaniciens prêts à tout. A côté, un de ses amis explique : « il faut beaucoup de courage, d’abord pour convaincre le chauffeur à accepter l’offre. Ensuite, il faut bien travailler pour mériter la confiance du client.»

Gagne-pain 

Ici, la plupart de ces jeunes affirment avoir choisi ce métier pour trouver de quoi subvenir aux besoins sociaux de base. D’autres disent payer les frais d’études, grâce à ceci. Pour ne pas rester dans l’oisiveté ou devenir « Kuluna » (jeunes délinquants qui sèment la terreur dans des quartiers), ils ont choisi d’apprendre le métier de mécanicien. Au terme d’une année de formation dans un garage, ils s’estiment déjà capables de réparer des « petites pannes ».

Nous prenons ce travail au sérieux, parce que c’est notre gagne-pain. Si vous avez bien travaillé, vous pouvez sortir avec plus de 10 usd à la fin de la journée. Un célibataire peut bien s’en sortir avec cette somme. De même que quelqu’un, parmi nous, qui a femme et enfants à la maison. 

Serge Mikanda, mécanicien

« Nous prenons ce travail au sérieux, parce que c’est notre gagne-pain. Si vous avez bien travaillé, vous pouvez sortir avec plus de 10 dollars à la fin de la journée. Un célibataire peut bien s’en sortir avec cette somme. De même que quelqu’un, parmi nous, qui a femme et enfants à la maison», se confie le mécanicien Serge Mikanda.

A côté de ces jeunes mécaniciens debout, il y a ceux qui ont de l’expérience dans le domaine et qui ont monté des petits garages sur le site. La plupart des chauffeurs préfèrent aller directement chez eux, considéré comme des ‘’maîtres’’ plutôt que chez les ‘’élèves’’ sans garage.

« Même si les jeunes mécaniciens font du bon boulot, nous préférons aller auprès des doyens. Leur expérience compte pour beaucoup, alors que les petits tâtonnent parfois dans le travail », estime un chauffeur d’un bus Mercédès 207. Les plus expérimentés interviennent dans des grandes pannes : révision de moteur, entretien de véhicule, réparation de la pompe d’injection… Généralement, ils travaillent en collaboration avec les jeunes mécaniciens. « Il y a des pannes qui nécessitent l’intervention d’un mécanicien expérimenté. Souvent, ces jeunes mécaniciens debout orientent ce genre de situations vers nous », reconnait Me Kester Munganga, spécialiste dans la réparation du système de freins.

Le site du quartier 1 fonctionne chaque jour. Ces jeunes affirment payer chaque samedi, 500 francs de taxe pour la municipalité de Ndjili. Kester Munganga parle d’un site d’apprentissage du métier, de travail mais aussi d’un cadre qui lutte contre le banditisme urbain. Il invite les autorités municipales et urbaines à bien aménager le site pour leur permettre de bien exercer leur métier. Car, en période de pluie, le travail devient difficile étant donné que l’espace n’est pas couvert.